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Quel est aujourd'hui le poids de Sony Ericcson sur le
marché du mobile ?
Bruno Morel. Au niveau mondial, notre part de
marché est d'environ 5 % avec un volume
de ventes de 11 millions de terminaux sur le premier
semestre 2002. En France, où nous nous appuyons
sur une structure de 25 personnes, nous captons 8 %
du marché des téléphones mobiles.
Comment
sont orchestrés les développements et
les nouvelles applications mobiles dans la structure
Sony Ericsson ?
Notre programme de développement s'appuie sur
un plan baptisé MIBN pour Mobile Integration
Business Model. Nous y gérons, au niveau mondial,
toutes les innovations. Trois axes principaux y coexistent :
l'entertainment, qui comprend notamment les sonneries
et les jeux, les applications images, c'est-à-dire
la transmission de photos, et la connectivité
Bluetooth, pour permettre aux terminaux d'être
reliés et de dialoguer avec leur environnement.
Quels
sont les pays sur lesquels le groupe est le plus en
pointe ou le plus vigilant en matière d'innovations ?
Sur le marché du mobile, le Japon est évidemment
un pays précurseur notamment sur toutes les applications
son et image. Mais c'est un marché très
spécifique : une réussite sur le
Japon ne garantit en rien un succès à
l'international. Pour nous, la zone européenne
reste le marché le plus stratégique. C'est
une zone très structurée, avec des opérateurs
forts et des régulateurs, qui dispose d'un potentiel
de développement encore important. Concernant
les Etats-Unis, nous sommes en revanche sur un marché
très éclaté où les SMS viennent
tout juste d'être lancés.
Après
le succès de la génération GSM,
la téléphonie mobile européenne
s'ouvre aux applications plus évoluées :
i-mode, SMS surtaxés, MMS... Quels sont les enjeux
de cette nouvelle étape ?
Le
marché européen du mobile a changé
de courbure dans son évolution : la phase
de conquête des nouveaux abonnés s'essouffle.
Nous entrons désormais,
pour les constructeurs et les équipementiers,
dans une phase de renouvellement et, pour
les opérateurs, dans
une phase de développement des revenus.
Comment
négocier ces nouvelles phases ?
Avec les nouvelles applications mobiles, l'idée
est d'assurer une rotation sur le parc des terminaux
et, pour les opérateurs, de tirer l'ARPU (Ndlr
: Average Revenue Per User, revenu moyen par abonné)
afin d'assurer une progression du chiffre d'affaires.
La consommation téléphonique standard,
c'est-à-dire la voix, ne peut être une
source de croissance permanente tant sur le plan technologique
que sur le plan financier, à moins d'augmenter
sans cesse le prix des forfaits. En revanche, les nouvelles
applications créent des usages et des besoins
additifs, donc des revenus supplémentaires. Au
Japon, les opérateurs ont par exemple vu leur
ARPU augmenter d'un tiers avec le développement
des MMS.
Mais
avec le Wap, les opérateurs européens
avaient déjà mené une première
tentative dans ce sens qui s'est transformée
en échec...
C'est
vrai, mais le Wap a concentré plusieurs erreurs
fatales : la chaîne de valeurs constructeurs-opérateurs-éditeurs
n'était pas en place et la communication opérée
sur ce nouveau support a dérivé dans des
excès "technoïdes". La nouvelle
génération de services qui arrive aujourd'hui
a compris ces erreurs et privilégie une approche
par les usages. Le SMS a été un merveilleux
cas d'école pour comprendre cette logique commerciale
en devenant, quasiment seul, un succès alors
qu'il végétait depuis des années
dans les terminaux. La transmission de photos, le chat
mobile ou la réception des e-mails depuis un
téléphone portable sont des fonctions
très précises, délimitées,
et qui répondent à une demande immédiate
plutôt qu'à un scénario de développement
hypothétique.
Pour
devancer ces nouveaux usages, quelles pistes explorez-vous ?
Elles
sont multiples, mais la plus immédiate est celle
des terminaux équipés d'un appareil photo
puis d'une caméra. Nous travaillons également,
grâce à des accords avec Palm, sur la logique
de rapprochement PDA-téléphone qui offre
des perspectives intéressantes notamment dans
l'univers professionnel. Avec l'appui de Sony, nous
sommes très sensibles à la logique entertainment
avec des terminaux capables de lire les fichiers MP3
ou de télécharger des jeux. Enfin, le
dernier grand chantier concerne les débits avec
le déploiement de terminaux 2,5G et 3G capables
d'offrir des applications multimédias très
pointues.
Cet
éclectisme dans les applications traduit-il une nouvelle
stratégie commerciale ?
Tout
à fait : le marché sort peu à
peu du terminal standard. Nous allons vers une segmentation
des produits selon les attentes des consommateurs. Cela
passe, par exemple, par des téléphones-consoles
de jeu pour les jeunes et des téléphones-PDA
tout-en-un pour les professionnels nomades.
Quelles
sont vos relations avec les opérateurs sur ces
développements ?
En
France, nous travaillons avec les trois opérateurs
présents. Nous ne voulons pas être labellisés
par un opérateur en particulier. Pour les nouveaux
développements, chaque opérateur établit
son calendrier et ses priorités sur les lancements
commerciaux de services qu'il souhaite opérer.
A partir de ce moment-là, un dialogue se tisse
entre l'opérateur et les constructeurs de terminaux
mobiles pour arrêter un plan de marche en fonction,
notamment, de la maturité de la technologie.
Dans le cas des terminaux MMS, nous sommes par exemple
sur un plan de marche qui s'établit sur une dizaine
de mois de développement avant la commercialisation
effective. Il s'agit d'une relation commerciale classique :
l'opérateur a besoin des constructeurs pour proposer
des terminaux compatibles à ses abonnés
et les constructeurs ont besoin de l'opérateur
pour écouler leur nouvelle production.
Mais
ce sont les opérateurs qui fixent les prix de
ces terminaux grâce aux packs et aux programmes
de fidélisation par renouvellement...
Le
"pricing" des opérateurs sur les terminaux
dépend de leur propre volonté commerciale.
En amont, nos négociations commerciales portent
sur les volumes écoulés et sur la cadence
de production nécessaire. En aval, les opérateurs
choisissent, ou non, de mettre en oeuvre des tarifs
agressifs en subventionnant plus ou moins les terminaux.
Pour un même modèle de téléphone,
les prix proposés en Europe peuvent varier du
simple ou double selon l'opérateur.
Avec
le développement des nouveaux services, n'envisagez-vous
pas de prendre pied dans le domaine des contenus ?
Très clairement ce n'est pas notre
métier, sauf au travers de partenariats notamment
avec Sony Pictures et Sony Music Entertainment. Nous
préférons nous concentrer sur la conception
et la production de terminaux. Le mélange des
genres, qui a été très à
la mode entre 1998 et 2000, a ses propres limites. On
ne peut pas être à la fois constructeur,
opérateur et éditeur. Les opérateurs
eux-mêmes l'ont compris en multipliant les partenariats.
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