Créée
en 1996 par les frères Gerace pour mettre en place le programme
d'affiliation de Barnes & Noble, Be
Free est actuellement le leader parmi les prestataires de
programmes d'affiliation aux Etats-Unis. La société
propose une solution qui prend en charge l'intégralité
du processus de création et de gestion de cette nouvelle
force de vente: les sites affiliés. Be Free a été
introduit en Bourse en novembre 1999 et envisage désormais
de s'implanter en Europe.
Propos recueillis par Samuel Kissous
le 1er mars 2000
.
JDNet.
Parlons tout d'abord de Be Free. Comment définissez-vous
l'activité de Be Free ?
Gordon
Hoffstein. Nous proposons une solution d'affiliation pour
les sites qui vendent des biens, des services, ou de l'information.
Nous leur offrons la possibilite de promouvoir ces produits et
services sur de nombreux sites à travers le web (les "affiliés"),
et de ne payer qu'en fonction du résultat de ces promotions.
Notre technologie leur permet egalement de garder le contact avec
leurs affiliés.
Quelles
sont vos sources de revenu ?
Nos revenus se composent essentiellement de frais de mise en place
modestes (5000 dollars, ndlr) et d'un pourcentage sur les
ventes réalisées grâce aux affiliés
(2%), ou d'une prime fixe dans le cas où les affiliés
sont rémunérés en fonction du nombre de prospects
touchés. Notre chiffre d'affaires est en très forte
croissance puisqu'il a doublé entre le troisième
et le quatrième trimestre de 1999, passant de 1,3 million
a 2,6 millions de dollars.
Votre
société a été introduite en Bourse
récemment, en novembre 1999. Comment avez-vous vécu
cette étape importante?
L'introduction en Bourse fut un processus long, en particulier
les roadshows, mais qui nous a réussi puisque notre action
introduite au cours de 12 dollars le 3 novembre 1999 dépasse
actuellement les 90 dollars (la capitalisation boursiere de
Be Free atteint 2,7 milliards de dollars au 3 mars 2000, ndlr).
Les investisseurs ont reconnu notre énorme potentiel lié
a la taille de notre marché et au "first mover advantage".
Qu'est-ce
qui a changé depuis l'introduction?
Notre business model reste le même mais nos ventes et le
nombre de marchands ont considérablement augmenté,
nous sommes passés à une plus grande échelle.
J'essaie de ne pas regarder le cours de l'action plus d'une fois
par jour, mais je consacre près du tiers de mon temps a
discuter avec les analystes ou les gestionnaires de portefeuilles.
Ce sont des choses que je ne faisais pas avant, nous avons donc
dû étoffer notre équipe de management. Nous
sommes également plus prudents sur la diffusion de l'information.
Qu'est-ce
que vos clients aiment chez Be Free et qu'est-ce qu'ils aiment
moins ?
Nos clients aiment tout ! Ils ne paient qu'en fonction des résultats,
donc si le programme d'affilation ne marche pas bien, ils paient
moins. Au 31 décembre nous avions 164 clients actifs et
252 autres signés. Nous sélectionnons nos clients
autant qu'ils nous choisissent. Nous les sélectionnons,
car nous voulons dédier notre temps et nos ressources à
des sociétés qui auront du succès. Ils nous
choisissent parce que nous avons la technologie la plus robuste
et car notre business model leur permet de véritablement
posséder une nouvelles force de vente, par opposition aux
modèles de réseau et d'échange dans lequels
les marchands se partagent les affiliés.
Comment
attirez-vous les affiliés ?
Nous avons un site de recrutement très efficace, affiliaterecruiters.com,
et nous développons une nouvelle technologie avec Netopia,
qui permet à un affilié de simplement déplacer
et coller un lien sur son site sans avoir à effectuer aucun
travail de programmation. Pour les affiliés, c'est beaucoup
plus facile.
Quel
est le projet le plus important de Be Free à l'heure actuelle
?
Nous venons de finaliser l'acquisition de la société
Trivida pour un montant de 175 millions de dollars. Avec cette
société, nous achetons un moteur de personnalisation.
Désormais nous allons pouvoir déterminer quel produit
vous souhaitez acheter en fonction de votre comportement sur le
web. Ces données vont bien entendu nous permettre d'aider
les marchands. Avec ce moteur d'analyse, nous pouvons proposer
à chaque affilié la promotion qui lui correspond
le mieux. L'efficacite de la promotion sera donc plus grande et
le taux de conversion en ventes ou prospects sera amélioré.
Quelle
est l'importance de l'affiliation aujourd'hui? Quelle proportion
d'un budget marketing doit y être consacrée?
L'affiliation est le moyen le moins coûteux pour acquérir
des clients. Les recherches récentes montrent que 13 a
17% des revenus en ligne des marchands proviennent de l'affiliation,
et que cette proportion augmentera jusqu'a 20% ou 25% dans les
années a venir. En se basant sur ces chiffres on peut dire
que 20% du budget marketing devrait être consacré
à l'affiliation.
Quelles
sont les étapes à suivre pour un marchand qui souhaite
mettre en place un programme d'affiliation ?
Il faut commencer par contacter Be Free ! Le marchand est confronté
à des decisions telles que fixer la rémunération
des affilies, mettre en place la communication, définir
les buts du programme...Nous pouvons le conseiller sur tous ces
sujets, puisque notre équipe connait bien les meilleures
pratiques de ce domaine.
Quels
autres outils que l'affiliation les marchands peuvent-ils utiliser
pour améliorer l'acquisition et la fidélisation
de leurs clients ?
L'email est un outil très important, également basé
sur la performance, et offrant de grandes possibilités.
L'email marche très bien, en particulier en conjonction
avec un programme d'affiliation.
Quelle
tendance remarquez-vous à l'heure actuelle sur le marché
du marketing online ?
Il y a un an, tout le monde me demandait "Qu'est-ce que l'affiliation
?". Maintenant tout le monde me demande "En combien de temps pouvez-vous
demarrer notre programme?" Les sociétés internet
ont commencé par dépenser beaucoup d'argent à
la TV et à la radio, et sans doute que ça marche,
mais l'efficacité de l'affiliation est bien plus grande
si on compare les coûts de ces différentes méthodes
de promotion.
Vous
ne craignez pas qu'une saturation similaire a celle de la radio
ou la TV atteigne les programmes d'affiliation? Le nombre d'affiliés
n'est-il pas limité?
Non, je refuse de parler de saturation, en 1999 il n'y avait que
17% des marchands qui utilisaient l'affiliation. Bien sûr
il devrait y en avoir 100% ou presque! Et du coté des affiliés,
il y avait 800 millions de pages sur le web en 1999, tandis que
d'ici la fin de l'an 2000 il y en aura 8 milliards !
Quels
sont pour vous des modèles de stratégie d'affiliation
réussie ?
C'est un marché encore débutant, avec beaucoup de
choses à faire. Beyond.com, BN.com (Barnes & Noble), Reel.com,
ou encore Fogdog pour le sport... font un travail formidable.
Quelle
est votre perception du marché de l'Internet en Europe
?
Nous avons pu obtenir une certaine expérience du marche
européen grâce à notre partenariat avec Bertelsmann
Online (BOL.com). Nous avons été confrontés
à des problèmes divers concernant la fiscalité,
la monnaie, les réglementations sur la protection de la
vie privée, et BOL nous a permis de comprendre ces problèmes.
Sur la maturité du marché, on peut dire qu'à
l'été 1999, lorsque nous avons mis en place le programme
d'affiliation de BOL, l'Europe avait 12 a 14 mois de retard, mais
elle rattrappe vite ce retard.
Quel
intérêt l'"affiliate marketing" vous semble-t-il
éveiller en Europe ?
A en juger par le nombre de coups de fil que nous recevons, il
est énorme ! Nous sommes littéralement inondés
par l'Europe. Désormais nous sommes prêts et nous
allons mener un développement très agressif dans
les prochains 3 à 5 mois.
Quels
sont exactements vos plans en Europe ?
L'acquisition de Trivida va nous servir dans le cadre de notre
implantation européenne. Trivida dispose déjà
d'un bureau à Londres, qui constituera sans doute notre
base en Europe. Mais courant 2000, nous établirons une
présence avec des équipes de vente et de support
technique dans la plupart des grands pays europeens, y compris
la France.
Avez-vous
entendu parler de concurrents en Europe?
Justement en France, je sais qu'il y a une société
qui se nomme Imediation, mais il me semble que leur approche est
différente, car ils vendent leur solution comme un logiciel
d'entreprise. Tandis que nous, nous hébergeons nous-mêmes
le service, nous gérons la base de données et tous
les tableaux de suivi. Globalement le marché me semble
largement ouvert en Europe, il y a probablement d'autres concurrents
plus petits mais je ne les connais pas.
De
manière générale, avez-vous l'impression
que les sociétés américaines s'intéressent
spécialement à l'Europe cette année ?
Certaines sociétés s'implantent en Europe, par exemple
eToys au Royaume-Uni, mais ça reste limité. En ce
qui concerne notre propre développement en Europe, je l'attends
de sociétés européennes qui adopteront l'affiliate
marketing.
Votre
vision de l'Internet ?
Je suis persuade que l'Internet va encore s'aggrandir considerablement.
Tout le monde voit l'Internet comme un outil vital d'information
et de communication...
Quel
est votre usage professionnel du web?
Je l'utilise beaucoup pour suivre ce que font mes concurrents,
et je suis abonné à des lettres d'information.
Et
pour votre usage personnel ?
J'achète énormément sur le net. Pour la St
Valentin, j'ai acheté des chocolats à ma femme,
de merveilleuses truffes dans un joli paquet. Je les ai achetées
sur send.com,
c'était des truffes Lindt Gourmet. Lindt n'est-elle pas
d'ailleurs une société francaise ? (Lindt est
une marque suisse, ndlr). J'ai aussi acheté mes deux
dernières voitures sur internet, je suis un aficionado
de l'automobile et j'adore consulter le site de BMW pour me tenir
au courant des dernières nouveautés!
Si
vous deviez créer une nouvelle entreprise aujourd'hui,
vous feriez quoi ?
J'ai
examiné 35 sociétés avant de me décider
a venir travailler chez Be Free, alors je ne vais peut-être
pas commencer autre chose maintenant !
Gordon
Hoffstein est diplômé de l'Université du Massachusetts
et a obtenu son MBA à Babson College. Avant de devenir
PDG de Be Free, il fonde MicroAmerica Inc, puis PCs Compleat (vente
directe de produits et services pour PC) dont il négocie
la vente a CompUSA en 1996. Il est reconnu comme l'un des pionniers
de l'industrie du PC aux Etats-Unis. Finaliste du "Prix de l'Entrepreneur
de l'année" en 1989, 1994, et 1995, il a également
siégé au comité de direction de nombreuses
sociétés: AGS Computers (NYSE), Merisel Inc. (NASDAQ),
Send.com.