JDNet.
Quel est exactement votre rôle?
Magnus Harvidden.
On a en fait deux activités.
La première consiste à répondre gratuitement
aux questions des entreprises suédoises qui souhaient
mieux connaître l'environnement économique en
France. Nous propons également aux entreprises françaises
d'avoir le même genre d'informations sur la Suéde
. Cette activité est gratuite.
L'autre pôle est payant et s'apparente à une
activité de consulting. On conseille les entreprises
suédoises qui veulent s'implanter en France, en leur
trouvant des partenaires, en repérant des locaux ou
en leur offrant une aide juridique pour leur faciliter la
tâche. A l'heure actuelle, les start-up internet sont
d'ailleurs la majorité de nos clients, même si
on ne néglige pas les activités traditionnelles
suédoises comme la filière bois.
L'an dernier, on a traité 72 dossiers comme ceux de
Spray, Dressmart, Letsbuyit ou EPO.com. Pour l'anecdote, cette
dernière société a d'ailleurs embauché
dans son staff notre conseiller qui était chargé
du dossier d'implantation, preuve qu'on doit faire du bon
boulot. Quant à mon prédécesseur, Tomas
Fellbom, il est l'actuel président de Spray France
même si dans ce cas là, il n'a pas été
débauché puisqu'il était en fin de mandat
au centre.
Pourquoi
y a-t-il eu un engouement aussi précoce et aussi fort
pour l'Internet en Suède?
Il y a plusieurs raisons, aussi bien d'ordre historique, que
d'ordre économique. La première est que la Suède
a toujours eu un faible pour les moyens de communication.
Au début du siècle, Stockholm était l'une
des villes européennes les plus raccordées au
téléphone. Les Suédois ont donc toujours
aimé l'innovation et les petits trucs. La deuxième
raison est à mettre au crédit des pouvoir publics.
Il y a deux ans, l'Etat a en effet décidé de
faire en sorte que chaque ordinateur acheté par un
particulier au sein de son entreprise soit déductible
des impôts. La proposition est toujours valable et a
favorisé le développement exponentiel du nombre
d'internautes. Ce genre d'incitation se poursuit d'ailleurs,
puisqu'on vient de mettre en place un plan de plusieurs milliards
de francs pour favoriser un accès plus large au haut-débit.
Au niveau économique, on a aussi peut être un
marché un peu plus dérégulé que
la France, ce qui a favorisé la concurrence. Même
si, comme dans l'hexagone, Telia l'opérateur national
garde le monopole des communications locales. Enfin, et c'est
fondamental, tout le monde parle anglais en Suède,
ce qui nous a rendu plus réactif quand la vague est
arrivée des Etats-Unis.
Les start-up
ont donc éclos plus tôt qu'en France. Mais, revers
de la médaille, elles sont tombées de plus haut
lors du krach du printemps...
Il est certain qu'on a été parmi les plus violemment
touchés par ce choc en Europe. Mais c'est normal, car
on avait atteint des sommets déraisonnables. A Stockolm,
il y a trois ans, tout le monde était PDG à
25 ans. Quant aux investisseurs, ils avaient un comportement
de moutons et multipliaient les investissements sans analyser
les business models. Dans un petit pays comme le nôtre,
cela ne pardonne pas et Boo.com en est l'exemple emblématique.
Au lieu de freiner lentement, on a donc freiné d'un
coup. Peut-être trop d'ailleurs, car il reste d'excellentes
idées mais les investisseurs n'ont plus la patience
d'attendre qu'un projet se développe.
Justement,
est-ce que ce krach a changé vos méthodes et
votre rôle dans votre travail quotidien?
Evidemment. Il y a deux ans, avec l'Internet, on a imaginé
que la petite Suède pouvait racheter l'Europe. Les
sociétés étaient des prédatrices,
et le paroxisme a été ateint lorsque Spray a
racheté Caramail. Maintenant, nos entreprises sont
plutôt des cibles. Notre boulot a donc changé
de ce point de vue. Car, avant le krach, toutes les entreprises
suédoises ne songeaient qu'à une chose: s'implanter
seule en France. Désormais, elles veulent des partenaires
et cela renforce notre rôle d'intermédiaire.
Notamment dans le BtoC, où les investisseurs attendent
des revenus et ne veulent pas d'une implantation étrangère
qui creusent encore les pertes. Le problème, c'est
que personne ne sait exactement ce qui va marcher et l'expertise
est difficile..
Quelles
sont les entreprises à la mode en Suède et quel
secteur est prisé actuellement?
Pour
le secteur, je ne vous apprendrai rien en vous disant qu'il
y a un réel engouement pour le mobile. Mais en Scandinavie,
c'est justifié, car la Suède ou la Finlande
sont les pays les plus équipés du monde. Quant
aux sociétés, Spray, Everyday, IconMedialab
ou Framfab font partie des plus connues.
En matière
culturel, sur quels détails insistez vous avec les
entreprises suédoises qui veulent venir en France?
Je leur explique surtout
que le temps est extensible en France. La ponctualité
n'est pas le fort des Français et c'est ce qui surprend
le plus les Suédois. Par ailleurs, en Suède,
quand on fait une réunion, on décide toujours
quelque chose de ferme à la fin. Ici, après
une réunion, on a tendance à en organiser une
nouvelle pour décider. Enfin, il existe un fossé
juridique dans les modalités de création d'entreprise
ou au niveau des stock-options qui gêne l'implantation.
Mais la France est devenu un marché obligé,
donc elles se plient à ces petits désagréments.
|