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Claude Rameau
Co-président
France
Angels |
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Claude
Rameau
"Ce
n'est pas avec des mesurettes fiscales que l'on soutient
les business angels"
Le
réseau France Angels soutient le développement
des business angels. Pour son co-président, beaucoup reste
à faire pour accompagner ces investisseurs, notamment
au niveau fiscal.
(28/02/2005) |
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JDN. Quel est l'objectif
de l'association France Angels ?
Claude Rameau. L'objectif global de France Angels
est de faire augmenter fortement le nombre de business
angels en France. Or la première difficulté pour un business
angel potentiel, c'est de savoir comment s'y prendre pour
investir. Beaucoup de questions se posent : où approcher
des entrepreneurs, combien investir, comment évaluer un
dossier et une entreprise, comment négocier sa valorisation,
qu'est-ce qu'un pacte d'actionnaires... Si on est isolé,
on ne se lance pas. Dans ce cadre, l'intérêt d'un groupement
de business angels est multiple. Si un réseau existe par
exemple dans une région et si on le fait savoir, la première
démarche de l'entrepreneur sera de s'y adresser car les
banques et les capital-risqueurs sont exclus pour lui.
Nous avons provoqué donc la création de ces réseaux. Plus
d'une quarantaine se sont montés. Nous pensons que cela
peut lever certaines des barrières qui font qu'en France,
il y a beaucoup moins de business angels qu'au Royaume-Uni,
par exemple.
Comment
se passent les relations entre business angels et fonds
de capital-risque ?
La relation n'est pas mauvaise, mais ils ont des objectifs
différents au moment d'investir. Le premier tour et un
deuxième tour quelques mois derrière, surtout si le financement
est prévu en deux temps, peuvent être financés par les
business angels. Après arrivent les capital-risqueurs.
Ils disposent alors déjà de un ou deux bilans. A ce moment
de la vie de l'entreprise, la technologie est relativement
stabilisée, les équipes sont renforcées
Ce qui augmente
beaucoup la capacité de jugement. Au moment où les fonds
arrivent, les business angels restent ou partent, cela
dépend. S'ils sont nombreux, les fonds les obligent souvent
à se regrouper pour n'avoir affaire qu'à "une seule tête".
Cela engendre de temps en temps de la frustration chez
les business angels. A l'entrée des fonds, il est également
établi un nouveau pacte d'actionnaires.
Justement, quelle est la fonction
d'un pacte d'actionnaires ?
Au moment où les business angels rentrent,
le pacte d'actionnaires précise ce que chacun peut et
doit faire. Il établit les règles du jeu, en somme, par
exemple en matière de pouvoir de décision. Certains sont
très légers, d'autres très quantifiés. En principe, c'est
un document qui n'est pas public, donc non opposable à
des tiers. Il doit permettre de conserver une certaine
flexibilité, tout en protégeant les business angels des
négligences éventuelles de l'entrepreneur. Même si ce
n'est pas une protection absolue, il permet d'éviter 90
% des conflits potentiels quand il est bien négocié. Quand
un fonds rentre, il fait re-signer à tous les actionnaires
un nouveau pacte, beaucoup plus rationnel et très chiffré.
Il comporte notamment des clauses de sortie, définit des
droits préférentiels. Par exemple, si un des actionnaires
veut vendre ses parts, il existe des conditions prioritaires,
un droit de préemption. L'avantage du pacte, c'est qu'il
amène une obligation de dialogue avant sa signature, donc
une plus grande confiance.
Combien de temps les business
angels restent-ils au capital d'une société ?
En général, ils espèrent pouvoir sortir au bout de trois
ou quatre ans, mais cinq ans est un horizon plus raisonnable.
Dans la réalité, c'est même souvent plus.
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Le
LBO est une sortie très élégante
pour les business angels." |
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Quelles sont les possibilités
de sortie pour les business angels ?
En général, tout le monde sort en même temps, quand la
société est rachetée. Les business angels peuvent difficilement
sortir avant les capital-risqueurs. Un autre système de
sortie se développe depuis trois, quatre ans. Il s'agit
du LBO (Ndlr: leverage buy-out). Cela consiste
à faire sortir tout ou partie des actionnaires en créant
une structure au-dessus de la société. Les intérêts de
ce qui a été emprunté pour financer l'opération sont remboursés
par les bénéfices de la société. Il s'agit d'une sortie
très élégante pour les business angels, dont le développement
peut les inciter à investir. Cependant, ce type d'opération
n'est pas toujours possible.
Pensez-vous que le facteur
culturel est un réel obstacle au développement de l'activité
de business angel en France ?
Il y a effectivement une culture latine qui n'est pas
très favorable, mais cela s'atténue doucement. Le problème
est que personne n'a jamais incité à faire ça en France.
Une enquête de Barclays Private Equity a questionné les
épargnants pour savoir quels investissements on leur recommandait.
Très majoritairement, le non-coté n'est pas recommandé.
Quant à la probabilité qu'on vous recommande un investissement
de type business angel, elle est quasi nulle. Mais cela
commence à changer : des efforts considérables sont
faits par les structures d'accompagnement des créateurs,
comme les incubateurs ou les pépinières d'entreprises.
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Je
milite pour une mesure très forte et très
visible." |
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La fiscalité constitue-t-elle
le principal obstacle ? Pensez-vous que des mesures d'incitation
fiscales auraient un effet significatif ?
Je ne crois pas que l'on créera des vocations uniquement
avec des mesures d'incitation fiscales. Ce n'est pas pour
ça que les gens investiront dans le non-coté. Il faut
d'abord leur expliquer que c'est utile. Il faut les inciter
à prendre des risques. L'Etat le dit, les fonds aussi,
tout le monde parle d'amorçage, mais au bout du compte
il n'y a pas de création. Et les fonds d'investissement
de proximité (FIP) et les fonds communs de placement dans
l'innovation (FCPI) ne vont en fait pas vers la création.
Que pensez-vous du retrait
de l'amendement Marini, qui permettait une déduction d'ISF
pour les investissements réalisés dans des PME, et de
son remplacement par l'amendement Gournac ?
Ou bien on prend une mesure qui aura un réel impact, ou
il vaut mieux ne rien faire du tout. Ce type de mesure
ne fait que moduler les montants investis, mais n'agit
pas sur l'augmentation du nombre d'investisseurs. Lorsque
la loi Dutreil a augmenté les plafonds des avantages Madelin,
là c'était positif. Mais si c'est pour faire une mesurette,
autant ne pas y toucher. Jusqu'à présent, la plupart des
mesures incitatives ont été une série de mesurettes, comme
la déduction des pertes en capital, la création de la
SUIR (Ndlr : société unipersonnelle d'investissement
à risque). Ce sont de bonnes choses en elles-mêmes,
mais leur multiplication fait que l'on n'y voit plus clair.
Les avantages ne sont pas cumulables, tout cela est si
compliqué. Je milite pour une mesure très forte et très
visible, qui remplacerait toutes ces mesurettes.
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Le
régime actuel de la SUIR est trop contraignant." |
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Le régime de la SUIR n'est
donc pas intéressant pour les business angels ?
L'idée de l'Etat, c'était d'outrepasser l'inconvénient
de la SCR (Ndlr : société de capital-risque), qui
oblige à réunir plusieurs investisseurs. La SCR est en
fait très peu utilisée par les petits groupes d'investisseurs.
Elle concerne surtout les réseaux de business angels,
car lorsque l'on est très nombreux, on est obligé de définir
des règles du jeu. La SUIR conserve les avantages de la
SCR, pour un investisseur unique. Sauf que la loi impose
de détenir entre 5 et 20 % des sociétés dans lesquelles
on investit. Personne ne sait expliquer d'où vient cette
fourchette. Cela limite les négociations avec les entrepreneurs
et ajoute encore une contrainte. Nous espérons que celle-ci
va bientôt sauter. En attendant, la SUIR n'attire pas
les foules. Personnellement, je n'en connais que deux.
Quel est le niveau de rentabilité
moyen des réseaux de business angels fédérés par France
Angels ?
Nous ne le connaissons pas. Mais d'ici un à deux ans,
nous essaierons d'obliger les réseaux à donner le nombre
d'investissements réalisés et les montants investis.
Ces réseaux accueillent-ils
des business angels étrangers ?
Certainement, directement ou indirectement. Le seul que
je connaisse est Sophia Business Angels Club, basé à Sophia
Antipolis. La moitié de ses membres sont étrangers. Mais
personnellement, si j'étais anglais, j'investirais en
au Royaume-Uni.
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Les
perspectives de sortie s'améliorent." |
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Les réseaux sont-ils spécialisés
par secteur ?
Pas encore, mais nous essayons de monter un ou deux réseaux
spécialisés. Pas sur Internet, dont la composante marketing
est aujourd'hui plus prégnante que la composante technologique.
Les biotechnologies, en revanche, s'y prêtent bien, car
il faut s'y connaître pour investir.
Quels sont les plus gros réseaux
fédérés par France Angels ?
J'ai déjà cité Sophia Business Angels, il y a aussi Fa
Dièse à Bordeaux, Invest Essor à Nanterre, Invest Y dans
les Yvelines, Club Invest 77 en Seine-et-Marne, Lyon Angels,
Irus Partenaires à Nantes
Quelles sont les perspectives
pour les business angels en 2005 ? La santé de la création
d'entreprise en France signifie-t-elle que de bons dossiers
sont sur le marché ?
Leurs perspectives de sortie s'améliorent avec la reprise
des rachats industriels et les LBO. Pour le reste, parmi
le nombre d'entreprises créées, il est difficile de voir
si les projets sont de qualité. A priori, plus de créations
signifie plus d'occasions de financement. Mais il faudrait
savoir si ce n'est pas un phénomène passager, et si cela
ne correspond pas seulement à des créations d'entreprise
unipersonnelle par des chômeurs, par exemple.
Et les perspectives pour
France Angels ?
Nous allons essayer de faire se créer sept ou huit nouveaux
réseaux, dans les régions où il n'y en a pas encore,
comme l'Est, le Nord, Chambéry-Grenoble, le Centre,
Montpellier, Marseille ou la Normandie. Et nous allons
aider ceux qui existent en leur obtenant des moyens
financiers, notamment par le biais d'aides régionales.
Nous essayons de convaincre les pouvoirs publics d'aider
les réseaux, et faisons également pression pour faire
évoluer la législation. Enfin, nous souhaitons pousser
les co-investissements entre réseaux.
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Propos recueillis par Raphaële KARAYAN, JDN |
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PARCOURS
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Claude Rameau, ingénieur télécom et diplômé
de l'INSEAD (MBA), a débuté sa carrière comme consultant
en développement de l'innovation pour des entreprises
européennes. Il a ensuite été professeur de gestion
économique et gestion des risques à l'INSEAD, dont
il fut le Doyen pendant 12 ans.
De 1994 à 1998, il a été vice président de
l'EFMD à Bruxelles (European Foundation for Management
Development).
Depuis 1990, il est élu local de Melun et
son agglomération, chargé des finances et développement
économique.
Depuis 1994, il est vice président du conseil
d'administration de l'INSEAD, et est devenu business
angel dans des sociétés en création (40 investissements,
17 échecs).
Depuis 2001, il est co-président de France
Angels, association nationale visant à promouvoir,
développer et professionnaliser les business angels
en France.
Claude Rameau est également administrateur de sociétés
et membre du conseil de plusieurs institutions académiques
en Europe et Asie.
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