Après quatre mois d'activité, ZoneJeux a déjà
attiré 100.000 membres. Exportation à l'international
oblige, la SA ZoneJeux en cours de création s'est rapprochée
du deuxième éditeur mondial de jeux-vidéo,
Infogrames. Un rapprochement naturel puisque Infosources, la maison
mère a été créée par Christophe
Sapet, co-fondateur d'Infogrames.
Fabrice Lacroix présente la deuxième version du
site qui devrait sortir en avril et envisage sereinement un avenir
proche où les éditeurs et les sites de jeux en réseaux
risquent de ne faire plus qu'un. Gameover ?
Propos recueillis par Alain
Steinmann le 18 février 2000
.
JDNet:
C'est quoi, ZoneJeux ?
C'est un site de jeu et de joueurs en réseau. Nous ne nous
focalisons pas sur le jeu mais sur la mise en relation des joueurs
et sur l'aspect communautaire. C'est dans cette optique que nous
offrons des services supplémentaires comme l'email gratuit
ou un accès Internet sans abonnement dont la particularité
est d'être branché sur le même réseau
que ZoneJeux, ce qui permet de jouer dans de meilleures conditions.
Quel
est votre business model. Avez vous un modèle américain
?
C'est difficile de nous comparer avec les sites américains.
Ils sont différents car beaucoup se sont spécialisés
et ont cherché des niches: les hard-core gamers (les
joueurs acharnés, ndlr) pour certains ou les "classic
games" pour Ten.
Le PC est déjà un segment qui ne représente
que 10 à 15% dans l'univers des jeux vidéos. Les
hard-core gamers y représentent à nouveau 10 à
15%, c'est une niche dans la niche. Pour nous, les outils dépendent
peu du jeu et il faut respecter chaque type de joueur dans son
univers. Notre stratégie vise plus à agréger
le trafic des différents joueurs. Nos sources de revenus
proviendront de la vente d'espaces publicitaires, du commerce
en direct avec TopAchat (boutique filiale d'Infosources, comme
ZoneJeux) et des opérations en direct gérées
directement par nous. Dans un an, les jeux à abonnement
nous apporterons une source de revenus supplémentaire.
Des
premiers résultats ?
Actuellement nous avons 100.000 membres. Les jeux d'échecs
réprésentent un tiers de notre trafic avec 1.000
parties par jour. Viennent ensuite Half-Life (25 à 30%
du trafic) et Age of Empires. Notre problématique est essentiellement
d'avoir une offre large et adaptée. Nous allons prochainement
proposer de 15 à 20 nouveaux jeux non cédéroms,
proche des "classic games" pour nos membres.
Vous
n'avez pas peur que les services de mise en relation soient directement
intégrés aux jeux (Starcraft, etc.) et que les joueurs
n'aient plus besoin de sites comme ZoneJeux ?
Peut être mais si ce que fournit la solution intégrée
ne vous convient pas, vous irez voir ailleurs. Je ne pense pas
qu'on puisse manipuler la population des hard core gamers. Le
trafic généré par les joueurs de classic
games, lui, va croître.
Ne
craignez-vous pas que les éditeurs accordent l'exclusivité
de tel ou tel jeu à un site partenaire ?
Ubi Soft par exemple a ouvert sa propre plate-forme de jeux et
conserve l'exclusivité de ses jeux. L'accord mondial entre
AOL et Electronic Arts va dans le même sens. Un flou se
crée mais les accords d'exclusivité entre des sites
de jeux et des éditeurs n'auraient pas de sens. A partir
du moment où il commence à tout verrouiller, un
éditeur s'interdit une visibilité et donc des ventes.
Si l'éditeur s'allie à un site qui ne fonctionne
pas bien, son jeu ne sera pas médiatisé. Et si un
site s'allie avec un éditeur qui ne sort pas de carton
pendant un an, il sera déserté. Ce n'est pas dans
l'intérêt des éditeurs ni des diffuseurs de
gérer des exclusivités. Donc, non, je n'ai pas peur.
En
vous rapprochant d'Infogrames qui vient de prendre 50% de votre
capital, vous rentrez pourtant dans cette logique, non ?
Non, nous ne sommes pas et nous ne serons pas la plate-forme de
jeu d'Infogrames. Cette alliance va renforcer notre positionnement
d'animateurs de communautés, nous aurons encore moins de
raisons de nous focaliser sur le développement. L'expertise
de veille technologique d'Infogrames nous permettra de développer
de nouveaux services très rapidement.
Votre
démarche a-t-elle un sens dans un contexte franco-français
?
Evidemment non et nous envisagions déjà l'ouverture
de déclinaisons de ZoneJeux avant notre rapprochement avec
Infogrames. Nous visions essentiellement l'Europe du Sud mais
désormais c'est à l'international que nous allons
nous développer. Nous ouvrirons en Asie, aux Etats-Unis
(en nous appuyant sur GT Interactive qui fait partie du groupe
Infogrames) et dans toute l'Europe. Selon les pays, il s'agira
d'une simple traduction du service français ou d'un produit
à part entière.
Vous
préparez une V2 du site, quoi de neuf et d'intéressant
?
Nous allons segmenter le site pour créer des communautés
un peu plus typées. Les services vont être renforcés:
la partie tournois et classements va être refondue, une
partie communautaire va apparaître avec des forums, des
listes de diffusion, un agenda qui préviendra les joueurs
lors de chaque manche d'un tournoi. Cette version devrait être
prête pour avril.
Vous
avez envie de proposer un contenu éditorial plus fort ?
Nous avons envie de faire un peu d'éditorial dans le cadre
de l'animation du site. L'éditorial est un vrai métier,
ce n'est pas notre métier, nous n'avons pas cette vocation.
Le marché est saturé et nous avons des partenariats
avec la plupart des sites incontournables (overgame et gamespot,
ndlr).
L'interface
de jeu ressemble beaucoup à celle du FAI de votre actionnaire,
Infonie. Les abonnés payants d'Infonie ne sont pas frustrés
de voir leurs services "exclusifs" distribués
sur le Net ?
Nous avons utilisé un fond technologique commun, c'est
sûr, mais tout a été réécrit.
Si vous regardez même très rapidement les deux interfaces,
vous verrez qu'elles n'ont rien à voir. De plus, l'effort
de production de ZoneJeux va permettre à Infonie de gagner
de nouveaux jeux. De toute façon, notre stratégie
en terme de production interne est orientée vers les jeux
en Java.
Comment
vous positionnez vous par rapport à vos concurrents ?
Goa est ciblé sur les hard-core gamers. C'est un bon site
très typé, à l'américaine. Nous avons
envie de continuer longtemps dans notre stratégie de neutralité
par rapport aux jeux et d'être à l'écoute
des joueurs. L'arrivée de Won.net en Europe coïncide
avec notre ouverture vers les Etats-Unis. Là encore, c'est
un site très fort avec une grande culture du jeu online
mais c'est une plate-forme de jeu, pas de joueurs. Ils n'ont pas
la culture pour développer une communauté. Nos deux
sites ne seront pas opérés de la même façon:
à nous de nous renforcer dans ce qui nous distingue.
A
quoi vous jouez sur ZoneJeux ?
Je dois vous avouer que les jeux en vue subjective me rendent
malades, donc ça me limite. Les échecs et les dames
me tentent beaucoup plus. Mais ce qui me plaît vraiment
sur ZoneJeux, c'est la discussion avant de jouer.
A
quoi vous aimeriez jouer dans un an ?
Le jeu idéal permettra de faire se rencontrer des joueurs
différents avec des principes de ligues où il faut
s'organiser en dehors du jeu. Un Ultima Online encore plus évolué.
Fabrice
Lacroix, 31 ans, est diplômé de l'ENSIMAG (Ecole nationale supérieure
d'informatique et de mathématiques appliquées de Grenoble) et
détenteur d'un Master en informatique de l'Imperial College de
Londres. Il a entamé sa carrière comme développeur système
dans la télématique. Fin 1994, il est appelé par le groupe Infosources
pour diriger la recherche et le développement du projet Infonie.
Deux ans plus tard, il prend la direction technique du groupe
Infosources. Début 1999, il participe au développement du Pôle
éditeur de sites web qui regroupe les projets Internet
du groupe. En novembre, il lance Zonejeux.com.