JDNet.
Début 2001, vous avez quitté le groupe
Lycos France. Début 2003, vous vous retrouvé
à Hong Kong. Que s'est-il passé entre
temps ?
Fabrice Boutain. Après
mon départ du groupe Lycos, j'ai pris une année
sabbatique pour me consacrer à ma famille. Coté professionel,
j'étais à la recherche d'un projet à long terme
et d'envergure internationale. Mon frère Christophe
et moi avons alors réfléchi au développement
de services payants sur ordinateur et téléphone mobile.
Nous sommes parvenus à convaincre Philippe Monteiro
de nous rejoindre. Du coup, nous avons reformé
l'équipe de l'aventure PageFrance pour lancer
la société Anxa.com en janvier 2002.
Sur
quel modèle économique repose Anxa.com
?
Nos services sont vendus à l'unité
ou en package. Le prix de base est à trois euros
le test, pour mieux se connaître ou pour entamer la
méthode d'apprentissage. Ensuite, pour sept euros, l'internaute
dispose d'une analyse personnalisée de vingt pages.
A dix euros, nous commercialisons un package "tests
+ analyses + méthodes". Le modèle économique repose
sur un partage de revenus entre l'opérateur et Anxa.
Anxa fournit à des portails comme Wanadoo, Club-internet,
MSN ou Yahoo des plates-formes ASP personnalisées qui
présentent nos outils. Nous avons signé la majeure
partie de nos partenariats fin 2002. Aux Etats-Unis,
nous sommes partenaires de Zingy, la société éditrices
de services mobiles créée par Fabrice
Grinda, le fondateur du site de vente aux enchères
Aucland. Comme on se retrouve...
Quel levier de financement
avez-vous utilisé pour débuter vos activités
?
Nous avons financé le lancement de la
structure en fonds propres, comme nous l'avions fait
pour PageFrance il y a sept ans. Nous avons réinvesti
immédiatement une partie de ce que la vente de PageFrance
à Spray nous avait rapporté. La création
d'Anxa Europe et Anxa Asia a nécessité
un investissement proche d'un million d'euros.
Vous avez toujours des parts
dans Lycos Europe ?
Nous avons des stock options. Fort heureusement,
nous avions négocié la vente de PageFrance avec une
grosse partie en espèces. Donc de ce côté-là, nous n'avons
pas à nous plaindre.
Quels sont vos premiers résultats
avec Anxa.com ?
Au 15 janvier 2003, plus de 200 000
clients ont payé pour un service Anxa. Parmi eux, nous
avons enregistré 10 000 clients en provenance des
Etats-Unis et de Chine. Le point d'équilibre devrait
être atteint cette année. Fin 2003, notre objectif est
de dépasser le million de clients payants. Il est prévu
à cette échéance de lancer notre première
offre d'abonnement pour accèder à l'ensemble des services :
tests, méthodes pour progresser, analyses personnalisées
et diplômes.
En
terme d'organisation, vous avez des relais à Hong Kong,
Londres et Miami. Comment vous répartissez-vous le travail
?
Il est vrai que lorsque nous avons lancé
Anxa, nous avons adopté dès le départ
une vision internationale. Comme à l'époque
de PageFrance, les trois fondateurs ont décié
de s'expatrier : mon frère et moi sommes installés
à Hong Kong et Philippe Monteiro à Miami, aux Etats-Unis.
Christophe a choisi d'implanter notre bureau régional
"Asie" à Alabang, près de Manille aux Philippines. C'est
le nouveau centre de l'Internet et des télécoms
en Asie, et les développeurs y sont excellents ! Nous
avons une douzaine d'employés, généralement
trilingues. Nous nous investissons tous les trois à
100 % sur cette activité.
Quels marchés visez-vous
plus particulièrement ?
Nous développons actuellement notre plate-forme
de services en trois langues : anglais, francais et
chinois. C'est un marché de 250 millions d'internautes.
Ce qui nous permettra de toucher potientellement 40%
du marché Internet mondial, soit 100 millions de personnes.
Notre objectif est de convertir % de cette audience
vers nos services. Dans une deuxième étape, nous approcherons
les marchés hispaniques, japonais, coréens et allemands.
Mais priorité est donnée à l'Asie.
Que pensez-vous du développement
des services payants Internet en France ?
Fin 2002, nous recensions une bonne dizaine
de sociétés et d'éditeurs sur ce créneau
en France. D'ici la fin de l'année, nous espérons
être plus d'une centaine d'acteurs. La France est aujourd'hui
en avance par rapport aux autres pays européens grâce
notamment aux FAI qui ont développé de vraies stratégies
sur les services payants
Quelles sont les nouvelles
"killer applications" que vous voyez apparaître
à Hong Kong ?
Je crois qu'il y a une logique client-produit-prix
très forte ici. Les services sont de qualité, les prix
accessibles, et tout est lié entre PC et mobile. Les
opérateurs mobiles ont une base de clients importante
et ils ont ouvert leur système de facturation via SMS,
PC, mobiles aux opérateurs Internet. Leur logique financière
va dans le sens de l'utilisateur : dix millions de clients
qui paient un euro par mois, ça fait dix millions d'euros
à la fin du mois. C'est mieux que 1 000 clients
qui paient 30 euros... L'opérateur
japonais NTT DoCoMo l'a démontré depuis longtemps via
l'i-mode et les Coréens sont les leaders incontestés
du jeu en réseau payant.
A votre avis, l'Eldorado NTIC
se trouve en Chine ?
Déjà en 2002, les plus
grosses progressions du Nasdaq étaient chinoises. Dans
le top 5 des valeurs chinoises, on trouve Netease et
Sohu, deux opérateurs Internet leaders. Netease a été
la plus grosse progression avec une évolution de son
cours d'action de plus de 1 500 %. En Asie,
tous les services sont payants et l'intégration
des services Internet-mobiles-SMS est déjà
optimisée. Il est par exemple impossible pour
un internaute de devenir membre de Netease ou de Sohu
si vous ne possédez pas de numéro de téléphone mobile.
En 2002, la Chine est devenue le plus gros marché mobile
au monde avec 200 millions d'abonnés. China Mobile est
numéro un mondial avec 140 millions d'abonnés. Et Yahoo,
AOL, MSN et les autres leaders américains sont toujours
inexistants en Chine, ou peu s'en faut ! Le marché
chinois est très difficile, nous en sommes conscients.
Mais notre expérience sur le terrain nous donne
aussi accès à certains réseaux pour gagner du temps.
Quelles
sont les spécificités du marché Internet
chinois ?
La Chine est le plus gros marché au monde mais c'est
aussi le plus difficile. Les Chinois contrôlent leur
marché. C'est pour cela que les sociétés américaines
et européennes rencontrent de nombreuses difficultés.
La clef de la réussite se fait donc dans le choix de
son partenaire chinois. C'est un vrai "métier" que d'identifier
le partenaire idéal. A Shanghaï et à Pékin, il
existe des sociétés européennes qui se sont spécialisées
pour jouer le rôle de "boosters". Je crois beaucoup
à ce modèle de collaboration dans les prochaines
années, notamment dans le domaine des NTIC.
Quel
est votre site préféré en ce moment
?
Zhongwen.com. C'est une mine d'informations
sur la culture chinoise. Il y a six ans maintenant,
j'ai appris à parler le mandarin chinois. Aujourd'hui,
je reprends des cours pour lire et écrire le chinois.
Il existe plus de 10 000 caractères et il faut
plus de 20 ans pour apprendre à lire le chinois. C'est
d'une extrême complexité mais c'est fabuleux car
chaque caractère chinois a sa propre signification.
Un jour, c'est sûr, mes enfants le parleront couramment
car le chinois est la deuxième langue la plus parlée
dans le monde après l'anglais.
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