Interviews

François Hurel
Délégué général
APCE

L'APCE (l'Agence pour la création d'entreprises) vient de réaliser une étude qualitative et quantitative baptisée "Start-up en France, des mythes aux réalités". Trois critères ont été imposés pour la sélection des entreprises étudiées. Les start-ups devaient avoir été créées entre 1995 et 1999, être innovantes (secteur d'activité, méthodes de commercialisation, mode de développement) et connaître une croissance rapide (chiffre d'affaires, capital). Sur les 800 questionnaires adressés au panel d'entreprises sélectionnées, une centaine de questionnaires ont été retournés. François Hurel, délégué général de l'APCE, commente les résultats.

Propos recueillis par Catherine Pinet le 15 juin 2000 .

JDNet. Quelle était votre vision des entrepreneurs de start-up avant de réaliser cette étude?
François Hurel: Je m'imaginais simplement des jeunes habillés en jeans, en train de bricoler dans un garage, avec une idée géniale en tête !  

L'étude montre en fait une image contraire...
Effectivement, elle révèle que les créateurs ne sont pas des jeunes gamins, puisque pratiquement 60% d'entre eux ont entre 30 et 45 ans. Et ils sont, pour la plupart, des anciens salariés.

Les entrepreneurs sont majoritairement issus d'écoles supérieurs. Cela vous surprend-t-il?
Au début, cela m'a surpris. Mais en y réflechissant, c'est d'une implacable logique. Pour réaliser un tour de table, il faut être crédible et avoir un réseau. Il faut donc avoir des fréquentation dans une école ou d'anciens collègues.Par contre, j'imaginais les entreprenautes comme des requins fortunés cherchant de l'argent. L'étude montre que leur motivation n'est pas uniquement financière. Ils parlent de "challenge", de "laisser une trace personnelle" et de "désir d'indépendance".

3 % des entreprenautes sont des femmes. Cela ne reflète pas une parité à toute épreuve... 
Il faut nuancer. Nous n'avons pas réaliser une étude scientifique, mais nous avons étudié les tendances lourdes. Il y a sûrement plus de femmes entreprenautes dans les autres tranches d'âge. Les femmes créatrices d'entreprises "classiques" sont aujourd'hui 30%. Raisonnablement, la proportion est au moins égale sur le Net. Mais la parité en prend en coup. C'est clair!

Curieusement, alors qu'on imaginait que les activités des start-ups étaient délocalisées au niveau international, on s'aperçoit que, pour 80% d'entre elles, leur zone d'influence est en France.
C'est une claque aux idées recues. Il faut stopper notre esprit gaulois d'auto-flagellation. Non, tous nos cerveaux ne fuient pas à l'étranger! Les français ont tendance à compter les entreprises qui s'exportent, et non celles qui arrivent en France.

Quel est l'état d'esprit des entreprenautes?
Leur attitude est contradictoire. A la télévision, ils sont tristes et expliquent en long et en large leurs problèmes et le manque d'aide du gouvernement. Alors que lors d'un précédent sondage, nous avions observé qu'ils ont pratiquement tous affirmé que "s'il fallait retenter l'aventure, je le referrai."

Existe-t-il une réelle différence entre les entreprises classiques et les start-ups?
Une différence majeure : les start-ups n'ont aucune vocation à la pérennité. Dans la plupart des cas, les entreprenautes les créent, puis veulent les vendre pour lancer une autre structure. D'autres, au contraire, veulent "prendre le temps de vivre". Mais aucun ne voit plus loin que l'entrée en bourse. La moitié des entreprenautes l'envisage dans un délai inférieur à 5 ans. Les start-ups montrent une absence totale de patrimonialité, contrairement aux dirigeants des structures classiques, qui veulent passer le relais à leurs enfants. La conséquence logique est que les start-ups se trouvent plus rapidement confrontées à des problèmes quant à la gestion de la croissance. Elles vivent en 1 ou 2 ans ce que d'autres mettent 4 à 5 ans à atteindre.

Le lancement d'un start-up est-il très différent de celui d'une entreprise classique?
Je pensais que les start-ups qui se lançaient étaient déjà sur le point de boucler un tour de table. En réalité, elles débutent comme des entreprises "classiques", avec des investissements personnels et familiers. Puis la petite entreprise devient une start-up qui grossit à vitesse grand V. Près de la moitié d'entre elles ont un taux de croissance de plus de 100%. Cela ne m'étonne pas.

Le fossé entre entreprises "classiques" et start-ups n'est donc pas si étendu?
L'étude montre que l'économie dite "classique" sert de fonds de développement à la nouvelle économie. Il n'y a qu'à regarder les clients des start-ups. Ce sont des grandes entreprises dans pratiquement 35% des cas et des PME/PMI dans environ 30%. L'ancienne économie fait la courte échelle à la nouvelle. Qu'on arrête de ressasser l'adage "start-ups contre sociétés issues de l'ancienne économie". Il faut comprendre les mécanismes qui permettent aux 5.000 à 6.000 start-ups qui fleurissent chaque année de progresser et essayer d'en faire bénéficier les 165.000 autres entreprises qui se créent. Pour un type d'entreprise comme pour l'autre, il faut un créateur, une idée, un environnement attentif, un réseau et de l'argent.

Portrait-robot du créateur de start-up et du créateur d’entreprise “classique”

Créateur
de start-up
Créateur d’entreprise “classique”
Homme (dans 97 % des cas) Homme (dans 70 % des cas)
De 30 à 45 ans (dans 58,5% des cas) De 30 à 45 ans (dans 63% des cas)
Études supérieures (Écoles de commerce ou d’ingénieur, universitaire) Études : 56 % ont un niveau inférieur au Bac
Issu d’un milieu aisé (Parents : cadres supérieurs, dirigeants de PME/PMI ou profession libérale) Ancien chômeur dans 47 % des cas (61% si on ajoute les “inactifs et étudiants”)
Ancien salarié, ayant fait carrière dans l’industrie ou l’informatique, durant une dizaine d’années Si salarié, 44 % étaient employé ou ouvrier
Ancien cadre supérieur ou cadre dirigeant Si salarié, 32 % cadre ou agent de maîtrise

Origine du milieu familial
des créateurs de start-up

Origine du milieu familial %
Cadre supérieur 39
Cadre moyen 19,5
Profession libérale 12,2
Fonctionnaire 7,3
Ouvrier 7,3
Agriculteur/artisan 7,3
Dirigeant PME/PMI 7,3


Capital social des start-ups

Le capital social
Lors de la création en %
Aujourd’hui en %
50.000 francs 36 14,6
entre 50 et 100.000 francs 9,2 7,3
entre 100 et 200.000 francs 9,8 12,2
entre 200 KF et 1 MF 37 43,9
entre 1 et 4 MF 4 12,2
plus de 4 MF 4 9,8

Activités des start-ups

Activité
Lors de la création en %
Aujourd'hui
en %
NTIC 34,1 34,1
Autres 22 24,4
services 12,2 12,2
marketing 9,8 9,8
informatique 9,7 7,3
R et D 7,3 7,3
biotechnologies 4,9 4,9

Eléments tirés de l'étude APCE: "Start-up en France, du mythe aux réalités".





 

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