INTERVIEW
 
Directeur
Centre suédois du commerce extérieur
Magnus Harviden
"Titre"
L'antenne française du Centre suédois du Commerce extérieur est un organisme public dépendant de l'ambassade de Suède à Paris. Son rôle est avant tout de favoriser sur le plan macro-économique, les relations commerciales entre la France et la Suède. Le Centre s'occupe également des activités micro-économiques (aide concrète aux entreprises) en facilitant l'implantation sur le marché français des entreprises suédoises . Magnus Harviden, son nouveau directeur, nous explique ses objectifs et dresse un portrait de son pays, qui fait partie des pionniers de l'internet en Europe.20 septembre 2000
 
          

JDNet. Quel est exactement votre rôle?
Magnus Harvidden. On a en fait deux activités. La première consiste à répondre gratuitement aux questions des entreprises suédoises qui souhaient mieux connaître l'environnement économique en France. Nous propons également aux entreprises françaises d'avoir le même genre d'informations sur la Suéde . Cette activité est gratuite. L'autre pôle est payant et s'apparente à une activité de consulting. On conseille les entreprises suédoises qui veulent s'implanter en France, en leur trouvant des partenaires, en repérant des locaux ou en leur offrant une aide juridique pour leur faciliter la tâche. A l'heure actuelle, les start-up internet sont d'ailleurs la majorité de nos clients, même si on ne néglige pas les activités traditionnelles suédoises comme la filière bois. L'an dernier, on a traité 72 dossiers comme ceux de Spray, Dressmart, Letsbuyit ou EPO.com. Pour l'anecdote, cette dernière société a d'ailleurs embauché dans son staff notre conseiller qui était chargé du dossier d'implantation, preuve qu'on doit faire du bon boulot. Quant à mon prédécesseur, Tomas Fellbom, il est l'actuel président de Spray France même si dans ce cas là, il n'a pas été débauché puisqu'il était en fin de mandat au centre.

Pourquoi y a-t-il eu un engouement aussi précoce et aussi fort pour l'Internet en Suède?

Il y a plusieurs raisons, aussi bien d'ordre historique, que d'ordre économique. La première est que la Suède a toujours eu un faible pour les moyens de communication. Au début du siècle, Stockholm était l'une des villes européennes les plus raccordées au téléphone. Les Suédois ont donc toujours aimé l'innovation et les petits trucs. La deuxième raison est à mettre au crédit des pouvoir publics. Il y a deux ans, l'Etat a en effet décidé de faire en sorte que chaque ordinateur acheté par un particulier au sein de son entreprise soit déductible des impôts. La proposition est toujours valable et a favorisé le développement exponentiel du nombre d'internautes. Ce genre d'incitation se poursuit d'ailleurs, puisqu'on vient de mettre en place un plan de plusieurs milliards de francs pour favoriser un accès plus large au haut-débit. Au niveau économique, on a aussi peut être un marché un peu plus dérégulé que la France, ce qui a favorisé la concurrence. Même si, comme dans l'hexagone, Telia l'opérateur national garde le monopole des communications locales. Enfin, et c'est fondamental, tout le monde parle anglais en Suède, ce qui nous a rendu plus réactif quand la vague est arrivée des Etats-Unis.

Les start-up ont donc éclos plus tôt qu'en France. Mais, revers de la médaille, elles sont tombées de plus haut lors du krach du printemps...
Il est certain qu'on a été parmi les plus violemment touchés par ce choc en Europe. Mais c'est normal, car on avait atteint des sommets déraisonnables. A Stockolm, il y a trois ans, tout le monde était PDG à 25 ans. Quant aux investisseurs, ils avaient un comportement de moutons et multipliaient les investissements sans analyser les business models. Dans un petit pays comme le nôtre, cela ne pardonne pas et Boo.com en est l'exemple emblématique. Au lieu de freiner lentement, on a donc freiné d'un coup. Peut-être trop d'ailleurs, car il reste d'excellentes idées mais les investisseurs n'ont plus la patience d'attendre qu'un projet se développe.

Justement, est-ce que ce krach a changé vos méthodes et votre rôle dans votre travail quotidien?
Evidemment. Il y a deux ans, avec l'Internet, on a imaginé que la petite Suède pouvait racheter l'Europe. Les sociétés étaient des prédatrices, et le paroxisme a été ateint lorsque Spray a racheté Caramail. Maintenant, nos entreprises sont plutôt des cibles. Notre boulot a donc changé de ce point de vue. Car, avant le krach, toutes les entreprises suédoises ne songeaient qu'à une chose: s'implanter seule en France. Désormais, elles veulent des partenaires et cela renforce notre rôle d'intermédiaire. Notamment dans le BtoC, où les investisseurs attendent des revenus et ne veulent pas d'une implantation étrangère qui creusent encore les pertes. Le problème, c'est que personne ne sait exactement ce qui va marcher et l'expertise est difficile..

Quelles sont les entreprises à la mode en Suède et quel secteur est prisé actuellement?
Pour le secteur, je ne vous apprendrai rien en vous disant qu'il y a un réel engouement pour le mobile. Mais en Scandinavie, c'est justifié, car la Suède ou la Finlande sont les pays les plus équipés du monde. Quant aux sociétés, Spray, Everyday, IconMedialab ou Framfab font partie des plus connues.

En matière culturel, sur quels détails insistez vous avec les entreprises suédoises qui veulent venir en France?
Je leur explique surtout que le temps est extensible en France. La ponctualité n'est pas le fort des Français et c'est ce qui surprend le plus les Suédois. Par ailleurs, en Suède, quand on fait une réunion, on décide toujours quelque chose de ferme à la fin. Ici, après une réunion, on a tendance à en organiser une nouvelle pour décider. Enfin, il existe un fossé juridique dans les modalités de création d'entreprise ou au niveau des stock-options qui gêne l'implantation. Mais la France est devenu un marché obligé, donc elles se plient à ces petits désagréments.

 
Propos recueillis par Jérôme Batteau

PARCOURS
 
Magnus Härviden a 34 ans et est diplômé de l'institut Polytechnique de Stockholm et de l'INSA de Lyon. Après avoir notamment travaillé chez Andersen Consulting et à l'Ambassade de Suède à Paris, il a fait partie de la direction de la société de conseil suédois Cell Network, cotée sur la Bourse de Stockholm et qui emploie désormais plus de 2000 personnes dans 15 pays après moins de cinq ans d'existence.

   
 
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