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PDG
Universal Music Group |
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Pascal
Nègre
"Titre"
Après l'audiovisuel,
la musique est le deuxième centre d'intérêt
très porteur du rapprochement Vivendi-Canal Plus-Seagram.
Des projets concrets commencent d'ailleurs à naître
autour de cette combinaison. Universal
Music dispose de l'un des plus grands catalogues de musique
du monde (34,32% de part de marché sur le secteur du
disque en France). Parallèlement au phénomène
Napster et MP3.com, Pascal Nègre regrette aujourd'hui
que les start-ups négligent l'aspect des droits liés
aux artistes dans leurs "business plan".
Rencontre.12
octobre 2000 |
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JDNet. Quels projets Internet envisagez-vous dans le
cadre du rapprochement Vivendi-Canal Plus-Seagram ?
Pascal Nègre : Nous
avons un système protégé de téléchargement
payant baptisé BlueMatter,
installé aux Etats-Unis depuis septembre et qui devrait
arriver en France d'ici janvier 2001. On peut télécharger
non seulement l'extrait musical mais aussi les paroles, des
images, des photos, etc. Nous allons également lancer
un bouquet de radios et développer un système
de juke-box virtuel pour accéder à une multitude
de tubes que l'on peut écouter en "streaming".
Tous ces développements devraient être prêts
d'ici l'été 2001. Nous réfléchissons
également à des avant-premières en terme
d'écoute que nous pourrions monter avec Canal Plus ou
SFR. C'est un partenaire avec lequel nous avions commencé
à parler en janvier dernier, c'est-à-dire bien
avant la fusion. Nous
attendons beaucoup du développement de l'Internet mobile.
Le portail Vizzavi sera très utile.
Etes-vous satisfait du site UniversalMusic.fr que vous avez
lancé au printemps dernier ?
Globalement
oui. C'est certainement le site le plus abouti dans le secteur
et nous réalisons un million de pages vues par mois.
Universalmusic.fr va passer à la phase 2, avec le développement
de sites d'artistes comme celui de Johnny Halliday, en cours
de refonte, ou de Florent Pagny. Nous avons une pléthore
de projets dans ce sens.
Madonna (rattaché
à BMG) a sorti un clip pour le support Internet. C'est
une démarche qui vous inspire ?
Björk,
sans le faire exprès, vient de sortir un clip pour Internet.
Le CSA a interdit la diffusion de son clip à la télévision
car il comprend trop d'images extraites de son dernier film.
Pas de pot ! Par conséquent, nous allons le diffuser
sur notre site.
Estimez-vous
qu'il est possible de monter une communauté musicale
avec Club-Dial tout comme France Loisirs souhaite le faire autour
des livres ?
Oui,
sachant que Dial ne fait pas que de la musique. Dans les semaines
qui arrivent, on va lancer un nouveau site pour tous les artistes
non signés. Ils pourront s'inscrire et leurs maquettes
seront mises à la disposition du grand public en téléchargement.
Les internautes pourront donner leur avis. Si ça marche
bien, les artistes pourront approfondir leur relation avec Universal.
Sous
quel nom va être développé ce service ?
Vous
voulez un scoop ou quoi ! Ca va être imminent.
Vous
ne seriez pas intéressé de prendre des participations
dans des start-ups françaises ?
Franchement,
je n'en ai pas vu une se dégager du lot. J'ai souvent
l'impression que les start-up qui ont été montées
autour de la musique ignorent les bases de notre métier
et en premier lieu les droits des auteurs, éditeurs et
producteurs. Secundo, elles ignorent quel travail est réellement
réalisé par une maison de disque. Il faut être
un âne pour imaginer que les artistes puissent s'affranchir
de nous. Nous ne sommes pas qu'un distributeur. Il y a un vrai
couple de travail, une notion de savoir-faire.
Des
artistes américains ont pourtant essayé de s'affranchir...
Public Enemy est effectivement parti. Prince, qui se sentait
esclave des maisons de disque, a essayé mais il a re-signé
ensuite avec une autre maison de disque. Aux dernières
nouvelles, il est content. Mais depuis, il ne vend plus de disques.
Mais ça c'est une autre histoire...
En
grande majorité pour le moment, les artistes viennent
toujours vers nous. Globalement, ils s'inquiètent de
la diffusion gratuite de leurs oeuvres sur Internet.
Ne
trouvez-vous pas que les grandes maisons de disque ont adopté
une démarche trop prudente vis-à-vis de l'Internet
?
Prudente, pas tout à fait. Nous ne sommes toujours que
dans la phase 1 de l'Internet. On attend toujours la révolution
grand public de l'Internet. Nous avons juste besoin d'être
positionnés sur Internet avant deux ans. J'ai connu la
période des radios libres au début des années
80. Internet, ça va être la même chose. Il
est vrai que, dans notre secteur, nous avons été
particulièrement gâtés avec le MP3, qui
devait servir en premier au cinéma. En même temps,
c'était plutôt excitant. MP3 est l'un des premiers
mots tapés sur les moteurs de recherche. Il a fallu que
nous trouvions du temps pour développer des systèmes
de téléchargement sécurisé sous
la norme SDMI.
Avec
l'arrivée de Napster, vous n'avez pas été
débordé ?
Non, c'est un système pirate, qui permet des échanges
de fichiers MP3. Cela nous a au moins prouvé que les
internautes étaient intéressés par ce type
de juke-box. Mais la musique sur Internet sera payante ou ne
sera pas. Il faut savoir que dans le monde, un disque sur trois
est une copie pirate. Là, avec Internet, on a vu une
nouvelle génération de pirates. Ceux-là
sont cotés à Wall Street. Ce sont les mêmes.
Il y a eu tout un discours plutôt sympathique autour de
Napster, particulièrement en France. Il permet à
tout le monde de ne pas respecter les droits de la propriété
intellectuelle et industrielle. J'estime que le coeur du débat
sur la musique en ligne est autour de ces droits sur Internet.
N'auriez-vous
pas été tenté de prendre une participation
dans Napster pour mieux contrôler son essor ?
Justement,
nous voulons que Napster ferme afin que nous puissions mettre
en place notre propre système mais légal.
Napster
n'est pas si sympathique que ça. La société
a attaqué le groupe Offspring car ses membres avaient
imprimés des tee-shirts aux couleurs de Napster. Et puis,
on met souvent l'aspect communautaire en avant mais c'est quoi
le "business model" derrière. La publicité
lors des téléchargements ? Quel mépris
vis-à-vis des internautes.
On serait juste bon
à être des panneaux publicitaires. Napster va fermer.
Ils vont nous faire un gros chèque et ils vont se calmer,
comme MP3.com.
Pourquoi Universal Music n'a pas trouvé un accord avec
Michael Robertson, PDG de MP3.com, comme les autres "majors"
?
Nous
avons été les seuls teigneux à ne pas céder.
Nous sommes devant un cas de piraterie réalisée
sciemment. Pourquoi devrions-nous faire un deal d'un million
de dollars alors que nous allons en récupérer
250 millions par la voie de la justice ? Et puis, dans cinq
ans, nous parlerons du MP3 comme du 78 tours. Nous allons nous
développer sur un format de qualité supérieure
et qui sera en plus protégé.
Vous
ne pensez pas qu'il y a un faux débat du piratage sur
Internet. La source de piraterie vient du support CD...
Oui.
Mais maintenant soyons honnêtes... On peut copier la musique
CD sur des cassettes. Je suis persuadé que l'on peut
monter un système de sécurité autour du
MP3 qui empêche de copier les fichiers.
Qu'en
pensez-vous des accords Sacem sur le "webcasting"
et le téléchargement ?
La
Sacem a publié un accord sur les radios en ligne. Il
existe donc maintenant une base de travail. Pour la partie "téléchargement",
un accord global (BIEM-IFPI) a été signé
avec les sociétés de droits d'auteurs autour de
la musique, renouvelable tous les trois ans. J'ai vu que FranceMP3
avait signé un accord spécifique avec la société
de droits d'auteurs. Il ne correspond pas à celui que
nous payons actuellement. C'est très bizarre. Je pense
que la Sacem est très prudente car ce serait dangereux
de fixer des mauvaises règles au départ.
L'accord
sur le "webcasting" fait bondir certaines radios en
ligne...
Si
c'est pour contester le minimum garanti et un pourcentage de
chiffre d'affaires, ça ne tient pas debout. On en est
au début de l'application de ce barème. Il est
normal de payer les droits sur la musique. Ceux qui n'ont pas
prévu cet aspect dans leur "business model"
n'ont qu'à fermer leur porte. On a l'impression que le
fait de diffuser de la musique sur Internet, c'est gratuit.
Non, il faut payer la musique.
Vous
avez un balladeur MP3 ?
Non,
j'écoute peu de musique avec un balladeur. Plutôt
dans ma voiture ou au bureau.
Vous
achetez de la musique en ligne ?
Non,
lorsque je veux acheter un CD, je me rends dans un magasin.
Ca me permet de voir comment sont exposés les CD. Mais,
naturellement, je regarde sur Internet ce qui se fait.
Qu'aimez-vous
en général sur Internet ?
La musique et le rugby. On sponsorise
le Stade français. Le site du club est vachement bien.
J'aime bien la sculpture et la peinture. J'utilise
souvent Yahoo
et le méta-moteur Copernic.
Que
détestez-vous ?
90% des service sont pour les PC
et j'ai un Mac. C'est énervant. Je trouve également
que l'Internet n'est pas assez simple. Je pense que le développement
de l'Internet mobile et de la télévision interactive
donneront lieu à la réelle révolution grand
public.
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Propos recueillis par Philippe Guerrier |
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PARCOURS
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Pascal Nègre, 39 ans, a été animateur
de radios libres dans la période 1981-1985. Il est devenu
ensuite attaché de presse de BMG (1986-1987) puis directeur
de promotion chez Columbia (un label CBS) entre 1988 et 1990.
Il rejoint par la suite le groupe Polygram au poste de Directeur
général de Barclay puis d'Island (automne 92)
avant d'assurer la supervision de PhonoGram (printemps 1994).
En novembre de la même année, il est nommé
à la présidence de PolyGram Musique et prend parallèlement
le poste de Directeur général adjoint de PolyGram
France. Pascal Nègre est PDG d'Universal Music Group
depuis décembre 1998 (date de rachat de PolyGram par
Universal). Il a récemment été nommé
Vice-président d'Universal Music International pour l'Afrique
du Nord et le Moyen-Orient. Il assume actuellement la présidence
de la SCPP (société civile pour l'exercice des
droits des producteurs phonograhiques). |
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