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09/02/2005
Par
Stéphane Waller, directeur de Meltis
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Procter & Gamble (P&G) a annoncé une OPA amicale sur son concurrent nord-américain, n°1 du marché mondial du rasage, Gillette. Un "marché de rêve" selon les mots du milliardaire Waren Buffett, principal actionnaire de Gillette, une "fusion idéale" selon la plupart des analystes.
Deux
groupes pour un business
Quand deux piliers de l'industrie américaine de
biens de consommation fusionnent, cela bouleverse non seulement
le paysage du secteur (le groupe devient n°1 mondial devant Unilever,
par ailleurs en petite forme) mais aussi le rapport de force avec
les distributeurs (les deux groupes vendent dans les mêmes chaînes
de supermarchés). Le nouveau groupe ne pèsera pas moins de cinq
produits n°1 sur leur marché, la moitié du portefeuille positionnée
sur les segments de marché qui affichent les plus forts taux de
croissance, une couverture géographique sans précédent et une politique
d'innovation fortement dynamisée par les économies d'échelle.
A cela s'ajoute un ensemble de produits complémentaires,
une attractivité plus forte encore en terme de talents puisque ce
sont les mêmes profils qui rêvent de travailler dans l'un ou l'autre
groupe, avec des perspectives de carrière similaires. S'il paraît
donc évident que ce rapprochement s'annonce sous les meilleurs auspices,
l'étape la plus délicate de la fusion reste cependant à venir. Si
l'on en croit en effet l'étude publiée par A.T Kearney (*),
58% des fusions échouent lors de la phase finale d'intégration.
Gillette privilégie la notion de consommateur global" |
Un groupe, deux cultures
Globalité vs diversité
Bien que les deux groupes soient nord-américains et se réclament
d'une culture basée sur la diversité, l'une des valeurs Gillette
est de travailler comme une seule et même équipe globale alors que
P&G a banni ce mot de sa communication et préfère jouer sur le nécessaire
patchwork des équipes pour répondre aux attentes variées des consommateurs.
Monde
vs région
Si P&G laisse aussi une large marge de manuvre aux régions, la
culture Gillette est au contraire fortement centralisée, ce qui
pourrait se ressentir au moment de rapprocher des troupes habituées
à travailler dans un fort cadre ou au contraire avec autonomie.
Innovation
vs social responsabilty
C'est aussi par deux approches différentes de communication que
les deux groupes nés autour du même métier des produits de l'hygiène
abordent leur activité. Chez Gillette, les deux piliers : valeurs
et excellence en terme d'organisation sont mis au service de l'innovation
(élément largement mis en avant dans les campagnes publiques de
publicité) ; à l'opposé P&G fait reposer principes et traditions
sur les individus et la nécessité de bien faire, en tous points,
à long terme.
Une
approche différente du marketing client
De même, bien que chaque groupe possède des marques fortes,
qui bénéficient d'un bon niveau d'adhésion, P&G ne compte pas moins
de 300 marques dans son portefeuille contre quelques marques pour
Gillette mais dont deux se classent parmi les 100 premières mondiales.
Là encore, c'est parce que P&G considère qu'il n'existe pas de consommateur
"transfrontière" au contraire de Gillette qui privilégie la notion
de consommateur global. Ces différentes approches du marché et des
produits peuvent avoir un impact non négligeable dans des sociétés
pour lesquelles la politique marketing est une composante fondamentale
des résultats.
La direction devra donner des orientations claires" |
Quelques mois pour passer de la "méga
fusion" à la "méga réussite"
Depuis des mois, des armées d'avocats, d'analystes et
de banquiers travaillent sur le dossier. Maintenant, en parallèle
de l'intégration juridique et sociale, le relais doit être passé
au terrain, et en particulier aux RH et responsables de communication
interne. En prenant appui sur le middle management, ils feront le
succès de cette fusion. Ensemble ils créeront 1+1=3.
Tout d'abord, il s'agit de prendre conscience que tout le monde est concerné et doit être acteur du rapprochement réussi : d'un côté les "intégrateurs" (salariés de P&G), de l'autre les "s'intégrateurs" (les salariés Gillette). Afin de s'assurer que chacun ait envie de jouer son rôle, la direction devra détecter les "pro fusion", les "anti" et les neutres et se poser les bonnes questions : qu'est-ce que les salariés comprennent des changements en cours ? Qu'est-ce qu'ils se sentent capables de faire ? Qu'est-ce qu'ils attendent ?
A chacune de ces questions correspond un besoin en terme de communication, formation, implication et adhésion. Il est donc nécessaire à ce stade de bâtir un plan d'actions qui répondra à ces besoins dans un souci d'équilibre entre les problématiques corporate et métier.
En
savoir +
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Enfin, tout au long du processus d'intégration des équipes, la direction devra donner des orientations claires, communiquer régulièrement et dans un souci de transparence. C'est grâce à tout cela qu'elle obtiendra une adhésion rapide au nouveau projet et que les équipes feront leur "deuil" du passé pour rentrer dans la nouvelle ère P&G-Gillette.
(*) Etude réalisée par le cabinet en 1998-1999 sur 115 opérations de fusion dans le monde entier
Parcours
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Stéphane Waller est le fondateur et directeur de Meltis, cabinet spécialisé dans la formation stratégique. Il a commencé sa carrière en 1992 au Canada, au sein du groupe Accor, en tant que responsable marketing B to B. En 1994, il devient responsable marketing d'Esthederm avant de rejoindre, en 1996, Novartis en qualité de chef de produit. En 1999, il fonde Meltis. |
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