JDN.
Quelle est la place du téléphone dans
la gestion de la relation client en France aujourd'hui
?
Eric Dadian.
C'est aujourd'hui le canal de prédilection de
la relation client, loin devant le Minitel, l'e-mail,
le courrier ou le site Web. Mais cela n'a pas toujours
été le cas. Il y a encore quelques années,
le téléphone était rarement utilisé
dans le cadre de la relation client. On lui préférait
une adresse postale, mais surtout le Minitel. Actuellement,
cette époque est révolue. Les numéros
Vert, Azur ou Indigo se sont généralisés
sur quasiment tous les packagings des produits de grande
consommation. L'introduction du Web et des outils de
communication électronique, n'y a rien changé,
même si aujourd'hui, nous disposons d'outils fantastiques,
comme le Web call-back.
Depuis
quand les centres d'appels se sont-ils développés
et quelle est la croissance de ce secteur actuellement
?
La notion de centre d'appels ne date
pas d'hier. Le premier d'entre eux, SVP, a été
créé en 1935. Mais le réel décollage
de cette activité date de 1998. Nous avons alors
connu des taux de croissance annuelle de l'ordre de
20 %. Par contre, la croissance en 2003 risque
d'être beaucoup moins soutenue. Elle devrait être
de l'ordre de 5 % environ. Aujourd'hui, nous recensons
3 000 centres d'appels en France, dont 800 sont
rattachés à France Télécom.
Cette activité employait en 2002, 0,8 %
de la population active, soit 183 000 personnes,
dont 38,37 % travaillent encore en Ile-de-France.
Enfin, 80 % des centres d'appels, hors France Télécom,
sont traités en interne. Seuls 20 % sont externalisés.
Par
rapport aux Etats-Unis ou à l'Europe, quelle
est la situation de la France sur cette activité
?
Même si nous avons progressé,
nous sommes encore en retard. En Grande-Bretagne, par
exemple, les centres d'appels emploient 1,2 % de
la population active. Aux Etats-Unis, c'est encore davantage.
4 % de la population active travaillent dans un
centre d'appels. Côté externalisation,
il existe également un certain décalage.
Outre-Atlantique, 30 % des centres d'appels sont
outsourcés.
Pourquoi
cette forte progression en France depuis 1998 ?
Cette croissance a été
portée en France par des entreprises en situation
de forte concurrence. Mieux comprendre leurs clients,
les fidéliser et en acquérir sans cesse
de nouveaux étaient pour elles est primordial.
D'où l'amélioration de leur service client.
Les secteurs les plus actifs dans ce domaine dans les
années 1997-1998 ont été les opérateurs
de téléphonie mobile, les assurances et
les banques à distance. Puis, en 2000, ce sont
les FAI qui ont dynamisé le secteur.
D'autres
secteurs s'y intéressent-il ?
Tout à fait. Aujourd'hui, les
centres d'appels intéressent tous les secteurs
d'activité, depuis les industries pharmaceutiques,
en passant par les services publics ou les collectivités
locales. Ils intéressent également tous
les types d'entreprises, aussi bien les très
grosses que les PME. Actuellement, les études
estiment que 40 % à 50 % des entreprises
françaises disposerons d'un service client téléphonique
dans les prochaines années.
De
fait, ils remplissent de plus en plus de fonctions...
Exactement. Leurs missions tendent à
se diversifier. Les centres d'appels peuvent intervenir
sur toute la chaîne du service client, depuis
l'avant-vente, jusqu'à l'après-vente,
en passant par l'assistance, mais aussi, sur la qualification
de prospect, la télévente, l'information,
la prise de rendez-vous ou encore le recouvrement.
Quelles
sont les conséquences de ces évolutions
en terme d'organisation ?
Enormes. Les process s'industrialisent.
Les technologies ont beaucoup évolué.
Le couplage de l'informatique à la téléphonie
a permis d'apporter beaucoup plus d'efficacité
en évitant les déplacements et en apportant
une réponse immédiate. Surtout, il a permis
de personnaliser et de mieux suivre la relation client.
Et
en terme de formation ?
C'est un secteur qui se professionnalise.
L'amélioration de la qualité du service
est aujourd'hui au coeur des préoccupations des
centres d'appels. Il devient de plus en plus important
d'intégrer du personnel dans la durée
et que celui-ci soit correctement formé. La formation
joue également un rôle crucial pour revaloriser
ces métiers. Dans ce domaine, il a fallu tout
inventer. La première initiative dans ce sens
est venue de la CCI d'Amiens. En collaboration avec
Nortel, elle a créé SupMedia Com, une
formation dédiée aux métiers de
la relation client. Parallèlement, l'AFRC a rédigé
un référentiel métier qui a aboutit
à la création d'une série de diplômes.
Un Bac Pro, "Relation Client", a vu le jour
en juin 2001, ainsi qu'un Deust de téléconseiller
et une licence professionnelle Téléservice
fin 2001. Nous avons également élaboré
un code de déontologie sur la protection des
données personnelles qui a été
validé par la CNIL. Enfin, une norme AFNOR sur
la qualité des services offerts aux clients sera
disponible au cours de l'année 2003.
Dans
les quelques années à venir, quelles sont
les grandes évolutions qui attendent ce secteur
?
La croissance va se poursuivre. Les entreprises
comme les administrations ne peuvent plus se passer
d'un centre d'appels. Cette activité va devenir
un service à part
entière, rattaché directement à
la direction et non plus, comme autrefois, au département
de la téléphonie. C'est un outil qui va
devenir de plus en plus commercial, car l'intérêt
pour une entreprise est de s'en servir pour faire du
business. Les centres d'appels vont également
être amenés à utiliser de plus en
plus de technologies de contact. Les dernières
en date concernent la mobilité comme le SMS,
les PDA et bientôt le Wi-Fi et les MMS.
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