L'ex-groupe
Hebdomag, géant canadien de la petite annonce présent
dans 17 pays, a entamé sa migration vers le Web : rebaptisé
Trader.com
au moment de son entrée en Bourse (sur le Nasdaq et au
Règlement mensuel de la Bourse de Paris), il édite
notamment en France "La Centrale". La société
qui a relancé le site de La
Centrale l'été dernier (lire l'article
du JDNet) vient de prendre une participation majoritaire dans
le site de rencontres Netclub.fr et s'apprête à lancer
un site de ventes aux enchères. Eventuellement en passant
par une acquisition.
Propos recueillis par Philippe Guerrier le 31 mai 2000 .
JDNet.
Quelle stratégie Internet globale avez-vous adopté
?
Louise Blouin MacBain. Nous avons 14 millions d'articles
en vente, soit sur papier soit sur Internet et bientôt sur
le WAP et peut-être la télévision interactive.
Pour nous, ce sont les réseaux de distribution qui comptent
pour servir nos clients. Au niveau international, Trader.com comprend
47 sites. Nous avons ouvert notre premier site en 1995 au Canada
qui s'appelait Hebdonet. Nous élaborerons des portails
locaux dans tous les pays que nous couvrons , soit 17 en "offline"
(242 titres) et 12 en "online". Pour nous, ces titres
papiers sont une force: ils sont crédibles et existent
depuis 20-30 ans. Aux Pays-Bas, par exemple, nous sommes les premiers
devant QXL pour les ventes aux enchères. Nous sommes présents
au Canada et en Australie pour ce type d'activité. Nous
lançons un site d'enchères en Espagne. Pour nous
l'Internet, c'est comme un géant du minitel, support sur
lequel nous avons d'ailleurs beaucoup de succès en France.
Nos concurrents directs sont eBay, Ricardo et QXL.
Quelle
structure développe l'Internet au sein de Trader.com ?
Nous avons actuellement près de 400 personnes qui travaillent
sur Internet. Il y a des équipes décentralisées
dans les différents titres mais également une équipe
de développement technologique en France. Je trouve que
c'est un pays où la formation est extraordinaire. C'est
d'ailleurs là que nous avons notre siège.
Vous
misez sur la complémentarité web/papier ? C'est
primordial. Les investisseurs aiment bien cette complémentarité
qu'ils trouvent rassurante. Et nous estimons que l'Internet est
beaucoup plus rentable que le suppot papier. Nous ferons beaucoup
plus de marges d'ici un an et demi sur Internet que l'on en fera
via le papier.
La
vente aux enchères est votre axe prioritaire sur Internet.
Pourquoi pas les petites annonces classiques ?
La
notion de petites annonces va disparaître dans notre vocabulaire.
Nous représentons la transaction, qui comprendra éventuellement
des frais et des commissions.
Quels
résultats obtenez-vous ?
En terme d'audience, nous avons enregistré 40 millions
de pages vues en décembre 99 sur nos 47 sites. Aujourd'hui,
nous en comptons le double. Nous avons investi entre 6 et 7 millions
de dollars sur le marketing, c'est très peu. Cette année,
le montant devrait être de 30 millions de dollars autour
de la publicité-promotion. D'ici trois ans, nous comptons
injecter 200 à 250 millions d'euros dans nos activités
Internet.
Lorsque l'on regarde votre chiffre d'affaires d'affaires 99, on
se rend compte que les activités Internet représentent
très peu par rapport au papier. Comment comptez-vous réajuster
le tir ?
Fin 99, le poids des activités en ligne n'est pas important
car nous avons décidé d'établir en premier
lieu nos sites dans les différents pays avant de monter
en puissance pour devenir leader. Maintenant, cette année,
au niveau du premier trimestre 2000, nous avons augmenté
nos revenus "online" de 80% par rapport à la
même période de 1999 et de 30% pour le "offline".
Nous devrions tirer 15 à 20 millions d'euros du "online"
dès cette année et 50 millions d'euros en 2001.
Comment
s'est passé votre introduction en Bourse?
Nous avons introduit 15% de notre capital en Bourse.
Nous avons levé à cette occasion environ 357 millions
de dollars. Notre valorisation est actuellement située
entre 1,3 et 1,6 milliard d'euros, en fonction du cours. Actuellement,
compte tenu de la déprime bourisère, nous sommes
en-dessous de notre cours d'introduction (30 dollars, actuellement
entre 13 et 17). Nous avons deux actionnaires privilégiés:
la CGIP [la holding financière dirigée par Ernest-Antoine
Seillière, président du Medef, ndlr] qui détient
29% du capital de Trader.com et les employés.
Est-ce
que vous vous considérez comme une "dotcom" ?
Je suis des deux côtés, "offline" et "online".
C'est ma richesse. C'est plus avantageux. Moi, je peux avancer
plus vite car je détiens les ressources du "offline"
que je peux exploiter pour Internet. Je remarque que les investisseurs
parient d'ailleurs moins sur les sociétés Internet.
Quels
sont les sites les plus rentables ?
C'est
le Canada
avec son bouquet de sites (Autotrader, etc.). Si l'on prend par
pays en terme d'audience, ce sont la France et l'Espagne.
Revenons
sur vos activités en France : pourquoi avoir pris une participation
de 51% dans le site de rencontres Netclub.fr ?
Ca complète notre offre de produits. Nous avons déjà
une rubrique "mariages" dans La Centrale. Nous avons
un équivalent en Russie et en Espagne. Trader.com sera
l'endroit où vous pourrez venir pour faire beaucoup d'achats.
Les rencontres sont un service supplémentaire que nous
rendons.
Vous
êtes satisfaits des version web de La Centrale et J'annonce
?
Oui, nous avons beaucoup de trafic et un potentiel énorme
avec une équipe formidable. Avec La Centrale, nous étions
déjà leader avec le papier. Avec le "online",
nous le serons également.
Le
site immobilier Nexdom n'a-t-il pas un handicap de départ,
avec sa marque qui n'est pas installée ?
Nexdom est en voie de développement. Le site s'appuie sur
la base de données de la Fnaim. Il va bénéficier
d'une place sur le portail Trader.com. C'est important pour développer
sa notoriété. Je pense que l'audience va augmenter
via notre portail, trader.com. Il y a treize portails nationaux
accessible via ce site, qui reprend toute l'offre des sites: immobilier,
automobile, emplois, etc. C'est l'effet boule de neige. C''est
un peu la stratégie d'Amazon, qui rajoute de nouveaux services
au fur et à mesure et qui se diversifie.
Vous
avez d'autres projets en France ?
Nous allons ouvrir dans quelques semaines un site de vente aux
enchères. Nous regardons si éventuellement nous
pouvons procéder à un rachat.
Quel est votre site d'information favori ?
Le "Wall Street
Journal". Mais je vous avoue que j'ai peu de temps pour
consulter les sites d'informations. Et je regarde ce que font
nos concurrents.
Quels produits achetez-vous sur Internet
?
Des lithographies.
Qu'aimez-vous sur Internet ?
Chercher de l'information et de la documentation pour mes enfants.
Qu'y détestez-vous ?
Le fait que les services soient éparpillés.
Présidente
de Trader.com, Louise T. Blouin MacBain a fondé la société
en 1987 avec son époux, John H. MacBain. Elle est ancienne
élève de la Harvard Business School.