INTERVIEW 
 
Renaud Dutreil
Ministre de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat
Renaud Dutreil
"Avec l'administration électronique, l'Etat compte économiser 5 à 7 milliards d'euros par an"
La palette des services publics accessibles en ligne va s'élargir en 2005. Le gouvernement compte rentabiliser très rapidement l'investissement de 1,8 millard d'euro destiné à développer l'e-administration. Le ministre de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat, Renaud Dutreil, s'en explique au JDN.
(27/09/2004)
 
(Cet entretien a été réalisé par e-mail)

JDN.
Quels services publics seront dématérialisés et opérationnels en 2005 ?

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Dossier Internet public
  Le site
adae.gouv.fr
Renaud Dutreil. Dès janvier sera mis en œuvre le service commun de déclaration de changement d'adresse grâce à un système d'information transversal. Les informations seront transmises automatiquement aux seuls organismes que l'internaute aura sélectionné. La première version de ce service ne concernera que certaines administrations et services publics, et sera applicable à la seule résidence principale. Progressivement, l'ensemble des organismes, y compris privés, seront intégrés. En avril 2005, une première version du service personnalisé, mon.service-public.fr, sera opérationnelle. En juillet, il sera possible pour chaque citoyen de demander en ligne, sans avoir à accomplir de démarches, une copie ou un extrait d'acte de naissance, de mariage. Enfin, en octobre, nous proposerons un service qui permettra aux associations d'effectuer une demande de subvention sur Internet. J'attire votre attention sur le fait que l'ensemble des services du programme ADELE (Ndlr : ADministration ELEctronique) sont disponibles sur le site adae.gouv.fr.

Quelles seront les futures fonctionnalités de "mon.service-public.fr" ?
Mon.service-public.fr offrira aux usagers un accès personnalisé à l'ensemble des services électroniques mis en place par les administrations. Dans une première étape, l'usager pourra choisir les rubriques qui l'intéressent, en se constituant un "panier" d'informations administratives. Il pourra mettre en place un système de rappels personnels, par exemple une date limite de paiement de cotisations ou les dates des vacances scolaires. Dans une seconde étape, l'usager pourra gérer ses dossiers administratifs en ligne. Toutes les téléprocédures pourront être accessibles par un point d'entrée unique permettant d'effectuer ses propres démarches : déclaration d'impôt, demande d'extrait d'acte de naissance, inscription à des concours, etc.

En quoi consiste la carte de vie quotidienne ?
Ces cartes ont, selon les projets retenus, des fonctionnalités différentes. Cela peut être des cartes destinées aux scolaires et aux étudiants leur permettant de payer des services ou d'accéder à des équipements scolaires, des cartes de transport, des cartes d'authentification et de contrôle d'accès pour les démarches administratives pour l'ensemble de la population. Notre objectif aujourd'hui est d'accompagner le développement de ces cartes en s'assurant de la cohérence globale du dispositif. Nous allons proposer un label et encourager chacun à respecter quelques règles techniques communes, pour que ces outils restent interopérables.

A quand la carte d'identité électronique ? Comment bénéficier d'un outil d'identification et de signature électronique ?
Nous attendons la carte nationale d'identité électronique pour l'année 2006. Nous nous sommes dotés d'un cadre juridique nous garantissant des échanges en confiance entre les usagers et l'administration. Ce cadre définit les différents niveaux de sécurité exigés, en fonction du niveau de sensibilité que requiert un échange entre l'usager et l'administration. Autrement dit, il ne sera pas systématiquement nécessaire d'utiliser un outil d'authentification à très haut niveau de sécurité. Nous sommes attachés au libre choix de la carte pour la signature électronique. L'usager pourra choisir sa carte nationale d'identité électronique, ou sa nouvelle carte Vitale, ou sa carte de vie quotidienne, ou tout autre outil reconnu par l'administration, pour signer électroniquement ses documents.

Où en est l'élaboration d'une charte graphique et ergonomique pour l'ensemble des sites publics de l'administration ? Quels sont les critères de définition de cette charte ?
Nous avançons dans ce projet avec l'objectif de publier une première version de la charte avant la fin de l'année. Il s'agit de faire en sorte qu'un usager, en circulant d'une téléprocédure à l'autre, puisse y trouver des interfaces similaires, simples, qui n'exigent pas de lui un effort d'apprentissage à chaque nouvelle démarche. Cette charte a vocation à s'appliquer à toutes les téléprocédures publiques. Sa première application concernera le service unique de déclaration de changement d'adresse. Nous en définissons le périmètre de façon pragmatique. Il s'agit de permettre à chaque administration d'adopter la charte rapidement et simplement.

Le budget consacré au programme ADELE représente 1,8 milliard d'euros sur la période 2004-2007"
Où en est la plate-forme mutualisée dédiée à la gestion des marchés publics ?
Dans quelques jours, le prestataire sera choisi. L'agenda de ce projet est en phase avec l'échéance du 1er janvier 2005, à partir de laquelle chaque administration sera tenue d'accepter les offres envoyées par la voie électronique. Par ailleurs, Il sera proposé aux collectivités territoriales d'utiliser le dispositif interministériel par l'intermédiaire de l'UGAP (Ndlr : Union des groupements d'achat public) qui en commercialisera l'usage. Bien sûr, les collectivités pourront utiliser d'autres produits disponibles sur le marché.

Quel est le budget attribué aujourd'hui au PSAE, le Plan stratégique de l'administration électronique ? Combien l'Etat espère-t-il dégager de bénéfices grâce au développement de l'e-administration ?
Le budget, hors formation des agents publics, consacré au programme ADELE représente un total de 1,8 milliard d'euros sur la période 2004-2007. Il est financé sur les budgets des ministères concernés. L'Etat se fixe un objectif de gain de productivité compris entre 5 et 7 milliards d'euros par an à partir de 2007. Quelques exemples nous confortent dans notre analyse. Une étude de la CNAV (Ndlr : Caisse nationale d'assurance vieillesse) sur le coût du traitement des 1,8 millions de déclarations annuelles des données sociales nous montre qu'un traitement électronique coûte 10 fois moins qu'un traitement magnétique et 100 fois moins qu'un traitement papier.

Allez-vous définir un standard pour le choix des logiciels ? Envisagez-vous, comme c'est le cas à Munich ou à Vienne, de travailler exclusivement avec des logiciels open source, sachant que le coût est moindre ?
Notre position est pragmatique. Lorsque l'usage des logiciels libres nous permet de réduire les coûts, de garantir la sécurité, de favoriser l'interopérabilité, d'encourager la mutualisation des expériences et des outils, nous y sommes favorables et nous les utilisons. Cependant, les coûts de formation, d'installation et de maintenance des logiciels libres sont tels qu'il est difficile de leur donner le crédit d'être systématiquement l'option la moins chère.

Il ne s'agit pas de nous projeter dans un futur lointain et de promettre une administration immatérielle"
En quoi consistent les réflexions ou les futurs développements en matière "d'environnement intelligent" ?
Nous mesurons bien que la mise en place des nouveaux outils dans l'administration est progressive, et que les technologies évoluent plus vites que les pratiques. C'est pourquoi nous exerçons une veille attentive pour que notre programme d'action puisse suivre un développement en cohérence avec l'évolution des outils. Il ne s'agit pas de nous projeter dans un futur lointain et de promettre une administration immatérielle, dans laquelle tous les agents publics se verraient confier des tâches d'aide et d'accompagnement de l'usager dans ses démarches. Il s'agit de développer les outils et les pratiques en n'omettant pas d'intégrer dans nos projets des technologies émergentes telles que la VoIP ou la mobilité du poste de travail.

Quel est le rôle de l'Union Européenne dans le développement de l'e-administration en France ? Quelle e-administration à l'étranger vous sert de modèle ?
Nous participons à l'ensemble des groupes de travail qui nous permettent de coordonner nos choix et nos stratégies de développement de l'administration électronique. A titre d'exemple, la France a rejoint le réseau Testa, qui réunit les réseaux Intranet des administrations des pays membres. Nous avons trouvé beaucoup d'expériences intéressantes chez de nombreux partenaires, au Canada, en Scandinavie, en Grande-Bretagne, en Italie. Il n'existe pas de modèle parfait. Le contexte administratif et politique du pays explique beaucoup de choses. Par exemple, les pays dans lesquels un numéro unique du citoyen existe ont pu, les premiers, développer des services interopérables. La France est attachée aux principes de la Loi Informatique et Liberté. Il ne saurait être question d'utiliser un tel numéro.

Comment un ministre gère-t-il ses e-mails ? Recevez-vous du spam ?
L'utilisation des mails autorise la mobilité, la réactivité, j'en mesure aujourd'hui les avantages. Le ministère est assez bien protégé contre les spams. Mieux que ma boite personnelle, en tout cas. Les efforts conjoints de la CNIL et du Parlement pourront, je l'espère, endiguer cette dérive de l'utilisation d'Internet.

Quel est votre site préféré en dehors des sites institutionnels ?
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  Le site
adae.gouv.fr
J'utilise les sites d'informations, comme Le Monde, Le Parisien, Le Figaro et Le Journal du Net, mais je n'ai pas un site de référence. C'est justement leur nombre et leur diversité qui sont intéressants. D'où l'intérêt des moteurs de recherche comme Google et Yahoo. Par ailleurs, j'accomplis certaines démarches en ligne : la réservation de billets d'avion comme les déclarations d'impôts. Dans le domaine culturel, le Web français est également riche avec, par exemple, le portail Culture.fr ou le site de l'Opéra de Paris.
 
 
Propos recueillis par Emilie LEVEQUE, JDN

PARCOURS
 
 
Renaud Dutreil, né le 12 juin 1960, est un ancien élève de l'École Normale Supérieure, de l'Institut d'Études Politiques de Paris et de l'Ecole Nationale d'Administration.

Renaud Dutreil a été secrétaire d'Etat aux PME, au Commerce, à l'Artisanat, aux Professions libérales et à la Consommation auprès du ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie de mai 2002 à mars 2004. Il est ministre de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat depuis le 1er avril 2004.

Renaud Dutreil a publié deux ouvrages : "Le coq sur la paille"( mars 1993) et "La République des Ames mortes" (octobre 2001).

   
 
 
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