JDN.
Comment se sont déroulées les négociations
entre TPS et France Telecom ?
Emmanuel Florent.
Nous avons finalisé l'accord commercial très récemment,
mais nous avions été l'un des premiers à signer avec
PCCAD [NDLR : le projet d'expérimentation
de télévision et vidéo à
la demande sur Adsl de France Telecom], il y a un
peu plus de douze mois. A l'époque, ils recherchaient
surtout du contenu pour l'offre de vidéo à la demande
et nous avions beaucoup de choses qui les intéressaient.
Nous avons toujours cru que la VOD serait la cerise
sur le gâteau mais que le vrai gâteau était la distribution
sur la ligne téléphonique d'un bouquet de chaînes. Chacun
a fait un pas vers l'autre, nous vers la VOD, eux vers
le bouquet. Nous nous sommes aperçus que nos ingénieurs
et techniciens respectifs qui travaillaient sur ces
sujets depuis longtemps parlaient le même langage et
nous sommes arrivés à une synthèse.
L'accord
avec France Telecom contient-il une clause d'exclusivité
?
L'accord est non-exclusif, dans les deux
sens.
Cela
veut donc dire que vous pourriez signer avec d'autres
opérateurs ?
Et réciproquement
On
pense évidemment à LDCom, avec qui TF1 a travaillé sur
un autre projet uniquement orienté vers la diffusion
de chaînes mais sans VOD
Les deux schémas sur lesquels nous travaillions
étaient très différents. Les propositions de LDCom étaient
de très grande qualité, tout ce qui a été fait entre
TF1 et LDCom l'était aussi. Nous avons beaucoup réfléchi
et le choix a été très difficile. Dans la solution retenue,
nous commercialisons des offres de bouquet de télévision
et proposons des contenus en coordination avec TF1 et
M6, tandis que France Telecom commercialise un accés
vidéo et met en place une infrastructure de vidéo à
la demande. Dans ce domaine, ils sont en avance et ce
point nous semblait déterminant à court terme en matière
de business, car il est au cur de la modernité de la
télévision numérique sur une ligne téléphonique.
Comment
allez-vous travailler avec France Telecom ?
Le souhait de tous les dirigeants, et
en particulier de Thierry Breton et moi-même, est de
marier les cultures en respectant la culture de chacun,
de ne surtout pas essayer de faire le métier de l'autre
mais de s'enrichir mutuellement. C'est l'essence même
de cet accord. Nous ne voulons pas rentrer dans le métier
de fournisseur d'accés et Thierry Breton a clairement
indiqué qu'il était intéressé à développer France Telecom
dans le domaine de l'image, mais dans un cadre de partenariat
avec les éditeurs. Et il est très heureux de le faire
avec les leaders du marché.
Concrètement,
à quoi ressemblera l'offre ?
Dévoiler aujourd'hui l'offre que je vais
faire à Lyon en décembre revient à dévoiler nos offres
de Noël
Donc nous allons sortir nos offres commerciales
à la toute dernière minute, fin novembre. On ne va pas
raconter notre vie à des gens qui veulent nous faire
la peau, notamment le groupe Canal Sat !
Mais
tout le monde se demande évidemment quel sera le prix
TPS Star est à 11 euros sur le satellite.
Je vais essayer d'être cohérent, donc TPSL tiendra compte
de nos tarifs actuels. Mais tout ça, c'est la surprise
du chef.
Quel
investissement cela représente-il pour TPS ?
Sur ces questions, ce sont les actionnaires
de TPS qui répondent. Je pense que Patrick Le Lay Indiquera
les chiffres à la conférence des analystes financiers
mardi 9 septembre. En matière de communication financière,
tout ceci est très confidentiel et il est interdit de
donner des informations avant la conférence.
Et
quels sont vos objectifs?
Notre premier objectif est d'atteindre
300.000 clients en cinq ans. On sait bien que dans un
premier temps, la télévision sur la ligne téléphonique
ça marche dans le cur des villes, dans les logements
collectifs. Mais au fur et à mesure du développement de
la compression du numérique, de l'amélioration des technologies
de distribution - aujourd'hui l'Adsl et peut-être demain
le Vdsl -, on arrivera aux zones péri-urbaines, puis des
zones plus larges. Pour le reste, le satellite couvre
ce qu'on appelle les "zones blanches", qui sont ses meilleurs
marchés. En France, les grands projets structurants sont
d'abord sur Paris, Lyon et Marseille. Dans la première
phase, on aura Lyon et son agglomération, puis Paris et
un certain nombre de villes du 92, du 93 et du 94. Après
il y aura la phase de déploiement printemps-été, puis
la rentrée. Il serait assez logique qu'à la rentrée 2004,
les douze grandes métropoles françaises soient couvertes.
Que
cherche vraiment TPS à travers ce projet?
Notre business, c'est trois choses :
un super-produit, un bon prix et le maximum de réseau.
Le produit, on l'a et notre prix d'attaque à 11 euros
est une super-offre promotionnelle. Notre marketing
est national, mais 30 à 40% des gens qui voient nos
spots de promo ne peuvent pas s'abonner. Or ces 30 à
40% sont dans le cur des villes, dans les immeubles.
Et bien voilà
Nous visons 100% du territoire à terme.
Il faut bien sûr le temps du déploiement, et j'espère
qu'il sera rapide, et un marketing intelligent, car
ce sera à chaque fois un cas concret. TPSL à Lyon sera
légèrement différent du point de vue du contenu de TPSL
à Strasbourg, où il faudra un maximum de chaînes allemandes,
de TPSL à Nice, où il faudra un maximum de chaînes italiennes,
ou de TPSL à Marseille, où il faudra un maximum de chaînes
nord-africaines. Il ne faudra pas se planter car tout
le monde va nous observer et il y a pour l'instant plus
de sceptiques que de croyants
En
quoi l'expérience du groupe en matière d'Internet peut-elle
être utile à ce projet ?
Il faut que les gens comprennent bien
que c'est un projet de télévision, pas
un projet Internet. Mais tout ce que nous savons faire
dans l'Internet, que ce soit au niveau de TF1 ou de
M6, peut être utile pour développer des services interactifs
ou de la vidéo à la demande et sera totalement mis au
service du projet TPSL. En tout cas je vous le garantis
en tant que patron des activités Internet du groupe
TF1. Pour M6, je n'en doute pas mais ce n'est pas à
moi de le dire : c'est à Nicolas de Tavernost [PDG
de M6] et Xavier Spender [directeur général de
M6 Web] d'éventuellement s'exprimer sur le sujet.
Nous allons profiter des technologies de l'Internet,
du back-office de l'Internet, de tout ce qu'on a appris
sur la manière dont les consommations se modernisentt.
Mais c'est d'abord de la télévision.
On
parlait souvent du "first mover advantage" dans l'Internet.
Est-ce qu'il joue aussi dans la télévision?
Le first mover advantage joue à deux
conditions. D'abord, il faut un vrai marché : j'y crois
mais il faut que je le démontre. Ensuite, il faut qu'on
le fasse bien : en signant un accord entre les deux
leaders, celui de la télévision qu'est TPS avec ses
actionnaires et celui des télécoms, on a mis toutes
les chances dans notre camp. A nous de démontrer qu'il
y a un vrai marché et de faire coller nos offres à la
demande. A nous aussi de ne pas décevoir tous ceux qui
nous ont fait confiance, car derrière cela, il y a des
industriels, notamment Alcatel, Sagem, Thomson ou Thalès.
Le plus dur commence.
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