JDNet. Quelle est votre lecture
des derniers résultats trimestriels de Yahoo
?
Isabelle Bordry.
Les chiffres sont
intéressants à plusieurs titres. En terme
d'audience, nous avons plus de 210 millions de visiteurs
uniques sur le réseau international. Nous distribuons
1,25 milliard de pages vues par jour. Et le temps de
connexion par visiteur continue d'augmenter. La marque
et le produit Yahoo sont toujours pertinents. Sur la
partie chiffres financiers, il est clair que nous enregistrons
une baisse des revenus par rapport à l'année
dernière.
Quelles
sont les raisons de cette baisse ?
Actuellement,
le marché de la publicité est tendu, y
compris sur Internet. Dans les périodes difficiles,
le budget communication est toujours le premier poste
affecté. Nous nous reposons essentiellement sur
la publicité car Yahoo est un média dont
l'objectif est de générer la plus forte
audience possible. Nous avons entamé une politique
de diversification des revenus via les services Yahoo
Corporate à destination des entreprises et des
services payants "premium" pour le grand public.
D'ici la fin de l'année, cette diversification
devrait représenter 20 % du chiffre d'affaires
de Yahoo. Je vous fais remarquer que la publication
de nos résultats trimestriels a été
accueillie par une hausse en Bourse. Après deux
années extraordinaires, nous revenons dans un
cadre normal. Nous gardons la tête froide car
nous avons toujours su maîtriser nos coûts.
Terry
Semel, le PDG de Yahoo, devrait annoncer prochainement
une série de mesures d'économies. Pourquoi
ces mesures n'affecteraient a priori que les Etats-Unis
alors que Yahoo est un réseau international ?
Je
ne peux pas communiquer à ce sujet. Mais, à
ce stade, seuls les Etats-Unis seraient directement
concernés.
Ressentez-vous
une différence au sein de Yahoo après
les événements internationaux de septembre
?
Forcément,
il est difficile de rester indifférent par rapport
à ce que nous venons de vivre. Sur le plan humain,
le fait de collaborer avec une société
qui est américaine à l'origine et qui
dispose d'une équipe à New York nous a
naturellement touchés. Sur le plan professionnel,
nous avons été très réactifs
pour relayer l'information chaude. Sur deux jours (11
et 12 septembre), nous avons multiplié l'audience
par dix sur le dossier "news" consacré
à ces événements.
Sur
le portail Yahoo.fr, existe-il encore des domaines que
vous ne couvrez pas ?
L'objectif est d'être le compagnon au quotidien
d'un utilisateur Internet. Il est vrai que nous nous
attachons à développer des thématiques
phares comme le sport, la finance et l'actualité.
Le guide Internet, alimenté par nos surfeurs,
constitue un formidable baromètre de ce qui se
passe sur Internet. Ce que nous cherchons à développper
à côté de l'instantanéité
de l'information, c'est l'interaction. Par exemple,
sur la partie "Yahoo Finance", nous venons
de mettre en place des forums. C'est un développement
clé pour nous. Il est vrai que, compte tenu du
foisonnement de services, nous pourrions nous demander
si nous n'en développons pas trop. C'est à
nous de gérer les projets prioritaires.
Après
cinq années d'existence, pourquoi Yahoo n'a-t-il
pas changé de charte grahique ?
Pourquoi voulez-vous qu'on
la change ? Elle ne vous plaît pas ? (rires)
Une des clés du succès de Yahoo, c'est
la légèreté des pages. Nos utilisateurs
demandent que les pages s'affichent vite. Disons qu'il
y a des évolutions par touche. Depuis un mois
et demi, nous nous attachons à animer davantage
la page d'accueil de Yahoo.fr.
Quelle
est la répartition de l'audience sur les différentes
parties de Yahoo.fr ?
Nous ne communiquons pas
précisément sur l'audience de Yahoo.fr.
En revanche, à partir du ratio en terme de pages
vues, l'audience se répartit ainsi : 40 %
média et
e-commerce, 40 % pour la partie communauté
(forums, chat, etc.) et 20 % pour le guide Internet.
Vous
avez toujours été critique vis-à-vis
de l'outil Cybermétrie. Que pensez-vous de la
nouvelle version ?
C'est
un outil qui a dû être amélioré
techniquement et qui va être utile pour une certaine
catégorie de sites qui ont besoin d'avoir un
suivi de leurs pages vues. Sa démarche de certification
auprès de l'OJD est judicieuse. Mais aujourd'hui,
ce qu'un annonceur veut acheter, c'est une pénétration
sur le marché, un reach, un nombre de
visiteurs uniques avec un temps de répétition
et de connexion. Et ces informations-là sont
données par les panels.
Où
en est le coût pour mille (CPM) chez Yahoo ?
Nous
arrivons à des CPM équivalents à
ceux pratiqués par la presse généraliste.
En rotation générale, nous étions
autour de 150 francs l'année dernière.
Maintenant, nous tournons autour de 30 francs. Nous
nous adaptons à une expérience annonceur.
Il faut que l'on arrive à tenir avec ce niveau
de CPM. Je vous rappelle que le journal sportif L'Equipe
vend un CPM à 250 francs pour 1.000 lecteurs.
Aujourd'hui, nos thématiques sont dans cet univers-là.
Il faut que l'on explique à nos annonceurs que
nous avons un service plus : c'est l'interactivité.
Quel
est le profil actuel de vos annonceurs ?
Le
portefeuille d'annonceurs a changé par rapport
à l'année dernière. Nous avions
beaucoup des "pure players" Internet. Maintenant,
nos annonceurs ont un profil plus traditionnel et les
démarches se professionnalisent. Par exemple,
nous avons lancé notre chaîne auto avec
Renault en faisant apparaître la marque dans diverses
sections sur Yahoo.fr. Nous proposons dorénavant
plus d'espaces d'expression à nos annonceurs.
Ils peuvent davantage travailler sur leur image. Ce
type d'opération demande des relations plus approfondies
avec les annonceurs et une préparation plus longue.
Allez-vous
lancer une opération e-Commerce pour Noël
?
Oui.
Ce sera une opération événementielle
sous forme de "corner shopping en ligne".
Elle sera promue dès la page d'accueil de Yahoo.fr.
L'opération est plus ambitieuse que celle de
l'année dernière.
D'après
vous, comment les internautes français vont-ils
accueillir les services payant que vous comptez développer
?
La
qualité des services et des produits est fondamentale.
Il faut que les services payants soient bien positionnés,
c'est à dire qu'ils répondent à
de vrais besoins. Je ne vois pas pourquoi Yahoo ne participerait
pas au développement de l'e-Commerce en France.
En revanche, il est vrai que nous allons changer de
relation avec nos visiteurs qui vont devenir des consommateurs.
Vous
avez débuté les actvités BtoB avec
Yahoo Corporate. Ça marche ?
Plutôt
bien. Nous avons signé avec 32 clients à
l'international. En Europe, nous avons deux contrats.
L'outil que nous proposons aux entreprises permet d'homogénéiser
leurs intranets. A côté de l'information
corporate, nous pouvons ajouter des fils plus généralistes
de "news". Nous adaptons notre savoir-faire
aux besoins des grandes entreprises. Le
retour que nous avons du marché est très
positif. Le gros de l'équipe Yahoo Corporate
est à Londres mais nous avons des relais dans
chaque pays.
Vous
avez établi beaucoup d'accords avec des fournisseurs
de contenu basés sur le principe d'échange
"apport de contenu contre visibilité".
Les éditeurs n'ont-ils pas tendance à
exiger un système plus rémunérateur
?
Depuis
cinq ans, nous n'arrêtons pas d'inventer des business
models. Nos partenaires de contenu souhaitent toujours
développer des formes de co-branding, avec un
effet de trafic généré sur leurs
propres sites. Nos approches vont certainement évoluer.
Comment
voyez-vous le développement des portails généralistes
en France ? Quels acteurs vont rester d'ici trois-quatre
ans ?
Il
existe sur Internet des carrefours d'audience bien identifiés
tels que Yahoo ou Lycos, à côté
de chaînes plus thématiques. Nous allons
certainement assister à de nouvelles opérations
de consolidation. Nous avons vu le rapprochement Lycos/Spray/Caramail/Multimania.
Je remarque que Vizzavi.fr s'est beaucoup amélioré.
Mais, monter un portail européen, ce n'est pas
simple.
Il
existe une nouvelle génération de dirigeants
chez Yahoo : Terry Semel, PDG
de Yahoo Inc, et
Mark Opzoomer à la tête de Yahoo Europe.
Vous vous consultez souvent ?
Nous
communiquons beaucoup. Mark Opzoomer a réellement
pris ses fonctions en septembre. Tous les mois, nous
avons une réunion au niveau européen.
Quant à Terry Semel, il a participé à
un séminaire en Espagne cet été.
Il connaît très bien la complexité
du marché européen.
Comment
vivez-vous votre parcours dans l'Internet en tant que
femme dans un monde de dirigeants plutôt masculins
?
En
France, il existe un noyau dur de pionnières
de l'Internet : Marie-Christine Levet de Lycos,
maintenant chez Club-Internet, Anne-Sophie Pastel pour
AuFéminin.com, Orianne Garcia pour Caramail.
De manière générale, on les retrouve
dans des postes liés aux médias ou à
la communication. Mais réussir, je crois d'abord
que c'est une question de personnalité.
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