Yann
Rousselot-Pailley (Present Profit)
"Au
Canada, il n'y a pas de tapis rouge pour l'immigration d'affaires"
Depuis cinq ans, Yann Rousselot-Pailley aide les Français
qui veulent s'installer au Canada pour se lancer dans les affaires.
Une immigration pas toujours idyllique. (11
juillet 2003)
Chaque année, plus de 2 500 Français s'expatrient
au Canada. Ils y rejoignent une communauté évaluée
à 150 000 Français, dont près des deux-tiers
vivent dans la province du Québec. Cette immigration est à
la fois étudiante (25 % des Français qui partent
au Canada ont moins de 20 ans) et économique. Un flux que
le gouvernement canadien appelle de ses voeux face à la sous-population
du pays et au faible taux de natalité. Malgré cette
incitation, les embûches et les désillusions demeurent pour
les prétendants. Pour éviter ces écueils, Yann
Rousselot-Pailley, installé au Canada depuis cinq ans, et
aujourd'hui partner du cabinet Present Profit, accompagne les candidats
français à l'immigration économique, baptisée
immigration d'affaires.
Comment
vous est venue l'idée d'accompagner les Français candidats
à l'immigration d'affaires ?
Yann Rousselot-Pailley.
De mon propre parcours. Il y a cinq ans, lorsque j'ai décidé
de m'expatrier au Canada, je m'attendais à une forme d'assistance
locale pour me faciliter la vie et les démarches. Or il y
a un énorme décalage entre la communication réalisée
par le Canada en faveur de l'immigration et les moyens mis en oeuvre
pour aider les immigrés d'affaires à s'installer.
Le tapis rouge n'est pas déroulé et il faut être
vigilant pour ne pas rater les opportunités en matière
d'aide.
Quels sont les grands problèmes
rencontrés par les immigrés français ?
Outre les formalités classiques, qui consomment du temps,
les problèmes rencontrés par les Français sont
de deux natures. Il y a tout d'abord l'aspect culturel. Croire que
les Québécois sont comme les Français parce
qu'ils sont francophones est la plus grosse erreur que l'on puisse
faire. Les mentalités sont très différentes
et, parfois, s'installe une sorte d'incompréhension mutuelle. Or
cette différence culturelle influence directement l'activité
économique : on ne conçoit pas au Canada un plan
marketing, un business-plan ou une négociation de la mème
manière qu'en France. Beaucoup d'immigrés d'affaires
se heurtent à cette réalité en se voyant refuser,
par exemple, un financement pas les banques canadiennes. L'autre
famille de problèmes rencontrés par les immigrés
d'affaires concerne l'obtention des allégements fiscaux et des subventions.
C'est un véritable dédale dans lequel il faut savoir
saisir les bonnes occasions.
Et quelles sont les meilleures opportunités
économiques ?
Pour détecter les meilleures opportunités économiques,
il y a deux logiques à comprendre. La première concerne
la fiscalité canadienne qui est majoritairement basée
sur l'impôt sur les revenus plutôt que sur la TVA. La
valeur économique d'un candidat immigré est en conséquence
mesurée sur sa capacité à créer de l'emploi
plutôt que sur sa simple valeur commerciale. Cette grille
de lecture impacte directement les aides possibles. La seconde logique
est celle des priorités gouvernementales. Certaines régions
et certains secteurs d'activité bénéficient
de subventions particulières.
Que peuvent représenter ces
subventions ?
Par exemple, sur les activités de R&D, les subventions
peuvent atteindre 80 % de la masse salariale pour les petites
entreprises. En moyenne, sur tous les secteurs d'activité,
les différentes subventions portent sur 30 à 50 %
de la masse salariale. Mais il ne faut pas toujours raisonner à
partir des subventions. Le Canada peut être une première
tête de pont pour l'Amérique du Nord. Beaucoup d'entreprises
installent une filiale au Canada pour s'acclimater au marché
américain avant de s'attaquer aux Etats-Unis. Montréal
n'est qu'à quelques heures de route de New York.
Comment déterminer un plan d'action
pour le candidat à l'immigration ?
Au-delà des nombreuses institutions avec lesquelles il faut
prendre contact, il est nécessaire de se rendre sur place
avant de plonger. Il faut impérativement voir de ses yeux.
Certaines régions bénéficient par exemple de
subventions très alléchantes, mais une fois sur place,
on s'aperçoit qu'il n'y a aucune infrastructure logistique
pour permettre à une entreprise de se développer.
Il faut également rencontrer d'autres expatriés afin
de connaître les pièges et les astuces. C'est d'ailleurs
un service que nous proposons aux candidats à l'immigration.
Quels sont les différents statuts
dont peuvent bénéficier les immigrés d'affaires ?
Il existe trois statuts. Il y a tout d'abord les immigrés
investisseurs, capables de justifier d'un capital personnel d'environ
500 000 euros et d'apporter un financement de 250 000
euros. Ces 250 000 euros sont placés sur cinq ans dans
un fonds d'investissement provincial et territorial. En échange,
vous n'avez aucune obligation d'activité économique
au Canada.. Il y a ensuite les immigrés entrepreneurs, capables
de justifier d'un capital de 130 000 euros. Vous bénéficiez
de deux années pour développer, acheter ou financer
une entreprise au Canada. Il y a enfin le travailleur autonome qui
doit démontrer sa capacité de mettre sur pied ou d'acheter une entreprise
au Canada. Le niveau de son capital doit correspondre au financement
nécessaire à la mise en place du projet. Enfin, pour
tous ces statuts, les candidats doivent justifier d'une expérience
professionnelle.
Quels services proposez-vous à
ces différents candidats ?
Nous proposons une palette complète de services qui va de
l'obtention du visa au conseil, en passant par la recherche de subventions.
Pour cette dernière activité, nous nous rémunérons
au résultat en prélevant un pourcentage sur les subventions
et les aides obtenues.
L'échec est-il courant parmi
les immigrés d'affaires ?
La communauté française se débrouille globalement
bien au Canada avec un taux de chômage inférieur à
5 %. Mais au niveau de la réalité quotidienne, les
choses sont plus compliquées que l'on ne les imagine quand
on est en France, d'autant plus que les immigrés entretiennent
eux-mêmes l'image de l'eldorado.
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