Le
ministère de l'Economie, des finances et de l'Industrie
vient de proposer sur son site la consultation préalable
d'un projet d'instruction établi par la Direction de
la législation fiscale relatif au régime fiscal des
dépenses liées à la création ou à l'acquisition de sites
Web par les entreprises. Ce projet vient préciser la
position de l'administration fiscale au regard de la
pratique de certaines entreprises en matière de déduction
de ce type de dépenses.
Les
sites Web assimilés aux logiciels
Ces dépenses seront prochainement
assimilées au plan fiscal à celles engagées par les
entreprises pour la création ou l'acquisition de logiciels.
Il s'agit d'une incitation fiscale forte destinée à
favoriser les investissements des entreprises dans la
création ou l'acquisition de sites Web et, de ce fait,
le développement ou le renouvellement des sites "vitrines"
ou de commerce électronique en France.
Ce
projet d'instruction est fondé sur les dispositions
de l'article 236 - I du Code général des impôts aux
termes desquelles les dépenses de fonctionnement exposées
dans les opérations de conception de logiciels peuvent,
au choix de l'entreprise, être immobilisées ou déduites
des résultats de l'année ou de l'exercice au cours duquel
elles ont été exposées. Ces dispositions ne concernent
pas les dépenses engagées par les prestataires qui conçoivent
et réalisent des sites Web pour le compte de leurs clients.
Distinction
entre les dépenses de création, d'acquisition et d'exploitation
d'un site
Le projet d'instruction distingue
les dépenses exposées pour la création et l'acquisition
d'un site Web des dépenses engagées au titre de l'exploitation.
Les dépenses de création sont
assimilées à des dépenses réalisées pour les besoins
propres de l'entreprise pouvant être immédiatement déduites
du résultat imposable ou être amortis dans les conditions
fixées par les règles comptables.
Le traitement fiscal des dépenses
d'acquisition conduit à considérer le site Web comme un élément
incorporel de l'actif immobilisé susceptible de faire l'objet
d'un amortissement exceptionnel sur une période de douze mois
ou d'un
amortissement linéaire pour la durée probable d'utilisation
du site Web. Il est probable que les entreprises recourent
le plus souvent à l'amortissement exceptionnel en raison de
la difficulté à apprécier la durée de vie d'un site Web et
la fréquence de ses refontes.
Les dépenses engagées au titre
de l'exploitation sont, elles, déductibles du résultat
au titre de l'exercice au cours duquel elles sont engagées.
Elles devraient notamment inclure les frais de maintenance,
de référencement et d'actualisation du contenu du site
ainsi que les frais de formation du personnel et d'adaptation
et de réorganisation des services de l'entreprise.
On peut déjà s'interroger sur
le seuil de tolérance et sur la nature et l'étendue
des dépenses qui seront admises par l'administration
fiscale au titre de la déduction des frais d'adaptation
et de réorganisation des services de l'entreprise. Les
dépenses engagées, dans la phase d'exploitation du site
Web, au titre de l'évolution de ses spécificités techniques
et fonctionnelles et donc de sa refonte totale ou partielle,
ne devraient pas être considérées comme étant engagées
au titre de l'exploitation mais analysées comme des
dépenses exposées pour la création ou l'acquisition
du site Web.
Les
dépenses liées à l'accès et à l'hébergement
Le projet d'instruction
prévoit que les dépenses afférentes aux contrats d'accès
et d'hébergement doivent constituer des "charges déductibles
au titre de l'exercice au cours duquel la prestation
est rendue". Il précise que lorsque l'hébergement du
site Web est réalisé sur un serveur, propriété de l'entreprise,
ce dernier doit être considéré comme un actif immobilisé
amortis sur sa durée normale d'utilisation.
Les dépenses liées l'hébergement
devraient ainsi avoir un régime fiscal distinct selon
qu'elles résulteront des frais d'abonnement auprès d'un
prestataire ou de l'acquisition d'un serveur hébergeant
le site Web au sein de l'entreprise.
Les
dépenses liées à l'accès et à l'hébergement
Pas de site Web
sans nom de domaine. Le projet d'instruction prévoit
que les dépenses de création et d'enregistrement seront
inscrites à l'actif de l'entreprise pour un prix comprenant
les frais d'enregistrement ou d'acquisition auprès d'un
tiers ainsi que les frais éventuels de création du nom
de domaine. Les redevances annuelles devraient être
considérées comme des charges déductibles de l'exercice
en cours.
Les dépenses de création
et d'enregistrement d'un nom de domaine ne devraient
pas faire systématiquement l'objet d'un amortissement
dans la mesure où il est difficile d'apprécier la durée
pendant laquelle le nom de domaine sera utilisé et l'entreprise
en sera en titulaire.
Lorsque le nom de domaine
et le site Web auquel il se rattache sont acquis dans
le cadre d'une même opération, l'acquisition du nom
de domaine relèvera du régime fiscal des éléments incorporels
d'un fonds de commerce, tels que les marques et le nom
commercial, dans la mesure où, comme pour les sites
de commerce électronique, il peut être rattaché à une
clientèle..
Un projet
d'instruction soumis à la consultation publique
Le projet d'instruction
fait l'objet, depuis le 28 octobre dernier et pour une
durée de trois mois, d'un forum destiné à recueillir
les observations des contribuables concernés afin de
mieux cerner leurs attentes et les difficultés pratiques
rencontrées jusqu'à aujourd'hui dans le traitement fiscal
de ce type de dépenses.
Bien évidemment, ce projet
n'engagera l'administration fiscale que lorsqu'il sera
publié au Bulletin officiel des impôts, date à laquelle
les termes de l'instruction lui seront opposables et
resteront, en tout état de cause, contestable dans la
mesure où une instruction fiscale n'a aucun pouvoir
normatif et ne fait qu'exprimer la position de l'administration
fiscale.
[franklin.brousse@dblegal.net
et ludovic.debus@dblegal.net]
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