|
|
Directeur
du Business développement international
NetCentrex |
|
Bertrand
Chauvet
""
09
octobre 2003 |
|
|
|
JDN.
Pouvez-vous nous présenter la société
NetCentrex ?
Bertrand Chauvet.
NetCentrex est un projet qui a commencé en 1996
dans les laboratoires de France Télécom.
Olivier Hersent, le fondateur et président de NetCentrex,
était à l'époque responsable de la
recherche voix sur IP chez France Télécom.
En 1998, il a décidé de faire un essaimage
pour créer NetCentrex. France Télécom
ainsi que d'autres opérateurs de télécoms
(comme Deutsche Telekom) et différents investisseurs
(Intel, Natexis Banques Populaires, Viventures, etc.)
ont suivi le projet en investissant dedans. Aujourd'hui,
aucun investisseur ne détient plus d'une dizaine
de pourcents du capital et les fondateurs sont encore
très présents dans l'actionnariat. Au total,
NetCentrex a levé 35 millions d'euros pour son
développement.
Quel
est le positionnement de NetCentrex ?
Nous faisons strictement du software. Notre
offre adresse deux segments du marché : les
entreprises et les particuliers. Pour les professionnels,
nous leur proposons des solutions de centres de contacts
dans le réseau. Cela a été rendu
possible par l'acquisition en 2002 de MG2 Technologies,
un acteur très important du monde des technologies
vocales en France et en Europe, qui fournissait ses solutions
pour les très grands serveurs vocaux (Société
Générale, Crédit Lyonnais, Bouygues,
SFR, Cegetel, etc.). Nous avons complété
ces offres services vocaux avec de la téléphonie
sur IP et des centres d'appels virtuels. Nos clients sont
France Télécom, la Société
Générale, Unedic, Assedic, 3 Suisses, La
Redoute, etc. Par ailleurs, nous proposons aussi des solutions
pour la téléphonie voix sur IP pour entreprise,
c'est-à-dire les VPN
VoIP et l'IP Centrex (c'est-à-dire le remplacement
des PABX - ou centraux téléphoniques - d'entreprise par
une fonction équivalente dans le coeur de réseau
de l'opérateur entièrement en téléphonie
sur IP).
Et votre
offre pour les particuliers ?
Dans le segment résidentiel, nous
travaillons à déployer des stratégies
triple play, c'est-à-dire de permettre à
des opérateurs sur des réseaux haut-débit
et très haut-débit de déployer des
infrastructures de services qui adressent à la
fois la voix, la vidéo et l'accès Internet.
FastWeb en Italie est le meilleur exemple d'offre triple
play au monde aujourd'hui. En taille et en succès,
c'est le plus gros opérateur de ce type au monde
avec plus de 300 000 abonnés. NetCentrex a
monté toute la plate-forme de téléphonie
de FastWeb, qui peut gérer à la fois de
la voix sur IP et de la vidéocommunication. C'est
un exemple qui a tendance à se reproduire aujourd'hui
en tirant partie d'une tendance de fond du marché
qui est le déploiement de nouveaux réseaux
à très haut-débit, notamment grâce
aux collectivités locales.
Où
se positionne NetCentrex dans la chaîne de valeurs
VoIP ?
La chaîne de valeur VoIP comprend
plusieurs domaines. Celui de l'usager, c'est là
où on retrouve les fournisseurs de téléphones
IP, de gateways (terminaux) et de PABX-IP (centraux téléphoniques
IP). NetCentrex n'est absolument pas positionné
là-dessus et ne le sera jamais. Nous, nous intervenons
dans le domaine opérateurs, dans le coeur du réseau.
Nous pilotons tous ces équipements cités
plus haut. Notre métier est de faire du contrôle
d'appel sur ces terminaux. Nous garantissons aussi l'ensemble
du fonctionnel dans l'opérateur, qui permet d'assurer
un service de téléphonie de première
ligne.
Qu'entendez-vous
par téléphonie de première ligne ?
Quand on remplace un réseau classique de téléphonie
par de la téléphonie sur IP, comme c'est
le cas par exemple pour FastWeb, qui remplace Telecom
Italia, même dans la boucle locale, vous avez des
obligations légales à remplir comme les
appels d'urgence, la portabilité du numéro,
les interceptions légales, etc. Nous fournissons
tous les équipements d'infrastructure qui permettent
de faire ça. Et nous nous chargeons aussi des annonces
réseaux, comme celle de dire à un abonné
que le numéro qu'il appelle n'existe pas. C'est
tout bête mais il faut savoir le faire. C'est là
où la technologie de MG2 Technologies nous a été
d'une grande aide. Nous sommes aujourd'hui les seuls au
monde à pouvoir proposer une telle offre de bout
en bout.
Pour conclure sur la chaîne de valeurs VoIP, il
faut également parler de la problématique
des interconnexions entre les opérateurs. Dans
ce domaine, il y a beaucoup d'acteurs comme Alcatel, Siemens,
Nortel ou Cisco. Ils ont pour vocation d'assurer l'interconnexion
entre un réseau voix sur IP et un réseau
de téléphonie traditionnelle. Ces nouveaux
réseaux, qui sont de facto des boucles locales
voix sur IP, vont devenir peu à peu dominants dans
leur marché et fagociter la boucle locale traditionnelle
avec leurs offres haut-débit et triple play. Quand
ils auront atteint ce stade, ils vont pouvoir imposer
aux opérateurs longue distance de prendre leur
trafic nativement en voie sur IP, donc de ne pas assumer
le coût très important de l'interconnexion
avec le réseau traditionnel. Par exemple, c'est
comme si la ville de Milan, équipée en VoIP
grâce à Fastweb, voulait échanger
son trafic avec un opérateur longue distance directement
en voix sur IP plutôt que de devoir passer par le
réseau classique de Telecom Italia. Et NetCentrex
se positionne aussi à ce niveau là en fournissant
les équipements d'interconnexion VoIP.
Quelle
est votre part de marché ?
A l'échelle du monde industriel, nous sommes un
nain industriel mais nous tirons partie de l'avantage
software qui n'implique pas une grosse infrastructure
ni de la production. De plus, malgré notre taille,
nous avons d'ores et déjà des activités
de poids : nous travaillons pour le plus grand réseau
de VoIP pour la téléphonie d'entreprise
avec Equant (France Télécom), nous collaborons
au plus grand réseau VoIP résidentiel en
remplacement complet de la boucle locale avec FastWeb
et nous sommes fournisseurs pour les plus grands centres
de contacts vrituels en nombre d'agents déployés
chez un opérateur (Société Générale
et France Télécom).
Aujourd'hui
vos activités sont majoritairement tournées
vers les entreprises. En attendant le décollage
de la VoIP résidentielle ?
En effet, le chiffre d'affaires de NetCentrex
est principalement issu de nos services aux entreprises
mais cela s'explique surtout par nos activités
dans le domaine des services vocaux. Sans cela, au niveau
téléphonie sur IP, nos revenus sont relativement
équilibrés entre professionnels et résidentiels.
Naturellement, les particuliers représentent un
très fort potentiel pour nous mais le développement
de ce marché est très dépendant de
l'expansion de l'accès haut-débit. Nous
espérons qu'avec les initiatives des collectivités
publiques, que l'on observe partout en Europe actuellement,
cela va accélérer le mouvement.
Vous
pensez que le déploiement du haut-débit
va principalement reposer sur les collectivités
publiques ?
Nous sommes dans une situation identique
à celle du téléphone au moment de
son lancement. Seule une initiative publique a permis
de financer la mise en place d'un réseau de fils
de cuivre. Aujourd'hui, c'est le même cas sauf que,
cette fois-ci, l'initiative revient aux collectivités
locales. Cela ne veut pas dire qu'elles doivent forcément
être opérateurs mais elles sont les seules
à pouvoir gérer le financement d'un tel
déploiement. On voit aujourd'hui de nombreuses
villes qui se lancent dans l'aventure comme Pau ou la
région de Catalogne en Espagne (qui a opté
pour de la téléphonie sur CPL, courant porteur
en ligne). Le problème en France c'est que les
collectivités hésitent encore à bouger
car le cadre législatif est encore très
flou dans ce domaine.
Croyez-vous
à la téléphonie IP en peer-to-peer
comme l'a développé les fondateurs de Kazaa
avec leur service Skype ?
Je vois le peer-to-peer
comme une niche Internet qui en aucun cas ne remplacera
le réseau téléphonique traditionnel
pour des raisons d'incompatibilité de nature, inhérente
au principe même du peer-to-peer. Et en plus de
ça, je vois un problème de modèle
économique sur le peer-to-peer puisque c'est soi-disant
du gratuit téléphonique sur Internet (encore
que la plupart des initiatives de ce type envisagent à
terme de faire payer un forfait). Surtout, ce qu'ils n'ont
pas compris, c'est que, quand les réseaux seront
triple play, cette fonction de téléphonie
sur IP sera totalement intégrée de façon
transparente dans un forfait global. Les usagers, qui
ont forcément besoin du haut-débit pour
utiliser ces services peer-to-peer, auront donc déjà
ce service inclus dans leur abonnement avec des tarifs
très bas.
Pour
vous, l'avenir c'est le triple play ?
Complètement. Ne serait-ce que parce
que dans les deux-trois ans qui viennent, le mode de communication
majeur qui va se développer selon moi, c'est la
vidéocommunication. Cela se voit sur FastWeb où,
aujourd'hui, 20 % des abonnés sont déjà
des utilisateurs de la vidéocommunication et cela
représente 34 % du trafic du réseau. Ce
sont les jeunes générations qui vont aider
au développement de ce mode de communication alors
que les générations plus âgées
sont plutôt réticentes. Dans certains pays,
c'est déjà en pleine expansion, comme la
Corée par exemple.
Quel
va être le rythme de développement ?
Dans ce domaine, les offres triple-play
sont totalement dépendantes des réseaux
haut-débit. Selon moi, ce genre de projets sera
multiplié par cinq en 2004 et par dix les années
suivantes.
Comment se répartit le
marché de la VoIP ?
Au moins 60 à 70 % de la VoIP
est utilisée par les opérateurs entre eux
pour le trafic. L'activité de VoIP en entreprise
ou auprès des résidentiels est donc bien
moindre et le marché des entreprises représente
encore aujourd'hui les deux-tiers de la VoIP hors marché
intra-opérateurs.
A titre personnel, disposez-vous d'un système de
téléphonie IP chez vous ?
J'en suis totalement privé car je
vis à la campagne, dans le Gers. Aucun réseau
ADSL ou de fibre optique ne passe près de chez
moi donc je dois me contenter d'une ligne RNIS.
C'est d'autant plus compliqué que je suis en partie
en télétravail.
Avez-vous
un site Internet préféré ?
Je préfère recevoir des listes
de distribution que surfer en ligne. Je reçois
à peu près cinq ou six newsletters spécialisées
sur notre secteur chaque jour. On peut citer celle de
Network
World par exemple.
|
|
Propos recueillis par Florence Santrot |
|
PARCOURS
|
|
|
Bertrand Chauvet travaille dans l'industrie
de la voix et des télécommunications depuis 1985. Après
avoir créé et développé Symphosys, un pionnier Français
des solutions de serveurs vocaux et audiovideotex sous
Unix (premiers services de Libération et des Caisses d'Epargne),
il rejoint le camp des fournisseurs de composants matériels
en rejoignant Acsys, leader de la reconnaissance vocale,
et plus tard Elan, la société spécialisée dans la synthèse
de parole à partir du texte. En 1994, il intègre
Dialogic Telecom Europe, pour créer la filiale Française.
Début 1996, il devient responsable du Business Development
EMEA (Europe Moyen Orient et Afrique). En octobre 1996,
il créée la "IP Telephony Task Force" qui lancera et développera
les activités VoIP de Dialogic, puis de Intel en 1997
après l'absorption de Dialogic dans le géant mondial des
semi-conducteurs. Il conduit ensuite différentes activités
de business development pour Intel Europe, en tant que
IP Telephony Business Development pour EMEA, puis Strategic
Marketing Manager EMEA, avant de rejoindre NetCentrex
en avril 2000 comme directeur du Business Developement
international.
NetCentrex emploie 160 personnes à travers
le monde. La société collabore à
des projets situés principalmeent en Europe, en
Amérique latine et en Asie. En 2002, le chiffre
d'affaires de NetCentrex était de 19 millions,
en croissance de 20 % par rapport à 2001 (le
marché européen seul était en hausse
de 35 %). |
|
|
|
|
|
|
|
|
|