INTERVIEW
 
PDG
Fnac Direct
Jan Löning
"Nous sommes un magasin, pas une galerie marchande"
L'heure n'est plus aux actions d'éclat dans le e-commerce mais à la consolidation des modèles économiques en vue d'atteindre rapidement la rentabilité. Bien que dynamique, le secteur des produits culturels n'échappe pas à cette tendance partagée par Jan Löning, le PDG de Fnac.com. Si l'année 2002 se caractérise par une croissance de 65 % pour le site de produits culturels, elle rime également avec réalisme et retour aux fondamentaux commerciaux. Ce qui n'empêche pas, loin s'en faut, l'enseigne d'explorer de nouveaux territoires comme l'i-mode ou la formation en ligne. L'essentiel étant toutefois du faire du site, le 97ème magasin Fnac.
12 décembre 2002
 
          
Le site
Fnac.com
JDNet. Quel est le bilan de Fnac.com au terme de cette année 2002 ?
Jan Löning. L'année 2002 a été marquée par une forte croissance. Sur les trois premiers trimestres, notre chiffre d'affaires en ligne a augmenté de 65 %. Quant à notre panier moyen, il a augmenté de 25 %. Ces résultats sont très satisfaisants pour notre objectifs de rentabilité qui se situe fin 2003, début 2004. Nous devons évidemment continuer à faire croître notre panier moyen, car il n'est pas possible de gagner de l'argent sur l'achat d'un livre de poche. Et pour cela, nous devons augmenter la fidélité de nos clients. Car nous avons remarqué que si le montant du premier achat est de 26 euros, celui-ci croît ensuite régulièrement au fil des transactions. Sur ce point également, nous sommes confiants, puisque depuis le début de l'année 2002, le taux de fidélisation est en forte croissance. Aujourd'hui, sur 100 commandes, plus de 50 % d'entre elles émanent d'anciens clients.

Comment avez-vous obtenu ces résultats ?
Cette croissance n'a pas été tirée par les promotions. Non pas parce que celles-ci ne fonctionnent pas, mais parce que nous ne voulons pas créer de mauvais réflexes chez les internautes. Nous cherchons à construire une activité pérenne basée sur le développement de la confiance. Dans cette perspective, il nous semble plus pertinent, pour fidéliser notre clientèle, de développer des propositions attractives en termes de choix de produits, de nouveautés et de qualité de services. Aujourd'hui, fnac.com propose 100 000 produits livrables en 24 heures ainsi que des contenus variés pour aider les internautes à faire leur choix. Parallèlement, nous envoyons une fois par semaine, une mailing de présentation des nouveautés en un million d'exemplaires aux internautes ayant créé un compte sur fnac.com. Enfin, si aujourd'hui la vente sur Internet a prouvé qu'elle correspondait à un véritable modèle économique, elle génère également des coûts que l'on ne peut pas ignorer en en faisant grace aux internautes.

Ce qui explique votre politique de facturation des frais de port, notamment à Noël ...
Tout à fait. Le picking et la livraison à domicile sont de vrais services qui, pour être de qualité, ont obligatoirement un coût. C'est pourquoi, tout au long de l'année, nous n'offrons les frais de port que pour un panier d'achat de 55 euros. Pour aider à la transformation pendant les fêtes de Noël, nous avons abaissé ce seuil à 25 euros. Mais contrairement à l'année précédente, nous n'avons pas opté pour le tout gratuit. 25 euros est une valeur qui correspond sensiblement au coût d'un cadeau et qui nous permet, en interne, de couvrir nos frais.

Combien de commandes traitez-vous en moyenne par mois ?
Je ne peux pas vous communiquer ce chiffre. Je peux simplement vous dire que nos capacités de traitement de commandes en période de pointe sont de 25 000 colis par jour. Actuellement, nous sommes entrés dans des processus industriels qui nous permettent de gagner en productivité afin de pouvoir rentabiliser des paniers relativement faibles. Tout l'enjeu aujourd'hui est, dans ces conditions, de parvenir à maintenir une bonne qualité de service. Quant aux problèmes de livraison, ils sont en général minimes. Nous estimons que les incidents de livraison dus à la Poste, incluant les pertes et les erreurs de routage, représentent moins de 1 % des commandes. Pour nous, le système postal français est très performant.

Par rapport au chiffre d'affaires dégagé par un magasin Fnac, ou se situe aujourd'hui le site fnac.com ?
Sur les neuf premiers mois de l'année, fnac.com est le 23ème magasin du groupe au niveau mondial et représente moins de 2 % du chiffre d'affaires de Fnac. Pour information, nous avons actuellement 96 magasins dans le monde. Notre objectif est de devenir le 1er magasin du groupe d'ici trois ans et de représenter 10 % du chiffre d'affaires de la Fnac d'ici cinq ans. Ces objectifs nous semble assez réalistes puisqu'au mois de novembre, le site était déjà le 15ème magasin du groupe en terme de chiffre d'affaires. En matière de billetterie, nous sommes d'ailleurs déjà, le premier magasin du groupe, ainsi que depuis peu, en terme de recrutement de nouveaux adhérents.

Comment votre chiffre d'affaires se répartit entre les différentes catagories de produits que vous proposez ?
Un petit tiers de notre chiffre d'affaires est généré par la vente de livres, un gros tiers par les disques et la vidéo, le dernier tiers provenant de la vente des produits techniques. Cette répartition n'est aujourd'hui pas exactement celle que l'on constate en magasin où les produits techniques représente la moitié du chiffre d'affaires.

Les positionnements du site et des magasins sont-ils identiques, notamment en matière de politique tarifaire ?
En terme de positionnement général, il n'y a pas de différence entre les magasins et le site. Des écarts de prix peuvent parfois exister entre les magasins et le site. Ceci pour différentes raisons. D'abord parce que chaque magasin a la possibilité d'adapter un prix pour répondre à la concurrence qui existe dans sa zone de chalandise. Ensuite, parce que nous pouvons organiser sur le site des opérations ponctuelles qu'on ne retrouve pas en magasin. Et enfin, ces décalages peuvent survenir à la suite d'une mauvaise synchonisation de certaines opérations entre nos différents canaux de distribution.

Quelles sont les synergies entre les magasins Fnac et le site et quel bilan pouvez-vous en faire ?
Les synergies entre les magasins et le site sont certaines, même si elles sont difficiles à évaluer. Elles sont d'abord d'ordre qualitatives. Comme je l'ai dit auparavant, les adhésions en ligne et la billetterie fonctionnent très bien. Ensuite, on se rend compte que le site sert à préparer des achats qui sont concrétisés en magasin. Il n'est pas rare, par exemple, de voir en magasin, des clients avec des fiches produits provenant du site. Mais l'inverse fonctionne également. Par ailleurs, même si les internautes commandent en ligne leur billet de spectacle, ils viennent en magasin les retirer et en profite souvent, pour faire un tour en magasin. Côté quantitatif, le site s'appuie en grande partie sur les stocks des magasins. Notre stock de référence disponible sous 24 heures ne comprend que 2 000 références.

Vous proposez depuis quelques mois de la formation en ligne et depuis peu, un service i-mode. Comment ces deux nouveautés s'incrivent-elles dans votre stratégie ?
Nous vendions déjà de la formation en magasin, alors pourquoi pas sur Internet ? C'est un canal de vente supplémentaire. Dans le cas de la formation en ligne, notre démarche est un peu différente. Il s'agit toujours de faciliter l'accès aux nouvelles technologies et à notre savoir-faire, mais notre rôle est plutôt dans ce domaine celui d'un défricheur, car nous ne comptons pas générer de gros volumes de vente pour l'instant avec ce service. Le développement de l'Internet mobile procède de cette même logique. Nous prenons la température. Mais ce qui est important pour nous sur ce marché, ce n'est pas la technologie, mais comment se décline la relation avec nos clients à travers ce média et comment il faut le penser pour qu'il soit efficace.

Vous êtes-vous fixé des objectifs concernant l'i-mode ?
Non, absolument aucun. Par contre, en terme de trafic, nous avons dépassé mes espérances !

Quelles sont les premières tendances concernant les ventes de Noël ?
Cette année, nous nous attendons à quadrupler notre chiffre d'affaires journalier entre les mois de septembre-octobre et la semaine prochaine.

Quels seront vos principaux défis pour 2003 ?
D'abord, atteindre l'équilibre financier en poursuivant ce que nous avons commencé à faire en 2002. Nous n'envisageons pas de diversifier les familles de produits qui sont les nôtres actuellement. Nous sommes un magasin Fnac et pas une galerie marchande. Nous devrons tous les jours parvenir à gérer la croissance de manière à satisfaire nos actionnaires et nos clients.

Qu'est-ce que vous séduit le plus sur Internet ?
L'accessibilité. Internet écrase la notion d'espace. Je peux savoir tout ce que je veux sur un sujet et savoir tout ce qui se fait. Par exemple, je peux connaître en temps réel le résultats de la quatrième division de football en Allemagne

A contrario, qu'est-ce que vous détestez le plus ?
Les mirages. Les sites marchands par exemple, qui ne respectent pas les fondamentaux du commerce et qui veulent faire croire qu'ils sont sérieux.

Quels sont vos sites préférés ?
Je suis un internaute assidu de Yahoo et du Monde.

Le site
Fnac.com

Est-ce que vous achetez souvent en ligne ?
Je suis un acheteur assez assidu parce que ça marche bien. J'achète bien sûr sur fnac.com, mais aussi chez mes concurrents. C'est la meilleure manière de se rendre compte de ce qui ne va pas. J'achète également assez souvent sur Voyages-sncf, Eveil et Jeux et Ooshop.

 
Propos recueillis par Anne-Laure Béranger

PARCOURS
 
Jan Löning, 38 ans, est diplômé d'HEC. Il a commencé sa carrière professionnelle comme consultant chez Mercer Management où il est resté pendant neuf ans avant d'intégrer Redcats, le pôle VPC de PPR, où il a occupé le poste de directeur de la stratégie et du développement. Quelques années plus tard, il est devenu directeur général de Mobile Planet, une autre filiale de PPR, spécialisée cette fois dans la vente en ligne et par correspondance de matériel informatique mobile aux entreprises. Basé à Los Angeles, il a contribué au lancement de Mobil Planete en Europe. Trois ans plus tard, il est revenu en France en qualité de PDG de Fnac direct. Une fonction qu'il occupe depuis le 15 avril 2002.

   
 
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