JURIDIQUE 
PAR MARC D'HAULTFOEUILLE
La loi redéfinit la qualité des services télécoms
Depuis le 26 juillet, de nouvelles règles encadrent la qualité des services des opérateurs télécoms et leurs obligations en matière de sécurité. Un domaine devenu hautement stratégique.   (06/09/2005)
 
Marc d'Haultfoeuille est avocat associé, Clifford Chance.
 
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Personne ne peut oublier la panne informatique de l'opérateur Bouygues Télécom du mois de novembre 2004 et encore moins l'horreur des attentats terroristes récents de Londres. Le décret n°2005-862 du 26 juillet 2005 en découle directement avec deux idées essentielles : encadrer la qualité des services des opérateurs et leurs obligations en matière de sécurité publique. Ce décret est d'ailleurs co-signé par les Ministères de l'Intérieur et de la Défense, associés au Ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie.

Les principales dispositions
Tout d'abord, tout opérateur doit prendre les dispositions nécessaires pour assurer :

- l'exploitation permanente et continue du réseau et des services de communications électroniques en remédiant dans les délais les plus brefs aux effets de la défaillance du système et en mettant en œuvre les protections et redondances nécessaires pour garantir une qualité et une disponibilité de service satisfaisantes, ainsi qu'un accès ininterrompu aux services d'urgence (article D. 98-4 I) ;

- la mise en œuvre des équipements et procédures nécessaires pour que les objectifs de qualité de service demeurent au niveau prévu par les normes en vigueur, notamment en ce qui concerne les taux de disponibilité et d'erreur de bout en bout (article D. 98-4 II). De toute évidence, ces dispositions et leurs mises en œuvre peuvent relancer le débat sur la qualification d'obligation de moyens ou de résultat des opérateurs vis-à-vis de leurs clients (cf. TGI Nanterre du 10 septembre 2003 et CA Versailles du 2 février 2004) ;

- la protection, l'intégrité et la confidentialité des données à caractère personnel qu'ils détiennent et qu'ils traitent en permettant à chacun de leurs clients de s'opposer gratuitement et par un moyen simple, appel par appel ou de façon permanente, à l'identification de leur ligne par les postes appelés (article D. 98-5 II) ;

- la sécurité des communications empruntant leur réseau en se conformant aux prescriptions techniques en matière de sécurité éventuellement édictées par l'Arcep et en informant leurs clients des services existants permettant de renforcer la sécurité des communications ainsi que, lorsqu'il existe un risque particulier de violation de la sécurité du réseau, de tout moyen éventuel pour y remédier et du coût que cela implique (article D. 98-5 III).

De plus, l'opérateur doit prendre toutes les mesures de nature à garantir la neutralité des services fournis vis-à-vis du contenu des messages transmis sur son réseau et le secret des correspondances en assurant ses services sans discrimination et en prenant les dispositions utiles pour assurer l'intégrité des messages (article D. 98-5 I).

Les règles afférentes à la sécurité publique
Le décret prévoit par ailleurs des règles portant sur les prescriptions exigées par l'ordre public, la défense nationale et la sécurité publique. En effet, l'opérateur doit respecter "l'ordre des priorités" et les conditions générales de rétablissement des liaisons concernant plus spécialement des services de l'Etat et des organismes chargés d'une mission d'intérêt public ou contribuant aux missions de défense et de sécurité publique.

En outre, l'opérateur doit mettre en place et assurer la mise en œuvre des moyens nécessaires pour les interceptions des correspondances émises par la voie des télécommunications (écoutes téléphoniques) par les autorités habilitées, en désignant notamment des agents qualifiés au sein de son organisation (article D. 98-7 III). Les dispositions spécifiques prises par l'opérateur à la demande de l'Etat feront l'objet d'une convention avec l'Etat garantissant une juste rémunération de l'opérateur (article D. 98-7 IV). Ces règles ne sont pas nouvelles. Cependant, l'aspect essentiel (la notion de "juste rémunération") reste imprécis à ce stade.

L'opérateur doit permettre également, dans le cadre des missions judiciaires ou d'interventions de secours, aux services, d'accéder sans délai, directement ou par son seul intermédiaire, à sa liste mise à jour d'abonnés et d'utilisateurs. En tout état de cause, l'opérateur doit se conformer aux décisions ou instructions des autorités judiciaires, militaires ou de police ainsi qu'à celle du Ministre chargé des communications électroniques (article D. 98-7 V).

Une information consommateur plus transparente
Le décret précise (article D. 98-12 I) les règles portant sur l'information et la protection des utilisateurs. L'opérateur doit mettre à disposition du public, dans les points de vente et par un moyen téléphonique ou électronique accessible en temps réel à un tarif raisonnable, des informations tenues à jour concernant ses conditions générales et contractuelles de fourniture du service précisant (a) les conditions de renouvellement des contrats, toute durée contractuelle minimale, les conditions relatives à la qualité de service, les délais de fourniture et les types de services de maintenance offerts ; (b) la description des services offerts s'agissant du service téléphonique au public ; (c) les tarifs de ses offres y compris les formules de réductions tarifaires et (d) les formules d'indemnisation et de remboursement proposées ainsi que les mécanismes de règlement des litiges. A cet égard, chaque utilisateur doit recevoir les contrats conclus avec l'opérateur pour les prestations qu'il souscrit (article D. 98-12 II).

Enfin, il est à noter que, lorsque l'opérateur fait appel à des sociétés de commercialisation de services (grossiste, grande distribution, distributeur spécialisé), il doit veiller, dans ses relations contractuelles, au respect par ces sociétés de ses obligations prévues par le Code des Postes et des Communications Electroniques (CPCE). L'ARCEP pourra également contrôler ces conditions contractuelles en vue de vérifier leur conformité avec le Code de la consommation, ainsi que les informations mises à disposition des utilisateurs (article D. 98-12 II).

Ce décret s'applique à tout opérateur, mais également aux nouveaux entrants, les Mobile Virtual Network Operator (MVNO). En effet, certaines dispositions leurs sont tout particulièrement applicables puisqu'ils ne sont qu'hébergés sur le réseau d'un opérateur mais disposent de leurs propres clients. Sur d'autres dispositions de ce texte (notamment celles sur la sécurité), chaque opérateur devra collaborer avec ses MVNO, selon des modalités à convenir.

 
 

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