JDN.
Quelles nouveautés apportent les recommandations
du CST relatives aux contenus sur Internet ?
Hervé Soymié.
Le CST a pris acte de l'utilisation par les éditeurs
de sites Internet de services avec des numéros
surtaxés et kiosques micro. Ces services peuvent
être utilisés comme moyen de rémunération
pour des contenus, ce qui peut se révéler
intéressant pour les webmasters. C'est une démarche
pragmatique destinée à généraliser
les recommandations déontologiques liées
aux contrats Audiotel et kiosques de France Télécom
à l'ensemble des fournisseurs français
de solutions similaires. Nous sommes partis de l'existant
avec l'opérateur national, qui détenait
auparavant un monopole, et nous avons étendu
les dispositions aux nouveaux opérateurs de téléphones
fixes et mobiles qui sont entrés depuis 2002
au CST. Nous avons validé le cadre déontologique
des contrats kiosques d'une dizaine d'opérateurs
alternatifs qui développent des kiosques autres
que ceux émanant de France Télécom.
L'opérateur national
reste notre interlocuteur principal sur le marché
des numéros surtaxés et des kiosques micro.
Concrètement,
de quelle manière les sites Internet peuvent-ils
exploiter des services Audiotel et kiosque micro ?
L'ensemble des nouvelles dispositions
concernant le contenu sur Internet figurent dans l'annexe
2 des nouvelles recommandations déontologiques relatives
aux services télématiques en date du 6 novembre. Il
y a un parallélisme du champ des possibles en
terme d'exploitation et des obligations. Les sites Internet
peuvent exploiter les mêmes contenus que sur un
serveur Audiotel ou accès équivalents.
A contrario, quelles sont
les interdictions ?
Essentiellement la pornographie, les
jeux avec espérance de gains et les services
destinés aux enfants et les jeunes.
Pour quels tarifs d'accès
du côté du consommateur ?
Dans les nouvelles recommandations, on a pris acte d'un
accès forfaitisé pour des paiements à
l'acte. Ce qui revient à faire payer l'accès
via Audiotel à un contenu Internet pour un montant
forfaitisé d'1,69 euro TTC pour une communication
d'une durée d'une minute maximum [NDLR : sachant
que le prix global de communication peut comprendre
une partie forfait + une partie durée]. Dans
tous les cas, la communication ne peut pas dépasser
15 euros. On s'est aperçu que ce type d'accès
forfaitisé par le biais d'un service Audiotel
est moins dangereux pour le portefeuille des consommateurs
qu'un service kiosque micro proposant un kit de connexion
avec des taux souvent élevés de communication.
Ce dernier cas pose moins de problèmes depuis
que France Télécom a supprimé les
tarifs les plus élevés.
La
jurisprudence du CTA est intéressante à
décortiquer en matière de sites Internet.
Pourquoi trois services Audiotel liés à
des sites immobiliers ont-ils été suspendus
pour trois mois en décembre dernier ?
Ces services en ligne immobiliers aboutissaient
à la consultation annonce par annonce par le
biais d'un numéro Audiotel. En clair, le consommateur
devait débourser 1,69 euro pour consulter une
seule annonce. Cela revient cher pour une recherche
immobilière. Compte tenu de l'ergonomie de ces
services, même le nouveau cadre des recommandation
du CST en matière de contenus sur Internet ne
conviendrait pas à ce type d'exploitation. Dans
le respect des nouvelles dispositions, le CST autoriserait
l'exploitation de ses services Audiotel à partir
du moment où le forfait d'1,69 euro permet la
consultation des annonces de manière globale
et complète.
Quel est le cadre d'exploitation
des jeux Audiotel à partir des sites Internet
?
Tous les jeux sont autorisés.
Par exemple, les sites Internet peuvent autoriser les
jeux en téléchargement à partir
d'un numéro Audiotel. Seuls les jeux avec espérance
de gains (comme les loteries) sont interdits.
Pourtant, cette dernière
catégorie de jeux ne manque pas sur Internet...
Il y en a malheureusement beaucoup. Mais
c'est contraire à nos recommandations déontologiques.
Comment gérez-vous
les demandes d'intervention portant sur les services
pornographiques, un secteur qui est exclu du cadre déontologique
?
Le CST/CTA peut émettre des avis
et des recommandations, mais nous ne disposons d'aucun
pouvoir de sanctions. Cela dépend de la responsabilité
de l'opérateur qui doit effectuer un contrôle
sur la manière dont les numéros Audiotel
sont exploités. De notre côté, les
dossiers sont envoyés au procureur de la République
parce qu'ils tombent sous le coup de l'article L.227-24
du code pénal (messages à caractère
violent ou pornographique susceptible d'être vus
par des mineurs). Ensuite, la justice prend le relais
pour enquêter.
Pour déposer une réclamation,
quelles sont les modalités de saisine du CST/CTA
?
Il n'existe pas d'auto-saisine du CTA.
Le texte de création du CST/CTA n'a pas prévu
cette possibilité. En revanche, les opérateurs
télécoms (fixes et mobiles), les associations
de consommateurs et même les particuliers peuvent
nous saisir directement. Des organismes représentatifs
comme l'Aforst, l'Afom
ou l'Afutt et UFC sont représentés au
sein du CST. Nous constatons avec regret une diminution
du nombre de saisines en provenance des opérateurs.
Un phénomène qui s'explique en partie
par la concurrence accrue entre eux. Pour les particuliers,
il suffit d'envoyer un courrier ou un mail adressé
directement au président du CST. Celui-ci examine
si la réclamation est fondée ou non. Si
l'objet de la réclamation lui paraît clairement
établi, il transmet le dossier litigieux au CTA.
Après la parution d'un avis du CTA, c'est à
l'opérateur télécom qui a passé
le contrat avec le fournisseur de services Internet
de prendre le relais pour régulariser la situation.
Dans 90% des cas, nos recommandations sont suivies par
France Télécom.
Combien d'avis a émis
le CTA pour les services Internet en 2003 ?
Nous avons rendu un total de 250 avis,
tous services confondus. Une douzaine concernaient le
kiosque micro. Pour la partie Audiotel, il y a eu une
centaine d'avis rendus mais je ne peux pas vous dire
la proportion de services Internet liés à
un accès Audiotel. Mais on ne peut pas nier que
les réclamations concernant Audiotel et Internet
deviennent de plus en plus courantes. Alors que la France
est encore épargnée par le phénomène
de dialers (kit de connexions), très développé
au Royaume-Uni.
Des
fournisseurs de solutions de paiement Audiotel (AlloPass
ou Magikbiz par exemple) sont régulièrement
épinglés dans les avis du CTA. Comment
parviennent-ils à poursuivre leurs activités
sans être réellement inquiétés
?
Ils recoivent des pénalités
financières de la part de l'opérateur.
Celui-ci peut prélever une compensation sur les
reversements dûs aux fournisseurs de solutions
de kiosque micro pour le volume de consommation de télécommunication
écoulée. En cas de récidive, les
périodes de suspension peuvent être plus
longues. Pour les abus graves, il existe des dispositions
contractuelles qui permettent aux opérateurs
de résilier un contrat avec un fournisseur de
solutions type numéros surtaxés ou kiosque
micro. Mais il existe des tactiques d'esquive : certains
fournisseurs de services incriminés achètent
un stock conséquent de numéros aux opérateurs.
Si un numéro tombe, un autre de réserve
prend la place. Il arrive fréquemment que l'objet
initial du service soit complétement dévié
au bout du compte. Il est dommage de voir une batterie
de services Internet proposant des services de logos
et sonnerie ou de conventions collectives qui semblent
irréprochables sur le papier mais qui donnent
finalement accès à des contenus pornographiques.
Dans
les avis rendus par le CTA, pourquoi les noms des fournisseurs
de serveurs vocaux ou de kiosques micro sont-ils occultés
?
Les activités d'édition
d'un service Internet et de fournisseur d'un service
Audiotel peuvent être distinctes. Dans un avis,
nous pouvons révéler le code de services
(numéro Audiotel par exemple), le nom de l'éditeur
du site Internet voire la marque de la solution technique
Audiotel ou kiosque micro utilisée. Mais nous
ne divulguons pas le nom des sociétés
qui fournissent les services de communication Audiotel.
C'est un choix qui date du décret fondateur du
CST/CTA en 1993. A l'origine, le système a été
conçu pour répondre à deux objectifs
: protéger les fournisseurs de services Audiotel
contre un supposé arbitraire de l'opérateur
qui détenait à l'époque une position
monopolistique, France Télécom en l'occurence,
et pérenniser le marché. Dans les textes,
cela demeure toujours l'objet du CST/CTA. C'est peut-être
une limite maintenant.
Mixte Internet et Audiotel : quelques dérapages
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Entre octobre et décembre 2003, le Comité de la télématique
anonyme (CTA) a émis plusieurs avis favorable
de suspension de trois mois concernant le domaine
de l'immobilier en ligne. Immostreet.com, SeLoger.fr
et LeSiteImmobilier.com ont été pointés
du doigt pour avoir lancé des services Audiotel
litigieux qui permettaient aux internautes d'obtenir
les seules coordonnées de l'annonceur. Une
exploitation qui ne respecte pas les recommandations
déontologiques du CTA : les services doivent
permettre la consultation d'une liste d'annonces
"précises et complètes"
(hors emploi et rencontres entre personnes). Sur
le volet des jeux, le CTA a émis un avis
favorable à la résiliation des services
Audiotel des sites Cinejeux.com, Bingopoly.fr et
LePratique.fr au motif de "diffusion de codes
destinés à rétribuer un service
de jeux". |
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