Chacun
des 38 millions d'abonnés au téléphone mobile en France
(Chiffres de l'ART en date du 30 septembre
2003) verra très prochainement, sauf refus, son
numéro accessible au public grâce à la mise en place
de l'annuaire universel et d'un service universel de
renseignements. En effet, les opérateurs mettent actuellement
en uvre les dispositions du Décret n°2003-752 du 1er
août 2003 relatif aux annuaires universels et au service
universel de renseignements pris en application de l'article
L 35-4 du Code des Postes et Télécommunications. .
L'annuaire
universel ainsi qu'un service universel de renseignements
devraient donc permettre l'accès du public aux noms
et prénoms, et le cas échéant, aux raisons sociales
ou dénominations sociales, aux adresses et aux numéros
de téléphone fixe et/ou mobile de tous les abonnés.
Ils mentionneront également, si l'abonné l'a souhaité,
sa profession et une adresse électronique.
La publication de l'annuaire
universel incombe en premier lieu à France Télécom dans
le cadre du service universel qui lui est confié. Cependant,
le législateur a souhaité stimuler la concurrence dans
le secteur des annuaires et permettre aux éditeurs d'annuaires
et fournisseurs de services de renseignement d'accéder
aux listes d'abonnés des opérateurs. En outre, la protection
des données à caractère personnel et de la vie privée
reste primordiale dans ce texte.
1 -
L'ouverture à la concurrence
Il incombe en premier lieu à France Télécom, dans le
cadre de ses obligations de service universel, d'éditer
un annuaire universel et de fournir un service universel
de renseignements (Article L 35-4 du Code des Postes
et Télécommunication inséré par l'ordonnance du 25 juillet
2001).
Néanmoins, l'objectif affiché
du législateur est d'ouvrir à la concurrence le marché
de l'édition d'annuaires et de fourniture de services
universels de renseignements. Ainsi, le Décret du 1er
août 2003 oblige les opérateurs à communiquer leur(s)
liste(s) d'abonnés à toute personne souhaitant éditer
un annuaire universel ou fournir un service universel
de renseignements.
L'article 6 de la Directive
du 26 février 1998 (Directive 98/10/CE
du Parlement européen et du Conseil du 26 février 1998
concernant l'application de la fourniture d'un réseau
ouvert (ONP) à la téléphonie vocale et l'établissement
d'un service universel des télécommunications dans un
environnement concurrentiel) imposait aux Etats
Membres de veiller à ce que les opérateurs répondent
à toutes les demandes raisonnables de se voir accorder
un accès aux coordonnées des abonnés. Le caractère raisonnable
de la demande n'est plus une condition explicite dans
le texte français. Les modalités de cette communication
(transfert de fichiers ou accès à une base de données)
sont laissés à la libre définition de l'opérateur et
de son co-contractant.
Corollaire de l'obligation
de communication, les opérateurs doivent également transmettre
une base d'abonnés à jour. Ainsi, ces derniers doivent
mettre à jour leur(s) base(s) de données dans un délai
n'excédant pas deux jours ouvrables suivant la souscription
du contrat par l'abonné, ou la réception des données
transmises par les distributeurs. Il est donc important
que les termes et conditions de cette communication
soient définies par contrat.
Enfin, cette communication
des listes d'abonnés et d'utilisateurs donne lieu à
rémunération de l'opérateur. Les tarifs de cette communication,
qui doivent refléter le coût du service rendu, sont
établis par les opérateurs selon le double principe
défini par le Décret :
(1) les coûts pris en compte sont ceux causés, directement
ou indirectement, par la fourniture des listes d'abonnés
(sont notamment cités l'amortissement du matériel informatique
et des logiciels nécessaires ;
(2) seuls les coûts spécifiques à la fourniture des
listes d'abonnés sont pris en compte, à l'exclusion
des coûts communs à d'autres activités.
La question de la rémunération
constitue, sans nul doute, la pierre angulaire du développement
de l'annuaire universel. Avant même la publication du
Décret, cette dernière a fait l'objet d'un débat devant
l'ART et le Conseil National de la Concurrence dans
le cadre du contentieux opposant les sociétés Iliad
et France Télécom (Décisions du Conseil
de la concurrence n° 02-D-41 du 26 juin 2002 et n° 03-D-43
du 12 septembre 2003, Décision de l'ART n° 03-1038 en
date du 23 septembre 2003).
2 -
La protection des abonnés
Droit à apparaître et droit à s'opposer. Le
Décret du 1er août 2003 contient de nombreuses dispositions
visant à protéger les données personnelles des abonnés,
conformément aux dispositions de la loi "Informatique
et Liberté" et des recommandations de la CNIL.
Le droit de figurer gratuitement
sur une liste d'abonnés destinée à être publiée est
en premier lieu reconnu à toute personne ayant souscrit
un abonnement au service téléphonique.
Le droit d'opposition est bien
entendu rappelé, puisque l'abonné peut obtenir gratuitement
de l'opérateur auprès duquel il est abonné (ou du distributeur)
la possibilité de ne pas figurer sur les listes d'abonnés
publiées.
Par ailleurs, l'abonné peut
refuser de voir apparaître :
(a) l'adresse complète de son domicile, sauf lorsque
l'activité professionnelle mentionnée consiste à fournir
des biens ou des services aux consommateurs,
(b) toute référence à son sexe,
(c) ou d'être mentionné dans les listes de recherche
inversée.
Il peut également refuser que
ses données soient utilisées dans le cadre d'opérations
de prospection directe. Tout démarchage non autorisé
peut être sanctionné par une contravention de quatrième
classe (voir les discussions actuelles autour du projet
de loi pour la confiance dans l'économie numérique).
Les abonnés doivent faire connaître
à leur opérateur ou distributeur, dans un délai de six
mois à compter du moment où ils ont été informés, leur
refus de figurer sur ces listes. A défaut, ils seront
réputés avoir consenti à figurer sur les listes destinées
à être publiées. Néanmoins, ces droits peuvent être
ensuite exercés à tout moment auprès de l'opérateur
ou du distributeur du service.
Le droit de communication et
de rectification est également maintenu, puisque l'annuaire
universel doit mentionner le droit pour les abonnés
listés d'obtenir communication des données à caractère
personnel les concernant, et de demander leur rectification,
leur mise à jour ou leur destruction.
Leurs garants. Les opérateurs
et leurs distributeurs sont tout d'abord garants de
l'information donnée. C'est en effet à ces derniers
qu'ils incombent d'informer les abonnés de leurs droits
d'apparaître sur ces listes et de s'y opposer, de la
nature des données listées, ainsi que du délai imparti
pour formuler leur opposition.
Les opérateurs doivent, par
ailleurs, prendre les précautions nécessaires afin d'assurer
le contrôle de l'exactitude des données figurant dans
les listes et de la qualité, notamment technique, de
ces dernières. Néanmoins, l'étendue de cette obligation
reste incertaine : s'agit-il de vérifier la conformité
aux informations déclarées par l'abonné ou l'exactitude
des données elles-mêmes ?
Les éditeurs d'annuaire universel
et les fournisseurs de service universel de renseignements
sont, quant à eux, garants de la sécurité des informations.
Ils prennent en effet les mesures nécessaires pour préserver,
compte tenu des techniques disponibles, la sécurité
physique et logique des informations qui leur ont été
transmises. Pour éviter toute communication à des tiers
non autorisés, ils se doivent de prendre toutes dispositions,
notamment contractuelles, vis-à-vis de leurs agents
et de leurs partenaires commerciaux.
L'annuaire universel constitue
donc une nouvelle étape dans les règles d'harmonisation
et de libre concurrence dans le secteur des télécommunications.
Mais, il est source de nombreuses difficultés entre
professionnels, et entre ces derniers et leurs clients.
[Marc.dHaultfoeuille@CliffordChance.com]
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