INTERVIEW
 
Directeur adjoint, responsable du commerce et des moyens de paiements électroniques
Caisse d'Epargne
Jacques Schuhmacher
"Nous travaillons sur un projet de kiosque pour les paiements de faible montant"
Très dynamique en matière de solution de paiement électronique sécurisée, le groupe Caisse d'Epargne est aujourd'hui, selon Médiamétrie, le deuxième portail bancaire sur Internet en terme de visites, de nombre de pages vues et en temps de visite par personne. C'est également une des rares banques françaises à avoir mis en place 3D Secure pour sécuriser les paiements en provenance de l'étranger chez ses marchands partenaires. Aujourd'hui, la banque revendique un portefeuille de 840 e-commerçants, soit une progression de près de 60 % en un an. Jacques Schuhmacher, directeur adjoint en charge du pôle commerce et moyens de paiements électroniques revient sur l'évolution des moyens de paiement en ligne et les projets de la banque dans ce domaine.
22 octobre 2003
 
          
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JDN. Le paiement en ligne a longtemps fait peur. Comment évolue l'attitude des internautes à l'égard du paiement en ligne ?
Jacques Schuhmacher. Je pense qu'il y a une réelle évolution. En ce qui nous concerne, nous avons constaté que les paiements électroniques auprès des e-commerçants qui ont opté pour notre solution de paiement ont doublé en un an. Bien sûr, il y a encore des gens réticents. Mais, il semble que les internautes soient moins stressés. C'est du moins ce que nous révèle notre hotline.

Aujourd'hui, on a l'impression qu'il existe, outre la carte bancaire, une multitude de moyens de paiements. Pourquoi une telle prolifération ?
Il faut bien convenir que les banques n'ont pas su répondre dans un premier temps aux préoccupations des internautes à l'égard du paiement en ligne. De fait, un ensemble de solutions, éditées par des acteurs très différents et n'ayant pas toujours la surface souhaitable, sont apparues pour combler ce vide. Mais maintenant que le paiement en ligne devient de plus en plus complexe, notamment avec 3D Secure, je pense que le marché va se recentrer sur quelques solutions. D'abord parce que les investissements nécessaires sont importants, et ensuite parce qu'il faut des acteurs capables de faire l'interface entre les acheteurs, les vendeurs et les banques du monde entier. Il ne suffit pas d'être un petit génie pour répondre à un tel enjeu.

Justement, quelles sont selon vous les solutions de paiements sécurisés qui seront pérennes dans un proche avenir ?
Tout d'abord, le paiement par carte bancaire protégé par une connexion sécurisée et par l'authentification du porteur de la carte comme c'est le cas sur un terminal de paiement. C'est ce que permet 3D Secure en vérifiant non seulement qu'un numéro de carte existe, qu'il correspond bien au nom du porteur et que c'est bien le propriétaire de la carte qui l'utilise grâce à un processus d'authentification. Outre la carte bancaire, nous croyons beaucoup, pour les petits montants, au kiosque. Mais pas un kiosque où l'internaute dépense 2 euros pour un achat d'une valeur de 1 euro. Je pense plutôt à des kiosques comme l'autoroute ou w-HA, en plus généralistes. Nous travaillons d'ailleurs à une évolution de notre MoneyTronic vers une solution de kiosque. A ces deux types de solutions viennent s'ajouter les cartes privatives et le prélèvement essentiellement pour le B2B. Et bien sûr, les paiements P2P qui commencent à intéresser les français.

Dans l'éventail des solutions pérennes que vous venez de citer, vous n'avez pas évoqué le pré-paiement. Pourquoi ?
Nous nous sommes rendus compte, avec des études et des expériences concrètes telles que Kleline ou récemment Moneo, que les gens n'étaient pas spontanément attirés par le pré-paiement. Il faut charger un compte pour le consommer ensuite. Et la plupart du temps, les gens oublient cet argent et ne l'utilisent pas. C'est pourquoi, nous allons faire évoluer notre service MoneyTronic vers un système de post-paiement.

Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce projet de kiosque et sur son fonctionnement ?
Ce devrait être un système très ouvert et très simple. L'idée est de combiner l'avantage et la simplicité de MoneyTronic, sans subir le frein du pré-paiement. Il suffit pour cela d'encaisser en fin de mois les consommations grâce à un prélèvement direct sur le compte ou la carte de l'internaute. Toutefois, si les dépenses dépassent un certain montant, une facture intermédiaire sera émise.

Quel sera l'avantage d'un tel système sur ceux déjà existant ?
Le premier vient du fait que nous ne sommes pas un opérateur. En conséquence, nous ne sommes pas en concurrence avec les autres opérateurs qui sont aussi fournisseurs d'accès. Nous sommes beaucoup plus neutres et dans ce cadre, les alliances sont plus faciles à nouer. Secondo, en tant que kiosque bancaire, nous pourrons nous contenter d'une commission de 10 % au lieu des 40 % demandés par les kiosques opérateurs où l'on grille néanmoins des ressources téléphoniques.

Et que devient l'e-carte bleue dans ce paysage ?
Je pense qu'il était important d'explorer cette piste de la carte virtuelle dynamique. Celle-ci a permis de tourner la page à une époque où on ne parlait que de SET et de Cyber-Comm. L'e-carte bleue a permis d'impliquer davantage les banques émetteurs des cartes dans la construction sécuritaire, ce qui était indispensable en vente à distance pour déboucher sur un schéma de type 3D Secure. Les cybermarchands nous alertent à chaque rencontre sur la nécessité de ne pas complexifier l'achat et de ne pas augmenter la durée du paiement. L'e-carte bleue ne répond pas parfaitement à ce cahier des charges, elle reste relativement lourde à gérer pour l'internaute. C'est pourquoi à mon avis, elle ne s'imposera pas comme la solution universelle du paiement sur Internet, mais c'est une excellente solution pour "les achats périlleux". Utiliser une e-carte bleue pour acheter un billet à la SNCF ou sur un site utilisant notre service SP PLUS est une précaution totalement inutile, car les risques couverts (réutilisation du numéro ou changement du montant) sont nuls. Par contre, pour acheter à l'étranger sur un site inconnu, c'est beaucoup plus pertinent, du moins tant que 3D Secure ne sera pas généralisé.

Et le paiement par téléphone mobile ?
Le téléphone bi-fente a été abandonné, essentiellement à cause d'un problème de fabrication. Le Wap, lancé trop tôt sur un modèle de type minitel avec trop d'effets d'annonce, a été une catastrophe qui a marqué les esprits. Par contre, il est vrai qu'on commence à voir émerger du m-commerce avec les nouvelles générations de téléphone et des débits plus appropriés. Mais dans l'ensemble, ce marché n'est pas aussi mûr que dans d'autres pays où les relations entre les banques et les opérateurs de téléphonie mobile sont différentes. Quoiqu'il en soit, je pense que dans l'avenir, le téléphone va devenir un support de paiement. Nous allons d'ailleurs bientôt lancer un système de paiement du stationnement par téléphone mobile.

Enfin, sur 3D Secure, où en êtes vous ?
Actuellement, nous validons 300 à 500 paiements 3D Secure par jour. Et ceci, seulement avec Visa. Nous allons bientôt lancer la même procédure avec Mastercard ce qui devrait multiplier par deux les paiements 3D Secure. Pour le moment, nous avons mis en place la structure nécessaire pour demander l'authentification des porteurs étrangers de carte visa qui achètent chez notre centaine de commerçants 3D Secure. Mais dès le mois de novembre, nous serons en mesure d'authentifier les porteurs de carte Caisse d'Epargne achetant à l'étranger grâce à notre identification en ligne ID-Tronic. A ma connaissance, nous sommes aujourd'hui la seule banque française à être aussi avancée. Le 3D Secure domestique sera pourtant effectif en France normalement, à partir de janvier 2005, ce qui rendra l'authentification indispensable.

Qu'est-ce que vous aimez le plus dans Internet ?
D'abord, le courrier électronique. Ca a bouleversé ma vie professionnelle et personnelle. Ensuite, j'aime beaucoup la spontanéité et la richesse d'information que l'on trouve sur le Web.

A l'inverse, qu'est-ce que vous détestez le plus dans ce média ?
Quand le temps de réponse est trop lent. Je n'aime pas non plus l'usage d'Internet pour propager des propos diffamatoires ou de la vulgarité. Ces sites ne construisent rien, ils détruisent l'image de ce formidable progrès de l'humanité.

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Quels sont vos sites préférés ?
Des sites d'actualité comme Europe 1, Le Figaro, Libération, arrêt sur images de France 5 etc... et des sites spécialisés dans les activités nautiques, ma deuxième passion après les nouvelles technologies.

 
Propos recueillis par Anne-Laure Béranger

PARCOURS
 
Jacques Schuhmacher, ingénieur de formation, a débuté son activité professionnelle par des fonctions de programmation, pour évoluer vers la formation, puis vers des fonctions de ventes de solutions (matériel ou logiciel), principalement dans le domaine de la télématique (minitel, Internet) et de la monétique (solutions à base de cartes à puces). C'est en 1990 qu'il rejoint le Groupe Caisse d'Epargne pour diriger une filiale technologique. Il occupe aujourd'hui le poste de directeur adjoint en charge du pôle Commerce et Moyens de paiements électroniques à la Caisse Nationale des Caisses d'Epargne.

   
 
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