INTERVIEW
 
Directeur
Marketing Evolution
Rex Briggs
"Internet est le média qui permet le meilleur retour sur investissement"
(Article modifié le 12/03/03 à 11h) Rex Briggs, considéré comme l'un des grands analystes américains dans le domaine de la publicité en ligne, est l'auteur de plusieurs études démontrant l'impact d'Internet dans les campagnes plurimédia. Il a notamment réalisé des études pour le compte de marques et de sites supports avec la caution notamment de l'Interactive Advertising Bureau (IAB) américain. A ce niveau, MSN s'est tout particulièrement impliqué, tant au stade du financement des études que sur la présentation des résultats, puisque le portail est le seul en Europe à communiquer autour des conclusions de ces études. Rex Briggs poursuit aujourd'hui encore ses recherches dans ce domaine en s'efforçant de tester l'efficacité d'Internet sur différents types de marques et de produits. Dans une interview exclusive au JDN, il revient sur les résultats de ses études et tire les les leçons de sa longue expérience de la publicité en ligne. 10 mars 2003
 
          
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JDN. Quelles sont les principales conclusions de vos études sur l'impact d'Internet dans une campagne plurimédia ?
Rex Briggs. C'est très simple : lorsqu'Internet est présent dans un plan plurimédia, nous constatons systématiquement une amélioration de l'impact de la campagne publicitaire auprès du public, tant en terme d'image de marque que d'intention d'achat. Ce qu'il faut tout d'abord souligner, c'est que ces études sont réalisées avec le concours de l'IAB et en collaboration avec l'Advertising Research Foundation, partenaire d'ESOMAR [Association européenne pour les études d'opinion et de marketing, ndlr]. C'est une garantie d'objectivité et de neutralité. Lors de nos études, nous avons volontairement testé l'impact d'Internet auprès de plusieurs types de produits pour vérifier l'intérêt d'Internet dans tous les domaines. Nous avons ainsi testé le secteur "hygiène" avec Dove et Colgate, ou l'alimentaire avec McDonald's.

Pouvez-vous nous donner un exemple concret de l'efficacité d'Internet  ?

Nous avons dernièrement analysé une campagne de huit semaines pour un produit de la marque Kleenex (groupe Kimberly-Clark). Selon les résultats de l'étude, la seule campagne TV ne touchait pas du tout 25 % de la population cible et insuffisamment 40 % du public visé. Il fallait donc ajouter un autre support pour avoir une couverture optimale des consommateurs potentiels. A cette occasion, nous avons testé plusieurs mix possibles : TV et presse, TV et Internet, etc. Nous avons aussi testé TV + presse + Internet. Nos conclusions sont qu'un mix TV et presse donne exactement les mêmes résultats qu'un mix TV et Internet, à la différence prêt que, à résultat égal, Internet est moins onéreux. Mais il y a mieux : un mix TV + presse + Internet s'avère être la meilleure configuration possible. Nous ne conseillons donc pas aux responsables du mediaplanning d'abandonner un support pour le remplacer par Internet mais d'ajouter le Web dans leur plan média. Le tout est de savoir ventiler le budget de la manière la plus efficace possible.

Si on ne devait retenir que deux types de support pour une campagne, quel serait le mix le plus efficace ?
Cela dépend des produits. Selon moi, pour des produits de grande consommation, le duo télévision et Internet est le meilleur. Pour des produits high-tech et complexes, comme des ordinateurs ou des serveurs par exemple, il vaut mieux opter pour un mix Internet et magazine. Ces produits ont besoin d'être accompagnés d'informations détaillées, ce que seuls le Web et la presse écrite permettent.

Le retour sur investissement est-il vraiment meilleur sur Internet ?
En publicité, pour réaliser un bon plan de communication, il faut savoir identifier le seuil de saturation pour chaque média, c'est-à-dire le niveau au-delà duquel la campagne devient moins efficace et où le budget explose pour un retour sur investissement médiocre. Une fois ce seuil identifié, il faut reporter le budget restant du média saturé vers un autre. Par exemple, pour un taux de saturation en TV identifié à 80 %, il faut reporter les 20 % de budget restant sur d'autres supports. Pour une efficacité optimale, il faudrait donc commencer à établir le plan de communication en débutant par le média ayant le meilleur ROI [NDLR : Return on investment] et ajouter peu à peu les autres médias afin d'obtenir un mix media où chaque média est utilisé au mieux de son potentiel. Selon nos dernière études, Internet doit être, selon ce principe, le premier média intégré dans un plan de communication puisqu'il obtient le meilleur ROI. Les résultats de notre étude sur une campagne pour le dentifrice Colgate nous ont prouvé cela.  Pour un budget de 100 investi sur Internet pour augmenter l'intention d'achat de + 1 point, il faut un budget de 123 en télévision et de 184 en presse pour obtenir le même résultat. En terme d'image de marque, le ROI est encore meilleur. Toujours pour un budget de 100 en ligne, il faut investir 184 en presse et 297 en télévision pour avoir un résultat identique.

Selon vous, quel devrait-être le budget Internet moyen d'un plan de communication ?
C'est bien-sûr variable selon les types de produit mais, aux Etats-Unis, nous estimons qu'Internet devrait peser entre 10 et 15 % des investissements publicitaires des grandes marques. En France, ce niveau est situé plus bas car la pénétration du Web est moindre. Cela devrait, je pense, se situer entre 4 et 7 %.

En terme d'efficacité publicitaire, quelles sont les méthodes de communication en ligne qui vous semblent les plus performantes ?
Nous avons constaté qu'une publicité en ligne avait d'autant plus d'impact qu'elle était adaptée d'une campagne TV ou presse. Après avoir étudié de nombreux cas de campagnes, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il valait mieux, sur Internet, reprendre le même visuel ou le même design que la publicité offline. Si une marque décide d'avoir deux messages, un offline et un autre online, le public sera perdu et la campagne sera moins percutante. En revanche, s'il y a homogénéité du discours, l'individu aura été exposé à une même campagne sur plusieurs supports. Elle n'en aura que plus d'impact. Cependant, cela ne signifie pas qu'il faille se contenter de créer une bannière statique avec le visuel utilisé en presse ou de diffuser en ligne le spot TV sans valeur ajoutée. Il faut savoir utiliser les ressources du Web (skyscrapper animé, flash transparent, etc.) tout en gardant la filiation avec le message publicitaire déjà diffusé offline.

Outre les bannières, d'autres types de communication sont-ils efficaces ?
Notre expérience de la publicité en ligne nous amène à conseiller aux grandes marques traditionnelles de multiplier, en plus de la publicité classique, le sponsoring sur des sites. Cela peut passer par l'organisation de jeux-concours ou encore du conseil intégré à des sites de contenu (pour un constructeur automobile, des fiches pratiques/conseils dans l'espace automobile d'un portail, par exemple). L'objectif est de donner de la valeur ajoutée, ludique ou pratique, à l'internaute pour qu'il se souvienne positivement de la marque.

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Quelles sont les marques qui, selon vous, utilisent le mieux Internet dans leur plan de communication ?
Je citerais Philips Electronics, qui est un des meilleurs exemples de l'utilisation d'Internet aux Etats-Unis. Cette marque consacre plus de 10 % de son budget communication au Web, tout comme Oreo Cookies (Kraft Foods). McDonald's fait aussi partie de ceux qui utilisent Internet efficacement. Dernièrement, McDonald's a été amené à faire des coupes budgétaires et avait le choix entre communiquer à la télévision ou online. C'est Internet qui a été conservé, car plus efficace. De même, Volkswagen a coupé son budget "presse écrite" mais conservé la communication en ligne. Cendant (qui détient les marques Avis, Budget, Century 21, etc.) dépense environ 20 % de son budget communication sur Internet et fait partie des sociétés qui pratiquent de la manière la plus efficace le mix média. Ils savent avec précision quel ROI attendre de chaque média. Le point commun de toutes ces marques n'est pas d'avoir cherché absolument à investir en ligne mais d'avoir mis à plat tous les médias à leur disposition et d'avoir évalué pour chacun son ROI et son impact. A partir de là, la conclusion naturelle est l'intégration d'Internet dans le plan média.

A contrario, pouvez-vous nous citer des contre-exemples ?
Nestlé est pour moi un des exemples à ne pas suivre. Au début de leur présence en ligne, ils ont investi énormément dans leur site dédié à la petite enfance (verybestbaby.com) mais ils avaient oublié de conserver un budget pour la communication. Résultat : un très beau site mais pas de visiteurs... Procter & Gamble a fait lui aussi quelques erreurs au début. En 1996, ils ne résonnaient qu'en terme de taux de clics sur les bannières puis, en 1998, ils ont utilisé le format pop-up avec excès. Cela revenait presque à du spam tellement ils en abusaient ! Aujourd'hui, ces marques ont tiré les leçons de leurs erreurs et communiquent avec plus de finesse.

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Peut-on établir un parallèle entre vos études et celles réalisées en France (études Net Impact 1 et 2 réalisées par l'IAB et Ipsos) et Europe (par l'EIAA) ?
En effet, l'objectif est le même : prouver l'efficacité du média Internet. Malgré une méthodologie différente selon les expériences, les résultats sont assez proches. Les principales différentes sont dues, je crois, au niveau de pénétration d'Internet qui est moins élevé en Europe. Cela induit donc des différences dans le profil des internautes. Aux Etats-Unis, la population connectée est plus représentative de la population totale tandis qu'en France, il y a encore un profil très marqué (urbain, CSP+, etc.), par exemple. Mais, d'une manière globale, nous observons plus de similarités entre les études que de différences.

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Qu'est-ce qui vous horripile le plus dans la publicité en ligne ?
C'est ce que nous appelons le "trick through", par analogie au "click trough" [ndlr, taux de transformation]. Ce sont toutes ces publicités qui poussent les internautes à cliquer involontairement sur une bannière. Elles ressemblent par exemple aux messages d'erreurs affichés par les logiciels Microsoft. Cela peut aussi être de faux boutons situés en haut à droite d'un pop-up et qui imitent le bouton de fermeture d'une fenêtre. Le but est de faire cliquer à tout prix, même si l'internaute n'est pas intéressé. Toutes ces méthodes sournoises sont non seulement inefficaces mais provoquent en plus l'hostilité des internautes envers la publicité en ligne dans son ensemble.

 
Propos recueillis par Florence Santrot

PARCOURS
 

Rex Briggs, expert en marketing, a développé une méthodologie dans la mesure de l'efficacité et de l'impact d'Internet. En 1993, alors employé par le cabinet de consulting en marketing, Yankelovich Partners, il a réalisé la toute première étude sur les utilisateurs en ligne. En janvier 1994, "Cybercitizen" a été la première enquête sur le profil de l'internaute consommateur. En 1995, Rex Briggs est devenu directeur de la recherche pour HotWired, où il a mis au point l'analyse en temps réel de mesure d'activité d'un site Web. En 1997, il a amélioré son outil de mesure afin de pouvoir évaluer si un site répondait aux attentes de ses utilisateurs. Nommé ensuite vice-président exécutif de la société d'études Millward Brown, Rex Briggs s'est attaché à définir la méthodologie permettant de mesurer les effets de l'e-pub, du sponsoring et des sites "produits" sur une marque. Aujourd'hui, Rex Briggs, a fondé et dirige le cabinet d'études Marketing Evolution. Il poursuit ses recherches sur la mesure de l'efficacité de la publicité en ligne ainsi que sur le retour sur investissement.

ESOMAR (European Society of Marketing and Opinion Research) a demandé à Rex Briggs de conduire différentes réflexions sur les méthodes à adopter afin de mesurer l'efficacité des sites Web. Sa méthodologie a été récompensée dernièrement par le prix John and Mary Goodyear pour la meilleure étude internationale. Ces études ont été réalisées en collaboration avec Dynamic Logic et Forrester Research.


   
 
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