INTERVIEW
 
Directeur général adjoint
Groupe Iliad (free.fr)
Michaël Boukobza
"Titre"
Alors que le modèle économique des services gratuits en ligne est aujourd'hui décrié, Free, fournisseur d'accès Internet gratuit du groupe Iliad, qui dispose actuellement d'un million d'abonnés "actifs", a atteint le seuil de rentabilité. Parallèlement, Groupe Iliad, sa maison-mère, issue du monde de la télématique, a monté une galaxie de sites thématiques (lire l'encadré). Parmi eux, l'annuaire inversé Annu.com et Société.com, service gratuit de diffusion d'informations légales et financières sur les entreprises françaises, se dégagent largement du peloton. En 2001, Groupe Iliad compte réaliser un chiffre d'affaires de 75 millions d'euros pour un résultat brut d'exploitation de près de 14 millions d'euros. Michaêl Boukobza, directeur général adjoint du groupe, revient sur ces différents chantiers.22 octobre 2001
 
          
JDNet. Si vous aviez à résumer le positionnement du groupe Iliad, comment le définiriez-vous ?
Michaël Boukobza. L'activité historique d'Iliad, ce sont les annuaires, avec 3617ANNU et Annu.com. La deuxième activité, c'est clairement celle d'ISP-opérateur télécoms. Nous avons toujours eu une vision télécoms du métier, d'où l'activité fourniture d'accès Internet via un modèle gratuit, avec l'offre Free.fr, et un modèle forfait, via notre offre Free Télécom. Nous avons également des activités accessoires, type "dotcom", pour lesquelles nous avons essayé de trouver des niches originales afin de s'implanter sur le marché.

Commençons par votre service phare d'accès Internet, Free. Comment êtes-vous devenus rentables contrairement à beeaucoup de vos concurrents ?

Historiquement, tous les FAI se sont d'abord positionnés comme un média, puis sont passés à un statut de fournisseurs de services télécoms. A l'exception de Wanadoo, tous nos concurrents cherchent dorénavant un "business model" lié aux télécoms. Depuis le lancement de Free, en avril 1999, nous avons toujours expliqué que nous étions sur une niche du marché des télécoms. Nous avons obtenu auprès de l'Autorité de régulation des télécommunications (ART) deux licences : L.33.1 pour déployer un réseau téléphonique et L.34.1 pour offrir un service téléphonique en France. Nous avons au minimum un point d'interconnexion par région avec France Télécom, sachant qu'il y en a dix-huit en France. Et nous avons fait basculer 100% de notre trafic sur un numéro 0 860 qui nous appartient et sur lequel nous réalisons un chiffre d'affaires et un revenu (1). La marge brute que nous dégageons sert d'une part à payer les salaires de nos collaborateurs et de l'autre à soutenir nos efforts marketing.

Cherchez-vous à monter un binôme d'offres qui repose sur un accès Internet gratuit et un autre payant, à l'instar de Tiscali-LibertySurf ?
Free recense actuellement un million d'abonnés "actifs" (Ndlr : connectés au moins une fois lors des derniers quarante jours). Nous ne communiquons pas sur le taux de conversion. Avec Free, nous voulons une offre simple et pérenne. Les forfaits n'arrêtent pas d'évoluer sur le marché de la fourniture d'accès Internet, mais nous préférons donner des repères à nos utilisateurs. A l'origine, nous avons monté une offre gratuite. Nous continuons de croire à cette offre car nous estimons que c'est la meilleure façon de découvrir Internet pour un consommateur type moyen. Elle est toujours au centre de nos campagnes de publicité. Maintenant, nous avons développé une formule forfaitaire agressive de 50 heures pour 98 francs avec des minutes supplémentaires au tarif local. Cette offre est récente, elle est apparue à la fin du printemps dernier.

Recrutez-vous autant d'abonnés que l'année dernière ?
Actuellement, la croissance d'abonnements continue mais elle est ralentie à cause d'un environnement difficile. Mais, encore une fois, je ne veux pas sombrer dans le pessimisme. La dernière étude de l'Insee montre que 6% des foyers français veulent s'abonner à Internet dans les douze prochains mois, ce qui représente 1,5 million de personnes. Je connais peu de marché avec une croissance potentielle de ce type actuellement.

Vous indiquez avoir moins communiqué que vos concurrents. Pourtant, on voit souvent vos spots TV...
Nous avons fait un benchmarking à ce sujet sur l'année dernière. Nous sommes clairement ceux qui ont le moins dépensé et il existe un rapport de un à sept avec certains groupes concurrents. Nous savons comment optimiser la publicité, car cela fait des années que nous faisons de la publicité pour notre service Annu. Nous avons utilisé cette expérience pour lancer Free. Mais nous ne communiquons pas sur le budget communication mais, de source Secodip, nous étions le 30ème annonceur l'année dernière.

Comment jugez-vous le débat autour de l'interconnexion forfaitaire illimitée ? (lire l'enquête du JDNet)
Nous cherchons actuellement à savoir si nos clients seraient intéressés par des forfaits Internet illimités. Mais il faut relativiser le débat : la France dispose d'une offre d'accès Internet qui est l'une des moins chères du monde.

Que prévoyez-vous dans le cadre du dégroupage ?
L'ADSL est la seule vraie solution pour le développement du haut débit dans les zones métropalitaines en France. Concernant le dossier du dégroupage, nous refusons les offres de vente en gros de France Télécom par souci de maîtriser le réseau technique et pour des raisons économiques. Nous lancerons certainement nos premières offres dans le courant du premier semestre 2002.

Free intéresse des acteurs FAI. Envisagez-vous de céder le service ?
Nous avons eu effectivement des propositions dans ce sens. Soyons clairs : Free ou le groupe Iliad ne sont pas à vendre. Nous avons encore une marge de progression.

Des critiques sont émises à l'encontre du portail Free, qui abriterait une grande partie de contenu adulte sur les pages personnelles. Qu'en pensez-vous ?
Objectivement, tous les acteurs du "top dix" en terme d'audience proposent ce type de services. En ce qui concerne Free, nous assistons actuellement à une très forte réduction du contenu adulte. Chez les autres hébergeurs, je pense que le contenu adulte représente la majorité des pages personnelles. Avec Wanadoo, nous avons l'échantillon de contenus le plus large.

Le groupe Iliad dispose de services en ligne hétéroclites (immobilier, emploi, assurance, etc.). Vous n'avez pas l'impression de vous disperser ?
Il faut relativiser. Ce sont des activités de plus petite taille que Free, Free Télécom ou Annu.com. Mais nous avions un savoir-faire dans l'annuaire que nous avons décliné sur d'autres niches. Assunet.com et Emploi.com sont en train de trouver leurs marques. Immobilier.com vient, lui, tout juste d'être lancé. Ce sont des métiers sur lesquels on se réserve le droit de trouver des partenaires stratégiques si le modèle est pertinent. Comme ce fut le cas avec le courtier en ligne Finaction.com, que nous avons lancé avec Etna Finance. Nous débutons également dans le commerce électronique avec le site DVD.fr.

Quelle échéance de rentabilité avez-vous fixé pour ces services ?
Ils ont vingt-quatre mois pour atteindre le seuil de rentabilité. C'est en bonne voie.

Quelle part de votre chiffre d'affaires tirez-vous de vos activités BtoB ?
Autour de 20 à 30% de notre chiffre d'affaires doit venir du BtoB. Dans l'accès Internet, nous avons une part non négligeable de professionnels avec les TPE, les PME et les professions libérales. Et nous vendons des solutions télécoms dans l'offre Free Télécom. Nous louons également notre réseaux à d'autres opérateurs (Ndlr, comme à e-Brands pour le compte du service d'accès Internet de Vizzavi.fr).

Seriez-vous intéressé par des activités d'opérateur mobile virtuel ?
Les règles du jeu ne sont pas particulièrement connues. Nous préférons nous concentrer sur le dégroupage.

L'offre d'hébergement Online.fr marche-t-elle ?
C'est une offre stratégique pour nous, qui a été lancée en novembre 1999. Nous avons environ 25.000 domaines hébergés, avec une tarification très agressive, et qui bénéficient d'une bonne exposition en terme de bande passante.

Vous avez également monté la régie publicitaire Salanga. Que devient-elle ?
Elle a été créée à l'origine pour être la régie en charge de la gestion des espaces publicitaires des sites du groupe. Le groupe Iliad n'ayant pas de "business model" autour de la publicité, nous n'avons pas alloué beaucoup de moyens à cette régie. Mais nous nous occupons par exemple des espaces du site de jeux Milkado.com, édité par Biskott.

Quel est votre site d'information favori ?
TF1.fr. J'aime bien revoir certaines enquêtes en vidéo, car je n'ai pas le temps de regarder le journal de 20 heures.

Quel est votre service en ligne favori ?
J'aime bien faire mes courses sur Houra.fr (groupe Cora). Ca facilite grandement cette corvée inévitable.

Qu'aimez-vous sur Internet ?
La première révolution du Net, je trouve que c'est le mail. Rien que pour le mail, j'estime qu'un abonnement Internet est justifié. C'est un moyen de communication au niveau mondial pour un coût ridicule.

Que détestez-vous sur Internet ?
Le fait que ce soit trop extrême et trop médiatique. Ce n'est pas un nouvel eldorado. C'est un nouveau métier qui passe par un assainissement du marché. Mais il reste porteur compte tenu de ses liens avec le monde des télécommunications.

(1) Aujourd'hui, le service Free génère via le réseau Free Télécom (propriété du groupe Iliad) plus de 250 millions de minutes téléphoniques chaque mois. Sur la foi du système de reversement pour l'interconnexion des réseaux France Télécom-Free Télécom, le FAI récupère six centimes par minute.



La galaxie des sites du groupe Iliad
Services
Descriptifs
Annu.com
Annuaire inversée
Assunet.fr
Courtage d'assurance
Conventel.fr
Commande de conventions collectives
Dvd.fr
Site marchand
Free.fr
Fournisseur d'accès internet
Freetelecom.com
Activité de télécommunication
Immobilier.com
Immobilier en ligne
Online.net
hébergement professinnel
Salanga
Régie publicaitaire
Societe.com
Service gratuit de diffusion des informations legales et financieres sur les entreprises françaises
 
Propos recueillis par Philippe Guerrier

PARCOURS
 
Michael Boukobza, diplômé d'une maîtrise en Sciences de Gestion et de l'École Supérieure de Commerce de Paris, a débuté sa carrière dans des banques d'affaires (département fusions-acquisitions) chez Rothschild à Paris et chez Morgan Stanley à Londres. Il a ensuite collaboré avec i-Bazar dans le cadre d'opérations de levées de fonds et de fusions-acquisitions. Il a rejoint le groupe Iliad/Free au début de l'année 2000 en tant que Directeur Général Adjoint, membre du directoire.

   
 
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