A Lyon, il flotte comme un parfum de Simcity chez France Télécom.
Dans le réaménagement du carrefour situé juste en bas de leur nouvel
immeuble dans le secteur de la Part-Dieu, certains salariés
de France Télécom peuvent venir donner leur avis sans passer pour
intrus. Ces salariés, véritables urbanistes en herbe,
participent au plan de déplacements d'entreprise (PDE).
A l'heure
où la qualité de l'environnement est une valeur montante,
le PDE s'avère être de plus en plus à la mode
dans les grandes entreprises. L'idée de la démarche
est simple : rationaliser les déplacements effectués
par les salariés, tout en incitant à l'usage des modes
alternatifs (transports collectifs, vélo, marche à pied, covoiturage...).
La mise en place d'un PDE, réalisée avec l'aide d'un
cabinet de conseil, se fait selon une méthodologie très précise,
définie par l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise
de l'énergie). L'Agence participe d'ailleurs au financement de chaque
opération.
Plusieurs entreprises se sont déjà lancées
dans un PDE. C'est le cas de STMicroelectronics et Hewlett Packard
à Grenoble (Isère), d'Aventis à Marcy l'Etoile (Rhône) ou encore
de PSA Peugeot Citroën à Vélizy (Yvelines). Pour la direction régionale
Ain-Loire-Rhône de France Télécom, le projet a démarré
en 2001. L'opérateur décide alors de réorganiser son
réseau d'agences commerciales et d'en regrouper plusieurs sur Lyon.
Pour accueillir ce conglomérat d'agences, un nouvel immeuble voit
le jour, portant à 1 500 le nombre de salariés France
Télécom dans le quartier de la Part-Dieu. Mais dans
le respect de la loi SRU (Solidarité et renouvellement urbain),
le nouvel immeuble destiné à 700 personnes ne pouvait contenir que
200 places de parking. Que faire ?
"Nous avons décidé d'apporter une réponse globale aux problèmes
de stationnement et de nous engager dans une démarche de PDE, explique
Gérard Brunel, responsable des relations sociales de la direction
régionale de France Télécom. Notre action s'intégrait dans une politique
plus large, notamment menée à l'échelle de la Ville de Lyon, qui
cherche à favoriser les transports en commun."
Le
nouvel immeuble de France Télécom à Lyon
et son carrefour
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Premier axe de travail du PDE : réviser les critères d'attribution
des 200 précieuses places de parking avec les syndicats.
L'handicap, les horaires de travail, le nombre d'enfants à charge
et la distance domicile-bureau sont pris en compte pour faire profiter
en priorité de ce stationnement aux salariés contraints
de se déplacer en voiture.
Dans la foulée, courant 2002, la direction régionale de
France Télécom réalise une enquête sur les modes de
déplacement des salariés et sur les conditions susceptibles de les
faire changer. Sur ce volet, l'opérateur téléphonique
est aidé par un cabinet de conseil qui réalise notamment
une cartographie pour repérer les zones de concentration des domiciles
des salariés. Verdict : la plupart des salariés habitent à
Lyon ou à Villeurbanne, 34 % habitant à moins de 5 km
du lieu de travail. "A l'époque, 49 % des salariés
utilisaient la voiture pour venir au bureau, ce qui est déjà un
chiffre relativement bas pour Lyon, explique Gérard Brunel.
Avec le PDE, l'objectif est d'atteindre les 23 % en 2006."
En parallèle à cette enquête, la direction
générale de France Télécom décide
de mener des actions de communication interne. Au programme :
journées de sensibilisation et mini-expositions sur les thèmes des
transports et de l'environnement. "Surtout, nous avons proposé aux
salariés de participer à des groupes de créativité. Une cinquantaine
de personne a ainsi réfléchi et échangé sur le sujet pendant trois
mois."
Ces réflexions vont être suivies de mesures très concrètes.
Pour les transports en commun, France Télécom décide ainsi
de négocier avec le Sytral (autorité organisatrice des transports
en commun de l'agglomération lyonnaise) et les TCL (Transports en
commun lyonnais) une tarification spéciale. Les discussions portent
leurs fruits : les salariés qui le souhaitent bénéficient
d'un "City Pass" pour accéder aux transports en
commun de 31,70 euros par mois (sur onze mois) au lieu de 42,50
euros. France Télécom prend à sa charge les deux tiers de la différence,
le Sytral le reste. "Aujourd'hui, 370 salariés se sont abonnés,
dont une soixantaine de nouveaux convertis" se félicite Gérard Brunel.
Il
faut avoir une contrainte de départ"
Gérard Brunel, France Télécom
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Après l'attribution des places de parking puis la négociation
d'un tarif préférentiel pour les transports en commun,
la direction générale de France Télécom
s'est penchée sur un autre aspect du dossier : les trajets
à pied. "En matière de sécurité, un carrefour réputé dangereux
(Ndlr : Vivier Merle-Félix Faure) a été réaménagé à la rentrée
2003. Nous avons pu donner notre avis et participer aux travaux,
notamment par des visites de chantier."
Pendant l'été 2003, le cheminement piétonnier entre le métro et
les bâtiments a ainsi été sécurisé et aménagé pour les handicapés.
"Ces travaux auraient été faits de toute façon. Mais le fait que
nous les réclamions a été un accélérateur." Une logique que
l'opérateur compte appliquer dans les mois à venir
pour les trajets effectués en vélo. France Télécom
participe au PDU (Plan de développement urbain) de Lyon, qui vise
à favoriser les modes de transport "doux".
Afin de faire du PDE un véritable mode d'organisation, même
l'Internet a été appelé à la rescousse.
Des "e-bureaux", selon l'expression de France Télécom, ont été aménagés
à Saint-Etienne, à Roanne et à Bourg-en-Bresse permettant
à certains salariés de ne pas se déplacer sur Lyon certains
jours de la semaine. Dans le même esprit, le système de réunion
à distance Coop'Net, qui couple la conférence téléphone et le partage
de documents sur l'écran de l'ordinateur, a été généralisé dans
les agences de la région.
"Pour mener à bien un tel projet, je pense qu'il faut avoir une
contrainte de départ, estime Gérard Brunel. Sans aucune contrainte,
il est très difficile de changer les comportements." A Lyon,
la contrainte de départ du PDE engagé par France Télécom
a été la limitation des places de stationnement de
la loi SRU. Une contrainte que l'opérateur a transformé
en levier pour un budget, au final, raisonnable. En tout, le PDE
a nécessité une enveloppe de 80 000 euros, la
moitié ayant été financée par l'Ademe.
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