Le très
médiatique PDG d'Aucland fête le premier anniversaire
de son site. Porté par son puissant actionnaire Europ@web,
il prétend détrôner iBazar de son piédestal
de leader français sur le marché des enchères
en ligne. En vue: une "levée" monstre de plus
de 200 millions de francs.
Propos recueillis par Fabien Claire le 20 avril 2000
.
JDNet:
Pour fêter votre premier anniversaire, vos services deviennent
gratuits jusqu'au mois de juin au moment ou iBazar lui devient
payant. CoÔncidence?
Fabrice
Grinda: Nous
sommes partis d'un constat: à la différence de son principal concurrent,
Aucland
a davantage d'acheteurs que de vendeurs. L'idée n'est donc pas
simplement d'embêter nos amis d'iBazar
mais aussi de donner l'idée à leurs vendeurs de tester nos
services.
N'y
a-t-il pas là une évolution de votre business model ?
Pas
du tout, c'est une opération provisoire. De la même façon eBay
à No&iulm;l avait organisé une journée gratuite pour les vendeurs et
le site a pulvérisé ses records de biens mis en vente dans
une seule journée. Pour autant notre modèle, comme celui de eBay,
est et restera payant. Cette opération est uniquement un moyen
de promouvoir notre service par rapport à la concurrence.
Un
an d'existence, c'est aussi l'occasion de faire un point sur votre
activité. Quel est votre volume d'affaire mensuel ?
Actuellement, le chiffre d'affaires généré pour les vendeurs par
l'intermédiaire d'Aucland tourne autour de 20 millions de francs
par mois. Le chiffre d'affaires mensuel pour Aucland est d'environ
300.000 francs.
Cela
ne correspond pas à votre commission de 3%?
C'est moins en effet car lorsque les commissions sont inférieures
à 100 francs, ce qui est le cas pour une grande partie des transactions
générées, elles sont cumulées jusqu'à ce qu'elles atteignent 100
francs. Du côté des utilisateurs, ils sont plus de 250.000 en
Europe et l'on constate qu'avec le temps nos utilisateurs, passée
une phase de découverte du service et leurs premières tentatives,
utilisent de plus en plus notre site. Nous prévoyons d'être profitables
en 2002.
Pour
l'heure votre activité nécessite de gros investissements, en communication
notamment. Prévoyez-vous de nouvelles levées de fonds ?
Nous préparons effectivement une nouvelle levée à une échéance
d'un mois et demi à deux mois. Le montant n'est pas encore précisément
établi mais il devrait être compris entre 200 et 400 millions
de francs.
Il
s'agirait d'une des plus importantes levées de fonds liée à l'Internet
en Europe. Quels seraient les futurs investisseurs ?
Europ@web sans aucun doute sera le principal investisseur, peut-être
le seul même. Il s'agit pour nous de poursuivre notre développement
international et notre montée en puissance, notamment à travers
notre stratégie de développement multimédia. Le budget annuel
de fonctionnement se situe actuellement à plusieurs centaines
de millions de francs.
Il
y a quelques jours dans nos colonnes, Patrick Robin, le fondateur
d'imagiNet, manifestait son "envie de gerber" devant les images
de certains entreprenautes véhiculées par les médias. Il citait
notamment une émission dans laquelle vous aviez une large place.
Comment avez-vous perçu cette réaction ? (Lire
la tribune
de Patrick Robin)
J'ai aussitôt écrit à Patrick qui est un ami. Dans l'ensemble
je suis d'accord avec lui. Il ne faut pas perdre de vue que les
journalistes de ce type d'émission nous filment pendant trois
jours et montent finalement un sujet de cinq minutes. Je suis
moi aussi hostile à l'image de la réussite dans une logique de
l'argent pour l'argent, sans véritable projet d'entreprise. Il
est clair que pour moi la Bourse n'est pas une fin en soi. Nous
avons un projet. Notre véritable but c'est la conquête du monde
dans notre secteur. J'ai peut-être été un peu égoÔste en montrant
aux journalistes ce qu'ils voulaient voir, les stock-options par
exemple. Je suis néanmoins convaincu, comme Patrick, qu'il faut
à tout prix veiller à l'image que nous donnons de l'Internet.
Si nous n'y prenons garde, nous risquons un rejet de la part du
public qui pourrait être dramatique. Nous devons convaincre les
gens d'adhérer au système.
Pour
revenir à votre site Aucland, vous évoquiez de nouvelles fonctionnalités
plurimédia. De quoi s'agit-il ?
Nous avons lancé en janvier dernier un magazine en kiosque qui
remporte un grand succès avec 20.000 exemplaires vendus pour un
tirage de 60.000. Il s'agit d'un magazine développé en interne
pour encourager les gens à venir rejoindre la communauté de nos
membres. Nous allons également lancer avant deux mois un service
d'alerte par SMS et un service WAP. Le WAP me semble particulièrement
intéressant pour toutes les activités sensibles au temps ou à
la localisation. Nous allons permettre à nos acheteurs d'être
alertés lorsqu'une surenchère est formulée sur le bien de leurs
rêves via le WAP ou les SMS, et les heureux possesseurs de téléphones
WAP pourront en outre surenchérir depuis leur portable. Nous avons
également mis en place un système de garanties sur le site pour
couvrir les vendeurs et acheteurs jusqu'à 1.200 francs. Le design
du site vient de changer avec une version plus agréable et plus
fonctionnelle.
La
concurrence sur le marché des enchères en ligne est aujourd'hui
acharnée entre les trois principaux acteurs du marché français
iBazar, Aucland et QXL. Or Europ@web est la fois votre principal
actionnaire et actionnaire de QXL. Cela ne vous inquiète-t-il
pas ?
D'abord une précision, il nous faut raisonner à l'échelle de l'Europe.
Pour moi il existe cinq acteurs crédibles avec en plus de ceux
que vous avez cité, eBay et l'allemand Ricardo.
Or Europ@web détient également une petite partie du capital de
eBay. Pourtant les investissements d'Europ@web dans QXL
et eBay n'ont rien à voir avec leur présence au capital d'Aucland.
Dans les deux premiers cas, il ne s'agit que d'investissements
dans une logique purement financière alors que le site Aucland
est un investissement stratégique. D'ailleurs j'ai obtenu d'Europ@web
qu'elle ne puisse monter dans le capital de QXL sans mon accord.
C'est pour moi la garantie que Aucland restera leur cheval de
bataille.
Qu'est
ce qui vous
séduit sur Internet ?
J'ai découvert le BBS (Bulletin Board System) au milieu
des années 80 et, comme le net par la suite, j'ai été
conquis par l'outil de simplification de la communication. Avec
Internet, j'entretiens davantage de relations avec beaucoup plus
de gens. J'aime le côté simple et informel du mail.
Et
du côté des sites ?
A titre personnel j'utilise AlloCiné
même si je n'ai pas le temps de sortir, j'aime connaitre
l'actualité ciné. Pour le reste j'achète
mes livres sur Amazon,
mes ordinateurs sur Buy.com
qui a la bonne idée de vendre certains produits à
perte. Je consulte régulièrement ESPN
pour l'information sportive et CNN
pour l'information généraliste.
Aucland
en chiffres :
Effectifs
|
130
personnes
|
Sites
|
|
chiffre-d'affaire
mensuel
|
300.000
francs
|
Diplômé
de l'universite de Princeton aux Etats-Unis (major de la section
économie) Fabrice Grinda a d'abord créé une
société de négoce informatique rapidement
revendue puis créé Aucland en Juillet 1998.