INTERVIEW
 
PDG
Fromages.com
Marc Refabert
"Titre"
Créé en février 1997, fromages.com fait partie des pionniers de l'Internet marchand. Dès son ouverture, le site dédié aux fromages français décide de s'adresser au marché international. Aujourd'hui, il livre aux Etats-Unis, en Europe et en Asie. N'étant pas producteur, fromages.com revendique le statut de société de services. Une philosophie qui permet à ce "pure player" qui n'a jamais fait appel à des capitaux extérieurs, d'être rentable. Pour son exercice 2000, le site a dégagé un chiffre d'affaires de 2,5 millions de francs et un bénéfice de 35.000 francs. En 2001, malgré une conjoncture difficile, fromages.com table sur 3,5 à 4 millions de francs. Marc Refabert, PDG du site, revient sur les éléments clés de cet itinéraire et sur l'évolution, très récente, du e-commerce.
Jeudi 7 juin 2001
 
          

JDNet. Il y a quatre ans, vous lanciez fromages.com. En 2000, vous annonciez un chiffre d'affaires de 2,5 millions de francs et un bilan positif. Depuis quand enregistrez-vous de bons résultats ?
Marc Refabert. En terme d'exploitation pure, la société est équilibrée depuis octobre-novembre 1998. Comme je n'ai jamais fait appel à de l'actionnariat privé, notre objectif était dès le départ de gagner de l'argent au plus vite. Nous avons opté pour une structure légère et réactive. La conception du site a demandé 1 million de francs et nous sommes une petite équipe, 5 personnes. Le site a été conçu pour être simple, clair et pratique. Au cours de la première année d'exercice, nous avons perdu beaucoup d'argent. Le chiffre d'affaires de la société était de 70 000 francs pour 400 000 francs de pertes. Mais en 1998, nous avons redressé la barre avec 700 000 francs de chiffre d'affaires. Et en 2000, nous avons fait un bénéfice de 35 000 francs, soit 1,4% de notre chiffre d'affaires avant impôts.

Quelle a été votre méthode pour atteindre ces résultats?
Nous sommes avant tout une société de services avant d'être des fromagers. Notre métier est de faire vivre un site et de créer du trafic. La fidélisation de notre clientèle est très importante. 6 clients sur 10 recommandent tous les 4 mois. Ensuite, nous veillons tout particulièrement à la qualité des produits et de la logistique. Nous n'avons pas de stock. Nous travaillons en temps réel avec notre fournisseur de fromages, Pascal Beillevaire, fromager-affineur en Loire-Atlantique et avec notre transporteur, Fedex. Un système qui nous permet de livrer 85 % des commandes en 24 heures partout dans le monde, sauf au Japon, où la livraison s'effectue en 36 heures. Mais nous travaillons à raccourcir les délais. Fedex n'est pas le prestataire le moins cher du marché, mais il nous permet de respecter nos engagements de rapidité. Aujourd'hui, notre logistique est parfaitement rodée.

Vous parlez de fidélisation et de faire vivre votre site. Quels sont les dispositifs que vous avez mis en place et depuis quand ?
Aujourd'hui, tout le monde parle de fidélisation comme si l'on découvrait ces outils. La fidélisation, c'est du bon sens. Chez nous, la mise en place d'une newsletter date de 1998. Aujourd'hui, nous avons 5 000 abonnés à cette lettre qui n'est pas, je le précise, commerciale. Son contenu met en avant les accords mets et vins, détaille des recettes, parle des produits... Elle est avant tout informative et touche très peu de nos clients. 70% des abonnés ne sont pas des clients. Il y a parmi eux pas mal de professionnels. L'information autour des produits est pour nous actuellement aussi importante que la partie commerciale. Chez nous, la rubrique le "Rendez-vous des amateurs", entièrement dédiée au rédactionnel, est celle qui est le plus visitée. Aussi, si 30 pages sont dédiés au commerce, 250 sont du contenu que nous réactualisons très régulièrement.

Est-ce que le fait de vous être positionné d'emblée sur le marché international est pour vous un des facteurs important dans votre situation économique actuelle ?
Très certainement. Aujourd'hui, nous ne sommes pas tributaires du marché français et de son développement. 99% de notre chiffre d'affaires est réalisé à l'export. Les Etats-Unis représentent 70% de celui-ci, l'Europe 15%, et l'Asie ainsi que le reste du monde, 15%. En Europe, l'Italie est d'ailleurs un marché surprenant et assez important. Ensuite, deux autres éléments on joué en notre faveur. Nous avons été les premier à entrer sur ce marché et nous avons ciblé une clientèle susceptible d'acheter ces produits sur Internet. Si quelques uns de nos 4 000 clients sont français, la grosse majorité sont étrangers. Nos prix qui incluent le coût de la logistique plus nos marges, sont très élevés pour le marché français. Par contre, ils sont dans la moyenne des prix qui se pratiquent à l'étranger.

Pensez-vous que le modèle des pure players à un avenir sur Internet ?
J'ai toujours dit qu'Internet n'était pas un Eldorado. Aujourd'hui, encore moins qu'hier. Les start-up comme la notre seront peu nombreuses au final. Le ticket d'entrée est tellement élevé à l'heure actuelle que ce modèle est difficilement tenable. L'avenir est aux brick and mortar et à la grande distribution. Ces grands groupes peuvent se permettre de perdre de l'argent. Nous, non.

Que pensez-vous de l'opportunité que représente les galeries marchandes pour les marchands ou les comparateurs de prix ?
Je n'ai jamais cru au modèle des galeries marchandes pour la simple et bonne raison que sur Internet, il n'y a ni notion physique, ni notion de lieu. Il n'y a pas de problème de parking sur Internet. C'est sur cette notion et sur le principe du gain de temps associé que les galeries marchandes se sont créées à la périphérie des villes dans le commerce traditionnel. Sur Internet, une fois que vous avez trouvé ce que vous cherchiez, vous pouvez quitter la galerie comme bon vous semble, d'un clic, pour aller ailleurs. En plus, je ne crois pas aux sites qui vendent tout et rien, sans fil directeur. Quant aux comparateurs de prix, ils servent davantage aux professionnels du net qu'aux internautes.

Quels sont vos coût marketing ?
J'ai gelé toute publicité depuis le mois de février. Nous avons essayé toutes les formes de publicité, à part la télévision, et mon constat est le suivant : les bandeaux publicitaires sont très chers et les internautes ne cliquent pas dessus. Et ce n'est pas une spécificité nationale ! Quant à la publicité papier, elle demande beaucoup de moyens. Par contre, nous avons placé nos investissements sur des outils de marketing opérationnel qui nous permettent de mieux qualifier nos visiteurs. Depuis 2 à 3 mois, nous centrons nos efforts sur le développement de l'affiliation, du marketing viral et avons mis en place un call center. Pour le moment, nous ne sommes pas abasourdis par les résultats du call-center qui peut fonctionner par voix sur IP. Les litiges sont la principale motivation aux quelques appels que nous recevons. Mais ce système nous permet de ne pas perdre de clients.

Comment ont évolué vos marges dernièrement ?
Nos marges ont été légèrement entamées ces derniers mois par l'augmentation des coûts, liés à l'épidémie de fièvre aphteuse et à toutes les questions associées à la sécurité alimentaire en général. En pleine épidémie, nous avons perdu beaucoup de clients. Ce qui nous a amené à réviser à la baisse, de 20 à 30%, nos objectifs de chiffre d'affaires. En 2001, nous tablons sur un chiffre d'affaires entre 3,5 et 4 millions de francs. L'augmentation des frais de transport a également contribué à entamer nos marges. Les transporteurs ont également subi les conséquences de l'e-krach. Comme ils n'ont pas acquis de nouveaux clients, ils ont augmenté leurs prix. Ce paramètre a pour nous un réelle importance. Aujourd'hui, nous traitons 20 à 25 commandes par jour. En décembre 2000, nous avons exporté quelques 4 tonnes de fromage. Cette année, nous tablons sur 15 à 20 tonnes. Heureusement nos marges restent confortables et notre trafic augmente. Notre panier moyen se situe autour de 500 francs et en mai, nous avons recensé 200 000 pages vues.

Quels sont vos projets sur Internet ?
Nous allons ouvrir, d'ici une dizaine de jours, un site en japonais, fromages-japon.com. Ceci afin d'être mieux référencé. En effet, le Japon est officiellement le plus gros marché de vente de fromage et il est pour nous, loin derrière les Etats-Unis. Nous avons donc décidé de créer ce site entièrement réalisé par Datasia.

Comment voyez-vous votre avenir ?
Il y a peu, pour moi l'avenir était très clair. Aujourd'hui, je ne sais plus réellement où aller. La crise de la fièvre aphteuse a placé une épée de Damoclès au dessus de notre tête. Nous avons toutefois quelques projets en réserve outre le site japonais. Un projet B to B n'est pas exclu. Mais doit être auto-financé, gagner bien notre vie est un préalable. Sur ce projet, il n'est toutefois pas exclu d'ouvrir le capital à un investisseur extérieur qui ne rentrera pas dans fromages.com. Ce sera un projet à part.

Qu'est-ce que vous aimez sur Internet ?
J'aime Internet pour son côté rapide, pratique, novateur.

Quels sont les sites que vous préférez ?
Parmi les sites américains, j'aime beaucoup sax.com et le site de design, deananddeluca.com. En France, la Fnac.

 
Propos recueillis par Anne-Laure Béranger

PARCOURS
 
Après des études de commerce à l'ESSCA d'Angers (Ecole Supérieur des Sciences Commerciales d'Angers), Marc Refabert, 38 ans, s'est expatrié en Asie où il a géré pendant quelques années une entreprise de jouets. De retour en France, il passe trois ans au sein du Groupe Xerox ("une bonne école", dit-il), avant d'acheter une maroquinerie, puis de lancer fromages.com en 1997.

   
 
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