Interviews

Jean-Michel Portier
PDG
Secodip

Filiale du groupe Taylor Nelson Sofres (4ème groupe mondial d'études de marché), Secodip est une société spécialisée dans la veille et l'étude de marché. Présente sur le marché de la pige publicitaire plurimédia, Secodip vient de présenter Adnettrack, un outil de pige publicitaire sur Internet. Jean-Michel Portier, PDG de la société, présente son activité et analyse le marché de la publicité en ligne.

Propos recueillis par Fabien Claire le 16 juin 2000 .

JDNet. Secodip est depuis plusieurs années un acteur-observateur du marché publicitaire. Pouvez-vous nous relater rapidement l'histoire de la société ?
Jean-Michel Portier. Secodip a été créée il y a plus de trente ans et depuis l'origine, la société conduit deux activités principales. D'abord, l'étude d'un panel de consommateurs destiné à mesurer les parts de marché et la fidélité des consommateurs aux marques et aux enseignes. Notre deuxième grande activité historique est la pige publicitaire, c'est à dire la mesure permanente des insertions publicitaires et des investissements des entreprises en France. Nous dressons une sorte de carte d'état-major sur laquelle nous mesurons les performances de tous les acteurs, annonceurs, régies, médias et agences. Cette carte est remise à jour au moins chaque mois et, dans certains cas, chaque jour. Depuis 1992, Secodip est partie-prenante dans ce qui a été le groupe Sofres, devenu le groupe Taylor Nelson Sofres, dont nous sommes une filiale à 100%. Ce groupe, côté à la bourse de Londres, a réalisé l'année dernière de l'ordre de 615 millions de dollars de chiffre d'affaires.

Secodip est un acteur français d'origine. Quelle est votre stratégie internationale pour l'ensemble de vos activités ?
D'ores et déjà, nous avons une activité internationale. Par exemple, nous mesurons la publicité la publicité dans les magazines féminins dans 35 pays, nous faisons la même chose sur les télévisions paneuropéennes et l'arrivée du Net comme nouveau média nous conduira rapidement à étendre notre offre Adnettrack à l'international. Nous avons commencé notre européanisation car les grands comptes vont rapidement exiger une couverture internationale avec un outil global pour les principaux sites de chaque pays, selon la même méthodologie.
Nous avons lancé l'Italie fin mai, nous somme en train de préparer l'Angleterre pour les toutes prochaines semaines et l'Espagne et l'Allemagne seront couverts en septembre. Nous bénéficions pour ce développement du réseau du groupe Taylor Nelson Sofres avec des équipes en place dans chaque pays. Toutefois, la production restera centralisée en France. Notre objectif est d'atteindre les 1.000 sites européens dès le mois d'octobre. Le développement en Asie est également étudié pour l'horizon 2001 car nous commençons à avoir des demandes là-bas.

Quel est votre objectif pour Adnettrack, en sachant que sur le marché de la pige publicitaire Internet, d'autres acteurs sont en train d'émerger, comme Lemonad sur le marché français ?
Actuellement, aucun acteur n'a de place dominante sur les marchés européens. Il n'y a pas de leader incontesté, chaque marché a ses spécificités. Mais aux Etats-Unis, le premier marché mondial, notre groupe vient de racheter, il y a une semaine, le groupe CMR, qui comprend le leader de la pige publicitaire en ligne CMR interactive. Cette acquisition très importante, qui représente un investissement de 88 millions de dollars, va nous permettre de disposer d'une technologie avancée, car l'outil CMR baptisé Interwatch, frère jumeau d'Adnetttrack, est adapté aux technologies rich media utilisées sur le marché américain. Nous allons pouvoir maintenant faire converger les deux outils pour offrir le meilleur outil du marché.

Comment proposez-vous l'offre Adnettrack  ?
Comme nos concurrents, nous proposons un abonnement qui permet, via notre site, de connaître les nouvelles bannières avec leur classification par secteurs et nous sommes en train de mettre en place une valorisation en francs des investissements de chaque annonceur.

On a parlé d'une évaluation en net de ces campagnes. Comment comptez-vous pratiquer pour connaître le montant réel des deals?
Il y a eu un problème de compréhension dans un communiqué repris par CB News. Dans notre métier, le standard c'est de faire la pige publicitaire en brut. Evidemment, on aimerait faire du net mais nous ne connaissons jamais les conditions réelles de négociation. Cela donne quand même des éléments de comparaison importants sur l'évolution de la pression publicitaire. Ce qui séduit le plus nos clients, c'est notre capacité à offrir une visibilité globale des tendances sur le marché publicitaire pour l'ensemble des médias. Nos concurrents comme Lemonad ne sont pas capables de le faire.

Quels sont vos principaux clients pour Adnettrack ?
Il y a deux types de clientèles principales: d'abord les clients média traditionnels qui se sont diversifiés dans l'interactif avec des sociétés comme TF1, Interdéco, Le Monde Interactif, Libération, Carat, qui ont chacune créé des sociétés ou des départements interactifs. Ceux là se sont naturellement tournés vers nous dès que nous avons eu une offre. L'autre clientèle est constituée de l'ensemble des dotcoms qui, au départ, ont cherché à connaître les investissements de leurs concurrents ou les sociétés qui annonçaient ailleurs que chez-eux pour ensuite les démarcher. Assez vite, ces acteurs ont eu besoin de notre pige des médias traditionnels car ces dotcoms sont devenues de gros annonceurs. Ces clients sont donc vendeurs mais aussi acheteurs d'espace. Nous sommes les seuls en France à fournir une carte d'état-major globale. Au total, nous avons en France plus d'une cinquantaine de clients. On pense en avoir plus de 200 en Europe à la fin de l'année.

Vous croyez donc dans la convergence des médias ?
Bien sûr! C'est fondamental, tous les outils que nous mettons en place chez Secodip, comme dans tout le groupe Taylor Nelson Sofres, sont des moyens de comprendre le consommateur et l'internaute dans sa globalité. Je ne peux me contenter d'observer monsieur Durand ou Dupont lorsqu'il surfe sur Internet. Il est également important de savoir s'il va faire ses courses chez Carrefour ou Leclerc. Sa vie ne s'arrête pas lorsqu'il éteint son ordinateur. L'univers concurrentiel est bien plus large que sur Internet.

Combien vendez-vous l'offre Adnettrack ?
Cela dépend du nombre de secteurs observés, mais notre service est vendu aux environs de 30.000 à 60.000 francs par an. Pour chaque site, nous travaillons sur beaucoup plus de pages que nos concurrents directs, entre 300 et 4.000 pages selon les sites, et nous monitorons plus de 200 sites. Nous avons fait la preuve avec plusieurs régies que notre codification était beaucoup plus fiable que celle de nos concurrents.

Que pensez-vous de la maturité du marché publicitaire en ligne français ?
En discutant avec nos collègues de CMR Interactive, nous mesurons combien le marché américain a mûri au cours des trois dernières années. Il a mûri dans le sens de la croissance et de la multiplicité des usages de l'Internet. Le rapport des investissements publicitaires français en ligne, par rapport à ceux des américains, est plutôt de 1 à 20 alors que pour les autres médias, on est plutôt dans un rapport de 1 à 5. Je pense qu'il y encore un large potentiel en France et en Europe.

Concernant l'autre métier de Secodip, l'activité de "panéliste", vous n'avez pas d'offres Internet spécifique. Pour quelles raisons ?
Aujourd'hui, nous avons un partenariat avec Netvalue pour monter en Europe, aux Etats-Unis et en Asie des panels d'internautes, mais nous n'opérons pas véritablement de panels aujourd'hui. Nous avons fait ce choix il y a un an et demi et nous préférons laisser les choses décanter. Nous avons concentré nos efforts sur la mesure des investissements publicitaires et plutôt sur les outils qui démontrent l'efficacité du média. Pour le reste, nous verrons dans un deuxième temps.

Quels sont pour vous les facteurs clefs de réussite sur Internet ?
Ceux qui auront la force de frappe internationale vont prendre une avance déterminante sur le marché. Les acteurs qui ont un pied des deux côtés de l'Atlantique vont avoir plus de précisions, plus de réactivité, c'est indispensable. L'Internet est un bouillonnement, une caisse de résonance planétaire. Notre confrontation à nos nouvelles équipes américaines, par exemple, est très raffraîchissante. Secodip est parti pour une année de développements intenses et l'attente de nos clients va être rapidement satisfaite.

Sur un plan plus personnel quel usage faites-vous de l'Internet  ?
Je suis amené à voyager beaucoup, le mail est pour moi devenu un élément indispensable pour rester en contact avec mes collègues et mes clients. C'est même un outil vital. C'est également une source de curiosité extraordinaire pour un homme de marketing et d'étude comme moi. Je peux ainsi découvrir en deux minutes et cinq clics beaucoup plus qu'avec un long discours, une longue plaquette publicitaire.

Quels sont vos sites préférés ?
Ca m'ennuierait de citer tel ou tel site mais j'ai été très intéressé de voir émerger des sites médicaux en France depuis quelques semaines. J'achète également des fleurs ou des livres, des places de spectacle, mais ce n'est pas encore un réflexe chez moi.

Qu'est-ce que vous n'aimez pas sur Internet ?
Ce qui m'agace, c'est le manque de clarté de certains acteurs sur les usages qu'ils font d'Internet en matière de vie privée. Tous les systèmes permettant de vous mettre en fiche, sans vous avoir demandé un minimum de coopération, me semblent inquiétants. Les internautes comme moi sont généralement prêts à partager de l'information, y compris sur des caractéristiques personnelles, mais certainement pas à notre insu. Je suis opposé au fait que l'on collecte ou rapproche des informations sans autorisation. La moindre des choses serait de poser la question à l'internaute et je crois que dans beaucoup de cas, les gens diront oui. Il faut prendre garde au fait que les internautes peuvent se rebeller et voyager masqués. C'est une question d'éthique et d'efficacité. On n'a jamais intérêt à prendre ses clients pour plus bêtes qu'ils ne sont.

Diplômé de l'Ecole polytechnique et de l'Ecole nationale de la statistique, Jean-Michel Portier a été administrateur de l'Insee jusqu'en 1987. Puis il est devenu directeur scientifique et technique de la Sofres et responsable de la supervisation des services de terrain et du service informatique. Depuis 1992, Jean-Michel Portier est PDG de Secodip. Parallèlement, depuis l'année dernière, il est également responsable du secteur Media Monitoring International pour le groupe Taylor Nelson Sofres.





 

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