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INTERVIEW
 
février 2005

Bernard de La Hosseraye (Care)
Ne mentez jamais à un chasseur de têtes

Ancien chasseur, aujourd'hui spécialisé en gestion de carrière, Bernard de La Hosseraye connaît par cœur les rouages de la chasse. Son conseil pour être repéré : agir.
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Care

La différence entre un bon "chassé" et un mauvais "chassé" ? Le premier provoque les opportunités, le second les attend. Bernard de La Hosseraye, ancien chasseur de têtes et gérant de Care, un cabinet de conseil en gestion de carrière et coaching professionnel, livre quelques conseils pour bien utiliser les chasseurs de têtes dans la gestion de sa carrière.

Quelle est la différence entre un cabinet de recrutement et un cabinet de chasseurs de têtes ?
Bernard de La Hosseraye. Les cabinets de recrutement passent des annonces dans la presse et cherchent à pouvoir des postes pour des cadres moyens. Ils emploient souvent des consultants ayant 28 à 40 ans. Les chasseurs de têtes se limitent en revanche aux associations d'anciens ou à l'approche directe. Ils s'intéressent aux cadres supérieurs, voire même aux dirigeants, et sont eux-même plus expérimentés. Ils ont en général occupé un poste de direction dans leur domaine.

Quel est le profil idéal pour se faire chasser ?
Tous les métiers de l'entreprise sont concernés. Selon le niveau des cadres, les personnes chassées ont entre 32 et 48 ans. Après 48 ans, les entreprises font moins appel à des chasseurs de têtes, sauf pour les dirigeants. Elles pratiquent plutôt la cooptation, par l'intermédiaire du réseau. Certains cabinets très spécialisés dans la fonction finance s'adressent aux jeunes diplômés ayant seulement cinq ans d'expérience. Ce sont souvent des diplômés d'une, voire deux, grandes écoles, passés par le moule d'un cabinet d'audit ou de conseil. Ils ont appris à travailler beaucoup, sous pression et vite. Ils savent s'adapter et respecter les procédures.

Tous les secteurs font-ils appel aux chasseurs de têtes ?
Presque tous les secteurs. Aujourd'hui, compte tenu de la conjoncture, ceux qui recrutent le plus sont les secteurs de la santé, du pétrole, de la grande distribution et du conseil.


Contacter entre cinquante et cent cabinets par Internet"

Quelles sont les sources d'information des chasseurs ?
Ils disposent de fichiers de 20.000 à 40.000 CV. Ils utilisent les annuaires de cinquante à cent écoles. Il faut donc s'assurer que votre association d'anciens, si vous en avez une, dispose bien de vos coordonnées. Les chasseurs obtiennent également des informations des personnes refusant leur proposition d'entretien, cela s'appelle le sourcing. Ils s'appuient aussi sur les informations des chargés de recherche.

Le chasseur est-il du côté de l'entreprise ou du salarié ?
La mission du chasseur consiste à trouver une tête bien faite pour une entreprise, et non à aider une tête bien faite à trouver une entreprise. Les salariés, lorsqu'ils sont remerciés, retournent souvent voir le chasseur qu'ils connaissent pour qu'il les aide. Mais, dans ce cas, il faut s'adresser à un consultant en transition de carrière, pas à un chasseur.

Faut-il contacter soi-même les chasseurs de tête ?
Oui, bien-sûr. Je conseille de contacter soi-même entre cinquante et cent cabinets par Internet. Il faut envoyer son CV sur deux pages, en pièce jointe. Dans le corps du mail, il faut rédiger une lettre de dix lignes maximum, précisant le type de poste qui vous intéresse, le secteur d'activité, la mobilité géographique et un ordre de grandeur de sa rémunération actuelle.

Peut-on mentir sur sa rémunération ?
Ne mentez jamais à un chasseur de têtes. Certains, par exemple, font croire qu'ils sont encore en poste alors qu'ils ont été remerciés plusieurs mois auparavant. Attention, les chasseurs sont très bien informés.


Donner deux noms d'amis ou de collaborateurs"

Les femmes subissent-elles une discrimination ou font-elles partie de la cible des chasseurs ?
Depuis une quinzaine d'années, la discrimination s'est atténuée, essentiellement parce que le niveau de formation initiale des femmes s'est élevé. Les chasseurs cherchent souvent à savoir quelles sont les intentions des femmes entre 25 et 35 ans. Bien que cela soit interdit, ils posent la question de la maternité de manière détournée.

Dans ce cas précis, faut-il mentir ?
Oui, dans ce cas, il vaut mieux mentir…

Comment reste-t-on en contact avec les chasseurs de têtes ?
Ils gardent les CV pendant plusieurs années. Mais il faut envoyer de nouveau son curriculum vitae au moins une fois par an, même, et surtout, si on est satisfait de son poste. Le secret, c'est de savoir communiquer avec les chasseurs de têtes lorsque l'on n'a pas besoin d'eux. Car eux peuvent avoir besoin de vous. Par ailleurs, il faut systématiquement envoyer son CV lorsque l'on change d'emploi ou d'adresse. Mais ce n'est pas utile d'envoyer une carte de vœux.

Est-ce utile d'envoyer son CV en réponse à une offre ?
Il est utile de répondre à une offre seulement si votre parcours correspond parfaitement aux critères demandés.

Les cabinets de chasseurs de têtes ne permettent donc pas de changer de métier…
Non, si vous souhaitez changer de secteur ou de métier, il faut activer votre réseau.


Il faut se méfier des chasseurs qui n'ont pas de mission"

Si le poste décrit au téléphone ne nous intéresse pas, est-il utile de rencontrer le consultant ?
Non, ce n'est pas utile. En revanche, le chasseur verra d'un très bon œil le fait de lui donner deux noms d'amis ou de collaborateurs en plein dans la cible.

Peut-on parler d'une proposition de poste à sa hiérarchie ?
Vous pouvez envoyer un petit signal à votre hiérarchie pour lui faire savoir que vous avez été contacté mais que, pour l'instant, vous préférez rester dans l'entreprise. Sous-entendu : vous devriez me faire évoluer ou augmenter mon salaire.

Quelle augmentation de salaire peut espérer le "chassé" ?
Cela dépend de son expérience. Jusqu'à 35 ans, vous pouvez vous attendre à une hausse significative de 10 à 15 %. Après 35-40 ans, la hausse sera plutôt de 5 %. Les augmentations interviennent de plus en plus sur la partie variable de la rémunération.

Dans quels cas faut-il se méfier des chasseurs ?
Il faut se méfier des chasseurs qui n'ont pas de mission à vous proposer mais veulent récolter des informations sur votre entreprise. Au téléphone, il faut donc chercher à connaître la fonction proposée, le niveau et le secteur d'activité. Si la mission est une coquille vide, cela ne sert à rien de répondre aux questions. D'une manière générale, cela ne sert à rien de connaître personnellement un consultant.

En savoir +

Quels grands conseils donneriez-vous pour bien utiliser les chasseurs de têtes ?
Assurez-vous en permanence qu'une centaine de chasseurs disposent de votre CV, en français et en anglais. Lorsque vous changez de poste, envoyez votre CV actualisé. Enfin, même si vous ne souhaitez pas changer d'emploi, répondez de temps en temps à une annonce qui vous correspond sur le site d'un cabinet. Ensuite, allez à un entretien une fois par an, cela vous permettra de tester le marché et de vous entraîner à vous présenter.

Parcours

Bernard de La Hosseraye, diplômé de Sciences-Po et d'une maîtrise de droit privé, a dix ans d’expérience en entreprise et neuf ans en tant que chasseur de têtes dans deux cabinets internationaux. Depuis 1991, il est spécialisé en gestion de carrière et en coaching (membre de la Société française de coaching), praticien des techniques cognitives et comportementales ainsi que de la PNL. En 1995, il a créé le cabinet Care. Il est l'auteur de "Comment trouver un emploi… plus facilement et plus rapidement" aux Editions LGDJ. Membre du bureau du Club des anciens de PricewaterhouseCoopers, il co-anime, la cellule d'accompagnement professionnel.

  
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