INTERVIEW
 
PDG
TPS
Emmanuel Florent
"A nous de démontrer qu'il y a un vrai marché pour la télé Adsl "
TPS, le bouquet satellite dont TF1 et M6 sont les actionnaires, a signé un accord avec France Telecom pour commercialiser à partir de décembre une offre de télévision diffusée via les lignes téléphoniques grâce à l'Adsl. Une grande première pour le secteur de la télévision en France. Au coeur de ce projet figure Emmanuel Florent, le PDG de TPS, qui a commencé sa carrière en 1984 au sein du groupe France Télécom (il y travaillait à la direction de l'exploitation des transmissions TV et radio par satellite...). Au lendemain de l'annonce de l'accord, Emmanuel Florent revient pour le JDN sur la genèse et la nature du projet, ainsi que sur les objectifs et les attentes de sa société.
05 septembre 2003
 
          
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JDN. Comment se sont déroulées les négociations entre TPS et France Telecom ?
Emmanuel Florent. Nous avons finalisé l'accord commercial très récemment, mais nous avions été l'un des premiers à signer avec PCCAD [NDLR : le projet d'expérimentation de télévision et vidéo à la demande sur Adsl de France Telecom], il y a un peu plus de douze mois. A l'époque, ils recherchaient surtout du contenu pour l'offre de vidéo à la demande et nous avions beaucoup de choses qui les intéressaient. Nous avons toujours cru que la VOD serait la cerise sur le gâteau mais que le vrai gâteau était la distribution sur la ligne téléphonique d'un bouquet de chaînes. Chacun a fait un pas vers l'autre, nous vers la VOD, eux vers le bouquet. Nous nous sommes aperçus que nos ingénieurs et techniciens respectifs qui travaillaient sur ces sujets depuis longtemps parlaient le même langage et nous sommes arrivés à une synthèse.

L'accord avec France Telecom contient-il une clause d'exclusivité ?
L'accord est non-exclusif, dans les deux sens.

Cela veut donc dire que vous pourriez signer avec d'autres opérateurs ?
Et réciproquement…

On pense évidemment à LDCom, avec qui TF1 a travaillé sur un autre projet uniquement orienté vers la diffusion de chaînes mais sans VOD…
Les deux schémas sur lesquels nous travaillions étaient très différents. Les propositions de LDCom étaient de très grande qualité, tout ce qui a été fait entre TF1 et LDCom l'était aussi. Nous avons beaucoup réfléchi et le choix a été très difficile. Dans la solution retenue, nous commercialisons des offres de bouquet de télévision et proposons des contenus en coordination avec TF1 et M6, tandis que France Telecom commercialise un accés vidéo et met en place une infrastructure de vidéo à la demande. Dans ce domaine, ils sont en avance et ce point nous semblait déterminant à court terme en matière de business, car il est au cœur de la modernité de la télévision numérique sur une ligne téléphonique.

Comment allez-vous travailler avec France Telecom ?
Le souhait de tous les dirigeants, et en particulier de Thierry Breton et moi-même, est de marier les cultures en respectant la culture de chacun, de ne surtout pas essayer de faire le métier de l'autre mais de s'enrichir mutuellement. C'est l'essence même de cet accord. Nous ne voulons pas rentrer dans le métier de fournisseur d'accés et Thierry Breton a clairement indiqué qu'il était intéressé à développer France Telecom dans le domaine de l'image, mais dans un cadre de partenariat avec les éditeurs. Et il est très heureux de le faire avec les leaders du marché.

Concrètement, à quoi ressemblera l'offre ?
Dévoiler aujourd'hui l'offre que je vais faire à Lyon en décembre revient à dévoiler nos offres de Noël… Donc nous allons sortir nos offres commerciales à la toute dernière minute, fin novembre. On ne va pas raconter notre vie à des gens qui veulent nous faire la peau, notamment le groupe Canal Sat !

Mais tout le monde se demande évidemment quel sera le prix…
TPS Star est à 11 euros sur le satellite. Je vais essayer d'être cohérent, donc TPSL tiendra compte de nos tarifs actuels. Mais tout ça, c'est la surprise du chef.

Quel investissement cela représente-il pour TPS ?
Sur ces questions, ce sont les actionnaires de TPS qui répondent. Je pense que Patrick Le Lay Indiquera les chiffres à la conférence des analystes financiers mardi 9 septembre. En matière de communication financière, tout ceci est très confidentiel et il est interdit de donner des informations avant la conférence.

Et quels sont vos objectifs?

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Notre premier objectif est d'atteindre 300.000 clients en cinq ans. On sait bien que dans un premier temps, la télévision sur la ligne téléphonique ça marche dans le cœur des villes, dans les logements collectifs. Mais au fur et à mesure du développement de la compression du numérique, de l'amélioration des technologies de distribution - aujourd'hui l'Adsl et peut-être demain le Vdsl -, on arrivera aux zones péri-urbaines, puis des zones plus larges. Pour le reste, le satellite couvre ce qu'on appelle les "zones blanches", qui sont ses meilleurs marchés. En France, les grands projets structurants sont d'abord sur Paris, Lyon et Marseille. Dans la première phase, on aura Lyon et son agglomération, puis Paris et un certain nombre de villes du 92, du 93 et du 94. Après il y aura la phase de déploiement printemps-été, puis la rentrée. Il serait assez logique qu'à la rentrée 2004, les douze grandes métropoles françaises soient couvertes.

Que cherche vraiment TPS à travers ce projet?
Notre business, c'est trois choses : un super-produit, un bon prix et le maximum de réseau. Le produit, on l'a et notre prix d'attaque à 11 euros est une super-offre promotionnelle. Notre marketing est national, mais 30 à 40% des gens qui voient nos spots de promo ne peuvent pas s'abonner. Or ces 30 à 40% sont dans le cœur des villes, dans les immeubles. Et bien voilà… Nous visons 100% du territoire à terme. Il faut bien sûr le temps du déploiement, et j'espère qu'il sera rapide, et un marketing intelligent, car ce sera à chaque fois un cas concret. TPSL à Lyon sera légèrement différent du point de vue du contenu de TPSL à Strasbourg, où il faudra un maximum de chaînes allemandes, de TPSL à Nice, où il faudra un maximum de chaînes italiennes, ou de TPSL à Marseille, où il faudra un maximum de chaînes nord-africaines. Il ne faudra pas se planter car tout le monde va nous observer et il y a pour l'instant plus de sceptiques que de croyants…

En quoi l'expérience du groupe en matière d'Internet peut-elle être utile à ce projet ?
Il faut que les gens comprennent bien que c'est un projet de télévision, pas un projet Internet. Mais tout ce que nous savons faire dans l'Internet, que ce soit au niveau de TF1 ou de M6, peut être utile pour développer des services interactifs ou de la vidéo à la demande et sera totalement mis au service du projet TPSL. En tout cas je vous le garantis en tant que patron des activités Internet du groupe TF1. Pour M6, je n'en doute pas mais ce n'est pas à moi de le dire : c'est à Nicolas de Tavernost [PDG de M6] et Xavier Spender [directeur général de M6 Web] d'éventuellement s'exprimer sur le sujet. Nous allons profiter des technologies de l'Internet, du back-office de l'Internet, de tout ce qu'on a appris sur la manière dont les consommations se modernisentt. Mais c'est d'abord de la télévision.

On parlait souvent du "first mover advantage" dans l'Internet. Est-ce qu'il joue aussi dans la télévision?
Le first mover advantage joue à deux conditions. D'abord, il faut un vrai marché : j'y crois mais il faut que je le démontre. Ensuite, il faut qu'on le fasse bien : en signant un accord entre les deux leaders, celui de la télévision qu'est TPS avec ses actionnaires et celui des télécoms, on a mis toutes les chances dans notre camp. A nous de démontrer qu'il y a un vrai marché et de faire coller nos offres à la demande. A nous aussi de ne pas décevoir tous ceux qui nous ont fait confiance, car derrière cela, il y a des industriels, notamment Alcatel, Sagem, Thomson ou Thalès. Le plus dur commence.

 
Propos recueillis par François Bourboulon

PARCOURS
 
Emmanuel Florent, diplômé de l'Ecole Polytechnique et de l'Ecole nationale des télécom, a commencé sa carrière en 1984 au sein du groupe France Télécom avant de rejoindre TF1 en 1987. Il a successivement occupé les postes de directeur technique adjoint chargé de la régie finale et des transmissions, de directeur du développement, de directeur général d''Eurosport et de directeur général adjoint en charge de la diversification et de directeur général d'e-TF1. Il est PDG de TPS depuis 2001 et reste PDG d'e-TF1.

   
 
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