par
Franklin Brousse,
Avocat,
D&B Legal
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L'Autorité
de régulation des télécommunications a adopté le 7 novembre
2002 les décisions permettant l'utilisation de bornes
de réseaux de type RLAN, pour la fourniture au public
de services Internet haut débit, en particulier dans
les lieux de passage ("hotspots"). Le même jour, l'ART
a rendu publiques les lignes directrices fixant les
conditions d'expérimentation de réseaux RLAN ouverts
au public dans la bande de fréquences 2,4 GHz.
Ces
nouvelles mesures concrètes sont destinées à répondre
aux multiples attentes des professionnels du secteur,
des entreprises et des collectivités locales et d'assouplir
progressivement les conditions d'exploitation des bandes
de fréquence 2,4 GHz et 5 GHz utilisées dans le cadre
des réseaux locaux radio (RLAN), utilisant notamment
la norme Wi Fi.
Les
conditions pratiques d'expérimentation
Les
fournisseurs de services et les opérateurs titulaires
d'une licence peuvent désormais installer sans autorisation
des bornes d'accès utilisant les technologies de la
bande 2,4 GHz, dans trente-huit départements à l'intérieur
comme à l'extérieur avec une puissance inférieure à
100 milliwatts (mW) pour la bande 2400-2454 MHz ainsi
qu'à l'intérieur des bâtiments avec une puissance inférieure
à 100 mW et à l'extérieur des bâtiments avec une puissance
inférieure à 10 mW pour la bande 2454-2483,5 MHz.
Ces
décisions permettent aux entreprises d'établir librement
des réseaux indépendants à l'exception des utilisations
en extérieure sur les propriétés privées limitées à
100 mW qui nécessite une autorisation du ministère de
la Défense.
Les
lignes directrices émises par l'ART fixent les conditions
d'expérimentations de réseaux RLAN ouverts au public
dont la délivrance gratuite d'une autorisation sur la
base de l'article L.33-1 du code des postes et télécommunications
pour une durée maximale de dix-huit mois dans le cadre
d'une utilisation pour une puissance de 100 mW sur toute
la bande, à l'intérieur comme à l'extérieur des bâtiments.
L'ART
indique la possibilité d'établir dans la bande 2,4 GHz
des liens fixes point à point pour les besoins des réseaux
sans fil ou de demander l'attribution de fréquences
dans d'autres bandes pour étendre la portée des réseaux
sans fil réduite à quelques centaine de mètres du fait
de la limitation de la puissance à 100 mW. Sur la base
du respect de ces lignes directrices, les opérateurs
et fournisseurs intéressés peuvent déposer leur demande
auprès de l'ART depuis le 12 novembre 2002.
Les
risques juridiques
Parce qu'elle représente une alternative simple et efficace
à d'autres moyens d'accès au haut débit, la norme WI
FI est une opportunité technologique dont souhaitent
bénéficier aujourd'hui de nombreuses entreprises privées
ou publiques. Si les dispositions techniques sont aujourd'hui
clairement identifiées par les acteurs du marché des
réseaux locaux sans fil, les dispositions juridiques,
souvent complexes, échappent encore à la majorité d'entre
eux.
L'appréhension
des risques juridiques liés à la mise en oeuvre d'un
réseau sans fil est pourtant essentielle si l'on souhaite
éviter les mésaventures de pionniers du Wi Fi comme
l'association Provence Wireless, contrainte à la désinstallation
immédiate du réseau WI FI de la commune de Mane sous
peine de sanctions pénales et avec un préjudice financier
important.
En
effet, le fait d'établir ou de faire établir un tel
réseau sans autorisation, ou de le maintenir en violation
d'une décision de suspension ou de retrait de l'autorisation,
est puni de six mois d'emprisonnement et de 30 000 euros
d'amende. C'est la menace de cette sanction pénale qui
a conduit l'Association Provence Wireless à démonter
immédiatement son installation.
En
outre, est puni des même peines, le fait de perturber
les émissions hertziennes d'un service de télécommunications,
en utilisant une fréquence ou une installation radioélectrique
non conforme aux dispositions du CPT, notamment en matière
d'équipements et d'installations radioélectriques n'utilisant
pas des fréquences spécifiquement assignées par l'ANF.
Cette
sanction trouve particulièrement à s'appliquer dans
l'hypothèse de voisinage de réseaux Wi Fi installés
au sein de bâtiments distants de quelques dizaine de
mètres qui peuvent créer des perturbations. Cette situation
sanctionnée pénalement par les dispositions du CPT,
semble pourtant être aujourd'hui relativement répandue,
ce qui n'est pas sans poser de problèmes de responsabilité
pour les propriétaires des réseaux et les installateurs.
En
effet, le propriétaire et l'installateur du réseau sans
fil peuvent être considérés comme responsables du fait
de l'établissement du réseau sans autorisation ou des
perturbations affectant d'autres émissions hertziennes
autorisées. En outre, l'installateur pourra voir sa
responsabilité engagée au titre de son obligation de
conseil en sa qualité de professionnel. Indépendamment
de la problématique de la responsabilité pénale, le
propriétaire du réseau sans fil pourra mettre en cause
la responsabilité contractuelle de son installateur.
Les
entreprises privées ou publiques intéressées par l'établissement
d'un réseau sans fil WI FI doivent donc prêter la plus
grande attention aux mises en garde et aux conseils
de leurs installateurs, ainsi qu'aux dispositions de
leur contrat, sous peine de voir leur responsabilité
pénale engagée et de subir un préjudice financier important
du fait de la désinstallation du réseau ou de la suspension
du service.
Cette
attention particulière doit s'inscrire dans une démarche
de sécurisation juridique de leurs relations contractuelles
et de gestion des risques juridiques liés à l'établissement
et à l'exploitation d'un réseau de télécommunications.
Les
perspectives
De nouvelles décisions de l'ART attendues au cours des
24 prochains mois devraient encore assouplir le cadre
juridique de l'établissement des réseaux sans fil de
type RLAN. A partir de 2004, les réseaux sans fil RLAN
devraient pouvoir être exploités sur tout le territoire
en utilisant la totalité de la bande de fréquence 2,4
GHz en intérieur et en extérieur, en fonction du résultat
des discussions qui vont être menées par l'ART avec
le Ministère de la Défense.
A
ce jour, de telles conditions d'utilisation ont été
permises par le Ministère de la Défense dans 38 départements,
une liste complémentaire de départements devant être
publiée au cours de l'année 2003. A l'issue de la période
d'expérimentation de 18 mois, l'ART devrait faire un
nouveau point de situation sur la base des bilans d'expérimentation
qui seront communiqués par chacun des titulaires d'une
autorisation. Dans cette attente, les entreprises privées
et publiques concernées doivent rester vigilante et
anticiper les risques juridiques liés à l'établissement
et à l'exploitation de ce type de réseaux.
[franklin.brousse@dblegal.net]
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