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Directeur
général
Innovacom |
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Denis
Champenois
"Titre"
Gemplus,
Business Objects, Picogiga... : toutes ces sociétés
mondialement connues ont un point commun : Innovacom.
Ce
fonds de capital-risque, a participé à
quelques grandes aventures de la technologie française
depuis sa création en 1998. Il a ainsi financé
au total près de 350 sociétés avec
ses différents fonds (Innovacom I, II, III et
Technocom). Dans l'Internet, le fonds a notamment participé
au lancement d'Aufeminin, Netvalue, Kelkoo, Maximiles,
Imediation, Sport24, Alapage, revendu à France
Telecom l'an dernier et dernièrement Witbe. En
octobre 2000, la structure de gestion a bouclé
un quatrième fonds, Innovacom IV, doté
de 200 millions d'euros auprès notamment de France
Télécom (15%), d'Axa ou de GIC. Denis
Champenois, son directeur général, tire
le bilan d'une année 2001 d'investissement difficile
et envisage une année terne pour le capital-risque
l'an prochain.
23
novembre 2001 |
JDNet. Que est le bilan de l'année 2001 pour
Innovacom?
Denis Champenois.
Nous avons réalisé
quatorze nouveaux investissements depuis le 1er janvier,
contre 39 l'an dernier. Comme nous avions fait beaucoup
d'investissements en 2000, nous nous concentrons avant
tout sur le refinancement de notre portefeuille. Notre
volume d'investissements en 2001 est d'ailleurs presque
équivalent à l'an dernier et atteint 60
millions d'euros à ce jour. Nous avons également
réalisé 45 millions d'euros de cessions
et 33 millions d'euros de plus-values tous fonds confondus.
Par ailleurs, Innovacom 3 et Technocom ont fini d'être
investis cette année.
France
Telecom a souscrit à hauteur seulement de 15 %
de votre dernier fonds. Pourquoi parle-t-on d'Innovacom
comme du fonds de l'opérateur historique ?
Tout
d'abord, si effectivement le montant apporté
au fonds n'est que de 15 %, la structure de gestion
Innovacom est une filiale à 100 % de France
Telecom. Au niveau industriel, les liens sont également
forts. Nous sommes un vrai partenaire du business développement
de l'opérateur. Notre but est que nos participations
décrochent dans les vingt-quatre mois qui suivent
leur financement un contrat commercial ou une expérimentation
technique avec France Telecom. Nous avons aussi des
accords privilégiés avec les laboratoires
de France Telecom comme le CNET. Nous avons ainsi un
droit de premier regard sur le financement des sociétés
issues de ces structures. Mais si France
Telecom peut être un partenaire technique ou commercial,
il n'a pas forcément vocation à acquérir
les start-up ensuite.
Vous vous présentez comme un fonds spécialisé
dans la technologie. En investissant dans Sport24, Aufeminin,
Alapage ou Chateau Online, n'êtes-vous pas sorti
de votre rôle ?
Non, nous ne le pensons
pas. Plus qu'un fonds technologique, nous sommes à
la recherche d'innovations, qu'elles se situent en aval
ou en amont de l'industrie. Cela peut donc être
une technologie comme un service. Avec le démarrage
de l'Internet grand public, la demande en contenu innovant
était importante, notamment pour des grands acteurs
comme France Telecom/Wanadoo par exemple. Il était
donc logique de financer des sociétés
qui permettaient d'améliorer le renforcement
de l'Internet grand public. Dans notre esprit, ce mouvement
n'est d'ailleurs pas terminé. Nous sommes toujours
à l'affût de services en ligne. Seulement,
cela ne s'appelle plus "dotcom" et se présente
sous des formes un peu plus complexes. Au début
de l'année, nous avons par exemple investi dans
Cityneo, un city-guide pour les mobiles. Mais globalement,
si nous faisons moins d'investissements dans ce domaine,
c'est aussi et surtout parce qu'il y a beaucoup moins
de nouveautés.
Pourquoi
les investisseurs sont-ils si frileux à l'heure
actuelle alors qu'ils disent unanimement que c'est le
bon moment si on mise sur le long terme ?
Pour notre part,
nous continuons à financer des sociétés
qui atteindront leur maturité d'ici deux ou trois
ans et sommes restés assez actifs dans ce domaine.
Nous n'avons pas de blocage mais comme je vous l'ai
dit, nous avons une phase de refinancement importante.
Je pense par ailleurs que, sur les premiers tours de
table, il n'y a pas trop de problèmes actuellement.
Le délai moyen de bouclage d'un tour de table
est de quatre mois, ce qui n'a guère changé
par rapport à l'an dernier. En revanche, les
sociétés qui souffrent sont celles qui
ont déjà levé des fonds lors des
deux années précédentes. A ce niveau,
le délai entre la demande de fonds et l'acceptation
du refinancement est passé à plus de six
mois dans beaucoup de cas. Elles sont dans une situation
très complexe. Car étant plus matures,
elles sont déjà dans une phase commerciale
mais ont en face d'elles des clients qui, en prévision
de la récession, ne cessent de réduire
leurs dépenses. Comme elles sont très
instables financièrement, les investisseurs hésitent
donc à les refinancer. C'est un peu un cercle
vicieux. Si les valorisations sont effectivement plus
faibles, les projets mieux présentés,
les entrepreneurs plus qualifiés, lors d'un financement,
on ne peut pas faire non plus l'impasse sur la situation
économique actuelle, qui est loin d'être
exceptionnelle.
Est-ce
que justement vous obligez vos start-up à être
rentables rapidement au détriment de la croissance
?
Il est évident que
dans l'optique d'une sortie en Bourse ou d'une cession,
nous avons intérêt à présenter
rapidement des comptes équilibrés dans
le contexte actuel. Néanmoins, il faut distinguer
deux catégories de start-up, les pures technologiques
et les autres. On ne peut en effet pas demander à
une société dont le marché se développera
en 2004 d'être rentable d'ici deux ans. Si nous
avions demandé aux dirigeants de Soitec (technologie
pour semi-conducteurs) d'être rentables sous deux
ans pour les financer, ils n'auraient sans doute jamais
créé leur société car le
pari était impossible à tenir. En revanche,
si je prend le cas de Witbe, notre dernier investissement
(Lire l'article
du JDNet du 21/11/01), il est évident que
dans leur métier de services, nous n'aurions
pas accepté qu'ils ne soient pas rentables rapidement.
Outre
ces problèmes de rentabilité, les conditions
d'entrée des investisseurs dans le capital se
sont durcies avec des clauses excessivement contraignantes.
Cele ne risque-t-il pas de démotiver les entrepreneurs
?
Pour notre part,
cela n'a jamais été notre philosophie.
Nous n'avons par exemple jamais voulu être majoritaires
dans le capital d'une société. Quand un
entrepreneur se retrouve avec 5 % de sa société
dès le départ, il est évident que
ce n'est guère motivant et que cela peut poser
des problèmes. Mais je reconnais que certains
investisseurs ont la main lourde. Généralement,
vous constaterez qu'ils ne viennent pas du capital-risque,
mais souvent de secteurs comme le LBO ou le capital-retournement,
où ces méthodes sont plus courantes. En
revanche, au niveau des valorisations, on ne peut pas
dire que les investisseurs en profitent au détriment
des entrepreneurs. Actuellement, on est au niveau de
valorisation de 1995. Mais c'est peut être le
juste prix dans la mesure où nous n'avons pas
beaucoup d'éléments de référence.
Est-ce
que dans le contexte actuel vous devez mettre plus d'argent
dès le départ pour permettre à
la société de travailler plus sereinement
?
Le ticket moyen
n'est pas vraiment en augmentation. En revanche, on
constate que les dépenses des start-up ont été
quasiment divisées par deux entre 2000 et 2001.
Nous n'avons donc pas d'efforts supplémentaires
à fournir dans la mesure où, avec le même
montant d'investissement que l'an dernier, vous permettez
à la société de tenir deux fois
plus longtemps.
La totalité
de notre fonds sera d'ailleurs investie, comme prévu
initialement, en 2003.
Restez-vous, malgré tout, optimiste pour l'année
2002 ?
Pas pour les investisseurs
en tout cas. Les cessions vont être moins nombreuses
et ceux qui sont rentrés à des valorisations
élevés en 1999 et 2000 vont donc présenter
des bilans en demi-teinte. Cela risque d'être
une année blanche en attendant 2003, qui devrait
permettre de repartir de l'avant. En revanche, je suis
plus optimiste pour les start-up. Beaucoup affichent
des croissances à deux chiffres tout en ayant
réduit nettement leurs dépenses. C'est
très positif.
Qu'est-ce
que vous aimez sur Internet ?
Par déformation
professionnelle, les sites boursiers comme celui de
Boursorama.
Et
ce que vous n'aimez pas sur Internet ?
Les sites peu pratiques
à utiliser.
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