JURIDIQUE 
PAR ARNAUD DIMEGLIO
Fraude aux clics : les recours judiciaires
Depuis la parution, cet été, d'une étude américaine estimant la fraude aux clics, le marché des liens promotionnels est en ébullition. Mais que risquent les instigateurs de cette pratique et comment la prouver ? Détails avec Arnaud Dimeglio.  (18/09/2006)
 
Avocat à la Cour, docteur en droit
 
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La fraude aux clics est apparue avec le développement des liens promotionnels, lesquels permettent à un annonceur de diffuser une publicité sur un support (page de résultat d'un outil de recherche, ou d'un site affilié), et de ne payer ce dernier qu'en fonction du clic sur le lien. La fraude aux clics consiste à cliquer sur le lien promotionnel de façon à générer pour l'annonceur un paiement indu au support.

Deux types de personnes ont généralement intérêt à ce type de fraude : les concurrents de l'annonceur, lesquels voient alors le budget de leur adversaire diminuer, et les supports - au premier rang desquels les moteurs - qui voient leurs recettes augmenter.

La responsabilité des concurrents
La fraude aux clics peut tout d'abord provenir d'un concurrent de l'annonceur qui, en cliquant sur son annonce, engendre un paiement indu au support.

Ce type de comportement constitue sans nul doute un acte de concurrence déloyale qui peut engager la responsabilité de son auteur, et avoir pour sanction le paiement de dommages et intérêts.

Pour engager cette responsabilité, l'annonceur devra tout d'abord apporter la preuve que le concurrent a cliqué de manière fautive sur son annonce. Des logiciels permettent de tracer l'origine des clics et d'identifier leurs auteurs.

Mais le seul fait pour un concurrent de cliquer sur l'annonce n'est peut être pas en soi un comportement déloyal. En effet, une personne peut tout à fait vouloir visiter le site de son concurrent pour effectuer notamment une "veille concurrentielle".

En revanche, pourrait être considéré comme frauduleux, le clic qui se manifeste par sa répétition, sa fréquence, et qui a pour effet de diminuer le budget de campagne de son adversaire. Toute la difficulté sera de savoir à partir de combien de clics, de quelle fréquence, ceux ci pourront être considérés comme frauduleux.

Il appartiendra naturellement aux tribunaux d'effectuer, au cas par cas, une telle estimation. Pour que la responsabilité du concurrent soit engagée, il faudra enfin que l'annonceur apporte la preuve de son préjudice. Le clic ayant un coût, il peut être aisé de déterminer ce dernier.

Néanmoins, les moteurs prenant parfois l'initiative de ne pas comptabiliser les clics frauduleux, il pourra s'avérer difficile d'estimer ce dernier. Seule une analyse entre les clics comptabilisés par chacun de ce type de logiciels pourra permettre de définir précisément le préjudice subi par l'annonceur.

La responsabilité des moteurs
Les moteurs de recherche, qui sont les principaux à éditer dans leurs pages de résultat les liens promotionnels, peuvent également avoir intérêt à la fraude aux clics.

En effet, plus de clics sont effectués sur l'annonce, plus leur chiffre d'affaires augmente. Les partenaires des moteurs (sites affiliés, régies, agence de publicité), en percevant des commissions, peuvent également profiter de la fraude.

Il ne fait pas de doute que le fait, pour les moteurs comme pour leurs partenaires, de cliquer frauduleusement sur un lien, de façon manuelle ou automatique, constitue un acte grave qui pourrait engager leur responsabilité pénale, pour abus de confiance ou escroquerie, en qualité d'auteur, ou de complice.

En revanche, la question de la responsabilité du moteur en raison des clics effectués par des tierces personnes (moteurs, concurrents, affiliés, intermédiaires) est plus délicate. En effet, le moteur n'est pas forcément au courant de la fraude, et n'est pas susceptible de connaître l'identité du fraudeur.

Ce qui ne signifie pas que leur responsabilité ne peut être engagée : comme toute personne, les moteurs doivent observer une certaine diligence. Certains moteurs ont d'ailleurs mis en place des logiciels qui permettent de détecter les fraudes, et de ne pas comptabiliser les clics frauduleux.

Ils doivent également, pour prévenir ce type de comportement, veiller à l'interdire dans leurs conditions générales, comme dans les contrats qu'ils concluent avec leurs partenaires. A défaut, leur responsabilité risque d'être engagée au côté de l'auteur du clic.

C'est dans ce contexte qu'aux Etats-Unis, pour mettre fin à une procédure judicaire, dans l' "affaire Lane's Gifts", le célèbre moteur de recherche Google a transigé avec des annonceurs à hauteur de 90 millions de dollars. Enfin, concernant les partenaires des moteurs (affiliés et intermédiaires), outre les représailles des annonceurs, ils encourent la rupture de leur contrat avec le moteur, et des sanctions financières.

 
 

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