INTERVIEW
 
Président
B2L-BBDO
Godefroy Jordan
"Titre"
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Le pôle e-business de BBDO Paris fait figure de pionnier dans le secteur des agences interactives. Créée en 1996, B2L est en effet l'une des plus anciennes agences françaises. En 2001, la société n'en a pas moins souffert du contexte général du marché. Après une croissance de 113% entre 1999 et 2000, la web agency a dû se contenter d'une stabilisation des revenus en 2001 avec seulement 3% de croissance (18,4 millions d'euros). Godefroy Jordan, président de B2L-BBDO, revient sur cette année difficile et dresse sa stratégie pour 2002.
27 février 2002
 
          

JDNet. Avec seulement 3% de progression en 2001, B2L limite la casse ?
Godefroy Jordan. C'est sûr que ce fut une année de consolidation et de stabilité avec une croissance très faible. Nous avons aussi dû gérer une restructuration initiée au début de l'année 2001 et qui a forcément mobilisé une bonne partie de nos énergies. Cette restructuration s'est terminée à la fin du troisième trimestre, donc maintenant nous sommes en ordre de bataille. Désormais, nous sommes organisés autour de trois pôles représentant chacun à peu près un tiers des honoraires : web consulting, web production et web animation.

Qu'entendez-vous par restructuration ?

Le point majeur a été la simplification des entités car avec le développement du marché, nous nous étions diversifiés dans beaucoup de métiers avec à chaque fois des micro-équipes par spécialité d'offres. Nous avions quelque chose comme huit ou neuf départements, l'idée était donc de simplifier pour rendre les choses plus claires pour le client. Il a aussi fallu tenir compte du fait qu'il y a eu un rééquilibrage des activités en matière de services, c'est-à-dire que nous avons été moins actifs dans la publicité sur Internet et dans la production de sites mais plus actifs dans l'accompagnement marketing des clients et le consulting. L'animation de site a également été une activité en hausse chez B2L. Enfin, il ne faut pas non plus écarter le fait qu'il y a eu des départs et des licenciements au cours de cette restructuration. Nous avions culminé à plus de 200 personnes en 2000 et aujourd'hui, nous sommes un petit peu moins de 150.

Que devient la fusion entre B2L et la SSII Cyber Network engagée en 2000 ?
Il n'y a finalement pas eu de fusion opérationnelle avec Cyber Network parce que la spécificité de leur marché, c'est-à-dire d'avantage l'intégration, réseaux télécom et sécurité, est une approche industrielle totalement différente de la mise en oeuvre d'applications interactives. Entre Cyber Network et B2L, il y avait à la fois des différences culturelles et des différences commerciales puisque nous faisons plutôt du conseil avant-vente, en amont, alors que Cyber Network est beaucoup plus sur de l'assemblage de solutions packagées. Il y avait aussi des différences sur les montants moyens par projets, qui sont beaucoup plus importants que les nôtres, et puis il y avait aussi des différences sur la conduite des projets. Au finale, il était assez difficile de faire une intégration en une société unique.

Concernant votre nouvelle organisation en trois pôles, cela signifie que vous voulez toujours proposer une chaîne de valeur complête à vos clients ?
Effectivement, nous continuons à être des gens qui conseillent et mettent en oeuvre les choses qu'ils ont conseillées. Mais nous pensons qu'aujourd'hui, les clients ne veulent pas une chaîne de valeur morcelée avec des gens qui disent ce qu'il faut faire, d'autres qui disent comment et encore d'autres qui le font. Ils préfèrent s'adresser à un type d'interlocuteur unique. D'ailleurs, selon moi, parmi les agences web, celles qui comme nous ont gardé un positionnement généraliste (Fullsix, par exemple) sont celles qui s'en sortent le mieux et ont gardé une stabilité relative. En revanche, celles qui sont allées sur le marketing pur et ont quitté la production se sont retrouvées sur un marché beaucoup plus petit que prévu et celles qui se sont spécialisées sur la technologie ont vu le retour des grosses SSII. Mais, même si nous avons une chaîne de valeur assez large, nous ne sommes pas sur des projets qui touchent au fonctionnement de l'entreprise. Là, nous faisons appel à des SSII et des intégrateurs.

Alors sur quels types de projets intervenez-vous ?
Notre coeur de métier reste la partie "concept" : pour quoi faire, quelles fonctionnalités et avec quel plan d'action. Les sites que nous réalisons sont essentiellement des sites pilotées par les directions marketing et commerciale et dont la fonction principale est l'avant-vente sur des produits complexes, coûteux ou socialement impliquant en terme d'image. Ce sont des biens d'équipement (Peugeot) mais aussi des produits de luxe, de l'électronique grand public, des services financiers, des télécoms... Tout ce qui fait que l'individu va aller passer du temps sur Internet pour préparer son achat.

Et comment avez-vous évolué sur le plan de la rémunération de vos prestations ?
Les projets sont stables et fluctuent entre 100 et 200.000 euros. Pour ce qui est de la forme de la rémunération, un tiers de nos prestations reste vendu au projet. Les deux-tiers restant se répartissent pour moitié entre de la rémunération mensuelle et pour moitié sur des contrats cadres à l'intérieur desquels nous fonctionnons projet par projet. Au final, entre 60 et 70% de nos revenus sont issus d'une rémunération forfaitaire, ce qui nous assure une certaine visibilité.

Comment a évolué votre portefeuille clients en 2001 ?
Il est indéniable que le marché a été et est toujours très âpre au niveau de la concurrence sur les nouveaux budgets. Nous avons cependant la chance de faire partie des agences dont le flux de demandes reste assez important, de l'ordre de trois à cinq par mois dans notre cas. D'une manière générale, nous restons donc assez sereins d'autant plus qu'en six ans d'expérience, nous avons su fidéliser nos clients. Le meilleur exemple est Peugeot qui a été notre premier client facturé et qui est toujours présent chez nous. En 2001, nous avons aussi su gagner de nouveaux clients : Michelin, la Mairie de Paris, La Poste, Cisco...

La concurrence est toujours aussi rude ?
Cela va même en empirant ! La catégorie des acteurs de taille importante, c'est-à-dire plus de 50 personnes, s'est accrue en 2001 parce que la consolidation qui a eu lieu l'année dernière s'est faite au niveau des petits et moyens acteurs. Cela veut dire qu'il y a maintenant plus de gros acteurs. Il n'y a pas eu de concentration, en revanche. Et sur les projets de 100 à 200.000 euros, les projets sur lesquels B2L se positionne, il y a autant, si ce n'est plus, de concurrence qu'il n'y en avait il y a un an ou deux. Les clients jouent sur cette concurrence pour tirer les prix à la baisse. Nous nous retrouvons finalement sur des processus de sélection qui durent parfois deux à trois mois avec un investissement en temps très important pour finalement aboutir à des différences très ténues entre les propositions des acteurs.

Mais cette situation ne va pas pouvoir durer éternellement...
Il suffit de regarder les marchés anglais et allemand pour comprendre que nous n'avons pas encore eu en France de véritable phase de concentration du marché. En Allemagne par exemple, en septembre-octobre 2001, les numéro 1 et 4 du secteur ont fait faillite. Je ne sais pas si c'est parce que le marché français est en retard ou alors parce qu'il y a un atavisme français à toujours reporter les mauvaises nouvelles, mais je m'interroge sur la pérennité de l'ensemble des acteurs français sur un marché dont la croissance est ralentie et où il y a énormément de prestataires. Il faut d'autant plus se poser des questions que seulement 10% des prestataires sont adossés à des groupes. Il est légitime de se poser des questions quant aux 90% restant qui sont indépendants et doivent affronter cette période difficile sans bénéficier d'appuis financiers et sans pouvoir envisager de fusions/acquisitions, dans la mesure où chaque acteur a une culture d'entreprise forte et différenciée.

Comment envisagez-vous l'année 2002 dans ce contexte ?
Le marché garde une dynamique de croissance mais il reste entravé par la concurrence qui règne. Cela dit, avec notre restructuration, B2L est maintenant organisé pour résister. Nous sommes prêts à supporter une période de non-croissance tout en étant rentable. Je pense qu'en 2002, il y aura un élément déclencheur qui fera que le marché repartira. Selon moi, cet élément sera la passage du nombre d'internautes à 33-35% de la population française. Le marché aura alors une autre perception d'Internet comme un média incontournable. Il faut en fait attendre le même déclic qui a eu lieu pour les téléphones mobiles et espérer ensuite que l'histoire sera aussi belle.

Et plus précisément pour B2L ?
La demande est toujours là mais nous attendons aussi un signal fort de la part de notre groupe. BBDO n'a pas encore d'acteur interactif aux Etats-Unis. Il serait pourtant intéressant que nous entrions sur ce marché, que ce soit par un partenariat ou une acquisition. Cela montrerait clairement que BBDO croit fortement au développement de l'Internet et donc à la création d'un réseau d'agences interactives portant le même nom. Aujourd'hui, nous sommes premiers au Portugal et dans les six premiers en Allemagne mais personne ne le sait parce que nous avons tous des appellations différentes. Il serait bon restructurer un peu tout cela...

Personnellement, qu'aimez-vous sur Internet ?
Ce qui me fascine, c'est qu'il n'y a pas un produit qui soit inacessible. Il suffit d'un bon moteur de recherche pour tout trouver. Par exemple, je passe beaucoup de temps à acheter en ligne, que ce soit pour les courses, la musique ou des gagdets pour mes enfants et il m'arrive souvent de trouver des objets inconnus en France sur des sites étrangers. Evidemment, avant d'acheter, je prends soin de vérifier la fiabilité du site.

Qu'est-ce que vous n'aimez pas sur le web ?
La lenteur principalement. Je deviens de plus en plus attentif à cet aspect. Et puis je n'aime pas non plus les gros systèmes marketing de certains sites, notamment américains. Ce sont des sites où pour avoir accès à la moindre information, il faut d'abord remplir un long formulaire.

Quels sont vos sites préférés ?
Google évidemment, et puis Citadin.org pour éviter les embouteillages et calculer son itinéraire.

 
Propos recueillis par Florence Santrot

PARCOURS
 
Voir le parcours de Godefroy Jordan sur sa fiche dans le Carnet des Managers de l'Internet français.

   
 
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