Expert
12/01/2005
Par
Bruno Courtine et Bastien Ottaviani (Falque & Associés)
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Si le stage constitue souvent le premier contact d'un lycéen ou étudiant avec le monde du travail, il peut aussi permettre de parfaire une formation ou de sanctionner une fin de cycle et conditionner son obtention. Il pourra alors conduire l'entreprise à proposer au stagiaire un véritable contrat de travail. Même non obligatoire, le stage est toujours très prisé et constitue une véritable valeur ajoutée sur le CV d'un candidat. Toutefois, malgré le nombre croissant des stages, aucune réflexion d'ensemble n'a été engagée sur la nature juridique du contrat et sur le statut du stagiaire. C'est donc encore un droit morcelé qui s'applique. Dans ce contexte, quelques précautions s'imposent.
1.
Distinguer les stages obligatoires ou facultatifs.
Sont obligatoires les périodes de formation en milieu
professionnel, prévues par le règlement intérieur de l'établissement
d'enseignement et inscrits dans le processus de scolarité. C'est
le cas des "stages élèves" de l'enseignement secondaire destinés
essentiellement à découvrir le monde de l'entreprise et des "stages
étudiants" de l'enseignement technologique ou supérieur, faisant
partie intégrante du cursus de formation et permettant d'obtenir
un diplôme ou un titre. Par exemple, pour les élèves d'IUT, les
élèves ingénieurs, les élèves d'école de commerce, de management,
les étudiants de DESS ou inscrits à des magistères qui doivent compléter
l'enseignement théorique de leur école par une expérience sur le
terrain avant examen.
2. Rédiger une convention de stage
La convention de stage est un contrat passé entre un
établissement d'enseignement (en général, le rédacteur), le stagiaire
et l'entreprise d'accueil, que celle-ci se trouve en France ou à
l'étranger, dès lors que le stagiaire est un ressortissant français.
Si une entreprise peut toutefois conclure directement une convention
bilatérale de stage pour délivrer un complément de formation professionnelle
à une personne, elle risque d'être requalifiée dans la mesure où
seule la formation peut être l'objet du contrat de stage, non la
mise en pratique d'enseignements.
La signature d'un écrit est recommandée" |
Si aucune réglementation n'impose la signature d'un écrit, même pour le stage inscrit dans un cursus scolaire, il est recommandé d'en prévoir dans tous les cas. A défaut, le stage sera considéré comme non obligatoire au regard de la Sécurité sociale. Son régime devient alors moins avantageux pour l'entreprise au plan des cotisations sociales.
Bien que sa forme soit libre, l'entreprise veillera à y faire figurer le nom et l'adresse des signataires, la formation, le suivi, l'objet du stage, les dates et la durée du stage, le nom de la personne chargée du suivi du stagiaire dans l'entreprise et son rôle, le nom de la personne chargée du suivi du stagiaire dans l'établissement de formation, les modalités de protection contre le risque d'accident du travail, le montant ou non d'une gratification, les éventuels avantages en nature qui seront consentis au stagiaire, les horaires du stagiaire, l'assurance en responsabilité civile pour les dommages qu'il pourrait occasionner, le principe de l'application de certaines dispositions du règlement intérieur relatives à la discipline, la sécurité, la circulation dans les locaux, l'utilisation du matériel, les modalités de suivi de déroulement du stage ainsi que certains engagements spécifiques du stagiaire (confidentialité).
S'ils n'étaient pas respectés par l'employeur, la convention pourrait se voir requalifiée en contrat de travail par un conseil de prud'hommes.
3. Connaître les obligations de l'employeur...
L'employeur n'a pas à respecter vis-à-vis du stagiaire
l'ensemble des obligations qu'il assume envers son personnel. Le
juge a estimé qu'il n'est pas non plus en droit d'exiger de lui
un "travail productif", c'est-à-dire un poste qui pourrait être
confié à un salarié à part entière.
Si des cotisations sont versées, un bulletin de paie doit être établi" |
En l'absence de contrat de travail, l'employeur n'a pas à effectuer de démarche particulière : ni déclaration préalable d'embauche, ni immatriculation à la Sécurité sociale (déjà effectuée par l'école, ou les parents ou à titre personnel), ni inscription sur le registre du personnel (ne faisant pas partie des effectifs, le stagiaire n'est pas comptabilisé pour le calcul des seuils retenus pour l'application des dispositions de droit du travail et ne participe pas aux élections professionnelles), ni organisation d'une visite médicale.
Si l'entreprise n'est pas légalement tenue de verser une rémunération aux élèves et étudiants, non salariés de l'entreprise, elle peut le faire à titre facultatif et gracieux. Tant que cette indemnisation (en espèces et/ou nature) ne dépasse pas, en valeur, 30 % du smic mensuel pour un stage obligatoire, ou 25 % pour un stage facultatif ou assimilé au regard de la Sécurité sociale, elle peut faire l'objet d'une exonération parfois totale, tantôt partielle de cotisations sociales. Si ces seuils sont dépassés, elle revêt le caractère d'une rémunération passible des charges habituelles de l'entreprise.
Si des cotisations sont versées, un bulletin de paie doit être établi. En revanche, aucun document ne doit accompagner la remise du ou de ses chèques au stagiaire si aucune cotisation n'a à être versée, même si la remise d'un reçu signé est fréquente.
4. ... et celles du stagiaire
Le jeune stagiaire, non lié à l'employeur par un lien
de subordination, n'a donc pas non plus les mêmes obligations qu'un
salarié.
L'employeur ne peut pas demander d'effectuer des heures supplémentaires " |
L'employeur ne peut ainsi demander au jeune stagiaire, qui n'a pas la qualité de salarié, de travailler le dimanche, aucune dérogation n'étant prévue par le code du travail en ce qui le concerne. Il ne peut pas non plus lui demander d'effectuer des heures supplémentaires (article 900-2-1). La durée de son travail ne peut, en effet, excéder la durée légale hebdomadaire et la durée quotidienne du travail fixée par L.121-1 du code du travail. Par ailleurs, sont notamment applicables au stagiaire les dispositions applicables au travail des mineurs, le cas échéant - en particulier l'interdiction du travail de nuit - ainsi que celles relatives au repos hebdomadaire et dominical, en particulier l'impossibilité de déroger aux règles en la matière pour les mineurs.
N'ayant pas la qualité de salarié, le stagiaire ne peut non plus prétendre à des vacances : ses jours travaillés ne donnent pas lieu à des congés payés.
En
savoir +
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Le stagiaire doit toutefois se plier aux horaires ainsi qu'aux règles de discipline générale et d'hygiène et de sécurité. En cas de manquement, le stage peut être interrompu après information de l'établissement d'enseignement quand il est partie au contrat. Il n'a pas à cotiser pour sa retraite complémentaire, ni pour l'assurance chômage.
5. Savoir quel régime social appliquer
Il dépend de la nature du stage et de la proportion de
la gratification par rapport au SMIC.
Type
de stage
|
Gratification
|
Régime
social
|
Obligatoire Risque d'accident du travail couvert par l'établissement d'enseignement |
< 30% du SMIC (365 en 2004) |
Aucune cotisation |
> 30% du SMIC | Ensemble des cotisations sociales, patronales et salariales sur la totalité de la gratification + CSG + CRDS dès le 1er euro | |
Obligatoire
Risque d'accident du travail non couvert par l'établissement d'enseignement |
< 30% du SMIC (365 en 2004) |
Cotisation patronale de Sécurité sociale sur la valeur forfaitaire de la formation professionnelle |
> 30% du SMIC | Ensemble des cotisations sociales, patronales et salariales sur la totalité de la gratification + CSG + CRDS dès le 1er euro | |
Facultatif | < 25% du SMIC ( 304 en 2004) |
Cotisation patronale de Sécurité sociale sur la valeur forfaitaire de la formation professionnelle |
> 25% du SMIC | Ensemble des cotisations sociales, patronales et salariales sur la totalité de la gratification + CSG + CRDS dès le 1er euro | |
Parcours
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Falque & Associés, créé en
1997, comprend aujourd'hui une quarantaine d'avocats intervenant
principalement en matière de droit des affaires, de fiscalité
et de droit social, tant en conseil qu'en contentieux, pour
une clientèle d'entreprises de toutes tailles, françaises
et internationales. Son département droit du travail et de
la protection sociale est dirigé par Bruno Courtine, un des
cofondateurs du cabinet. |
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