INTERVIEW
 
PDG
Nerim
Christophe Carel
"La concentration est très importante dans notre métier"
Depuis trois ans, Nerim fait son nid dans le monde de l'accès Internet haut débit et accélère son développement dès que les occasions se présentent. Ce fut le cas en mi-2001, avec le rachat de Mangoosta, en redressement judiciaire, et plus récemment avec InterneXt. La société monte également des partenariats pour peaufiner son offre de services Internet et vient de signer un accord avec Amen.fr (enregistrement de noms de domaine et hébergement). Le prestataire de services Internet reste à l'affût de toutes opportunités se présentant, dans la lignée d'opérateurs alternatifs comme Free ou LDCom. 24 janvier 2003
 
          
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JDNet. Quel est votre positionnement sur le marché des FAI ?
Christophe Carel.
Nous voulons être le spécialiste des technologies xDSL. Notre vivier de clients est professionnel, des PME ou des TPE. Nous avons également une petite partie de notre clientèle que nous appelons des "power users", ceux que que nous avons récupérés mi-2001 avec le rachat de Mangoosta : ce sont des particuliers qui connaissent bien l'informatique, donc très exigeants dans le domaine des services Internet, à la limite d'une clientèle professionnelle. Nous ne voulons pas concurrencer de grands acteurs comme Wanadoo, Tiscali ou Club-Internet dans le domaine de l'accès Internet grand public, car cela demanderait des efforts trop importants en terme de marketing.

Fin 2002, vous avez repris des actifs d'Internext, un prestataire de services InterneXt en redressement judicaire. Quelles synergies en escomptez-vous?
Dans le domaine de l'accès Internet, InterneXt s'était positionné comme un ISP de proximité. Il avait construit un backbone national tout en attaquant des clients de manière locale. Tandis que Nerim disposait seulement d'un backbone parisien et ne disposait pas de POP (point de présences) en province. Le rachat d'InterneXt entre dans une logique de complémentarité. Nous avons récupéré 250 clients qui vont de la PME à des grands comptes. De plus, le catalogue de produits Internet d'InterneXt était plus complet que le nôtre.

Internext faisait aussi de l'hébergement...
C'est également une activité auxiliaire de Nerim. Nous fournissons du transit à des hébergeurs qui souhaitent installer des serveurs sur notre propre réseau. L'hébergement est un mal nécessaire pour les FAI pour des raisons d'infrastructures : la plupart des clients d'un FAI font du téléchargement en attirant du trafic descendant. Lorsqu'un FAI achète de la capacité chez un opérateur de transit, il acquiert du transit en ascendant et descendant mais les volumes de trafic ne sont pas les mêmes dans les deux sens. L'hébergement permet de combler cette lacune. C'est une activité très rentable puisque nos abonnés exploitent un réseau d'infrastructure déjà installé. Lorsque le groupe Iliad/Free a créé la société Online dédiée à l'hébergement avec des tarifs très agressifs, il a suivi la même logique. Aujourd'hui, nous avons 1 Giga de capacité de trafic et nous en utilisons 400 MGo. Nous avons investi 1 million d'euros depuis la création de Nerim pour monter notre réseau. Mais les plus grandes dépenses sont survenues en 2002.

Jusqu'où pourriez-vous pousser votre politique de croissance externe à bas prix ?
Aussi loin que LDCom [sourire]. La concentration est très importante dans notre métier car elle permet de mutualiser les coûts très lourds d'infrastructures et d'améliorer la marge très rapidement. C'est ce qui s'est passé avec les rachats d'InterneXt et de Mangoosta. Je dirais que ce phénomène est également un mal nécessaire.

Vous parvenez à dégager des marges convenables avec l'ADSL ?
Elles sont très faibles sur l'abonnement ADSL de base, à 512 Ko. En marge brut, on parle de 15%. En marge nette, cela tourne autour de 5%. Avec des offres en dessous de 30 euros, c'est mission impossible pour rentabiliser. En 2002, Nerim a réalisé un chiffre d'affaires de 4 millions d'euros. Nous avons atteint l'équilibre d'exploitation en novembre dernier.

Pariez-vous sur une prochaine baisse du prix de gros de l'ADSL ?
Je ne pense pas que France Telecom soit en mesure d'appliquer de nouvelles baisses. L'Autorité de Régulation des Télécommunications verrait cette initiative d'un mauvais oeil car elle souhaite prioritairement favoriser le dégroupage, afin d'équilibrer la concurrence au niveau des opérateurs. Si France Telecom obtient une baisse des prix de gros ADSL, quel serait l'intérêt d'aller voir les opérateurs alternatifs ?

A côté de l'ADSL, quelles autres pistes xDSL explorez-vous ?
L'ADSL était jusqu'ici la seule technologie proposée. Nous travaillons sur des offres SDSL avec LDCom afin d'assurer un débit symétrique à nos clients. Elles se concrétiseront si l'opérateur parvient à les exploiter dans de bonnes conditions. Mais nous rencontrons des soucis avec un contrat ADSL dégroupé que nous avons signé en octobre dernier avec LDCom. Nous voulons que nos clients bénéficient de prix plus compétitifs et qu'ils disposent d'une meilleure qualité dans les temps de latence (mesure du temps de réponse d'un serveur connecté à Internet). Nous voulions migrer l'essentiel de nos clients sur le réseau LDCom entre novembre et décembre. Nous avons effectué des tests sur quelques lignes et nous avons observé des coupures de plusieurs semaines voire un mois. Ce qui est anormal.

Cherchez-vous à obtenir une licence d'opérateur auprès de l'ART ?
Non. Pas dans l'immédiat. Nerim se positionne comme un FAI, nous ne cherchons pas à développer une infrastructure d'opérateur. Mangoosta a essayé et on voit comment s'est terminé le projet. Il existe encore des FAI qui n'ont pas fait le pas : c'est le cas de Club-Internet malgré sa dimension importante. Cela ne nous pénalise nullement dans notre développement.

Comment analysez-vous le marché de la fourniture d'accès Internet ? En terme de concentration ou de segmentation ?
La concentration va continuer tant que la crise perdure. Il n'y a plus beaucoup d'acteurs en France. Et je ne parle pas des FAI locaux. Autour de moi, je vois des prestataires comme Magic Online ou EasyNet. Mais ils sont peu nombreux à tenir le coup.

Nerim a reçu des propositions de rachat ?
J'ai déjà eu quelques discussions à ce sujet mais je ne peux pas vous dire avec qui.

Vous souhaitez faire appel à des investisseurs externes pour le financement de vos activités ?
Si cela avait été le cas, vous n'auriez pas entendu parler de Nerim.

Vous avez suivi les péripéties de Free avec Wanadoo autour du peering la semaine dernière ? (Lire l'article de JDNet Solutions du 24/01/03)
Oui. Le dénouement m'a beaucoup amusé. Jusqu'ici, Free avait des relations très particulières avec France Telecom concernant le peering. France Telecom prend parfois des positions très contractuelles et très bornées et Free, des positions en général très bornées. Dès qu'il s'agit de changer les relations, ça fait du bruit.

Et chez Nerim, quelles relations avez-vous avec France Telecom ?
J'essaie d'entretenir de bonnes relations. Mais, vu l'état du marché, les conditions contractuelles se durcissent et je ne suis pas en position de force pour négocier.

 
Propos recueillis par Philippe Guerrier

PARCOURS
 
Christophe Carel, 27 ans, est ingénieur en technologies multimédias, diplômé de l'Institut Multimédia et Architecture de la Communication Université de Paris II - Assas. Entre 1998 et 1999, il a été responsable technique spécialisé dans l'administration réseau et système au sein d'une SSII (BEA Conseil). En 1999, il a co-fondé Nerim avec Raphaël Bouaziz. D'abord positionnée comme une SSII, Nerim est ensuite devenue fournisseur d'accès Internet xDSL.

   
 
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