29/06/2005
Se
différencier par l'expérience client
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En partenariat
avec Manageris,
Le Journal du Management vous propose un rendez-vous mensuel
afin de décrypter les meilleures publications françaises et
internationales sur le management. Ce mois-ci, nous avons sélectionné
les livres "Customer experience management", de Bernd
H. Schmitt, et "Clued in" de Lewis P. Carbone. |
"L'expérience client" : un nouveau mot de jargon marketing à
la mode ? A en croire certains, les entreprises seraient presque
censées se transformer en parcs d'attraction pour enchanter
leurs clients ! Les publications analysées sont plus pragmatiques.
Les auteurs rappellent que les clients vivent une "expérience"
qui va bien au-delà de l'achat et de l'utilisation du produit.
Cette dimension souvent négligée est une source de différenciation
remarquablement efficace pour ceux qui savent la maîtriser.
1. Sur les marchés matures,
l'innovation produit ne permet plus de se différencier
Se
différencier par le produit est devenu un véritable casse-tête
pour un grand nombre d'entreprises. C'est en particulier le
cas dans les situations suivantes :
Les attentes fondamentales sont satisfaites. Dans ce
cas, l'innovation passe au mieux pour un "petit plus" sympathique,
mais ne suffit pas à faire la différence. Cela explique le taux
impressionnant d'échecs du lancement de nouveaux produits sur
des marchés matures
Les clients attendent la qualité au meilleur prix. Très
peu sont alors prêts à payer pour une valeur ajoutée marginale
par rapport à leurs réels besoins. Conséquence : l'innovation
n'est pas rentable
Les innovations sont rapidement copiées. Difficile alors
de rentabiliser ses investissements ! Dans des secteurs comme
celui de la téléphonie mobile, les nouvelles offres tarifaires
et les nouvelles fonctionnalités sont ainsi copiées parfois
en quelques semaines
Ces conditions sont vérifiées sur de nombreux
marchés. Ainsi, une étude montre que 85 % des dirigeants
pensent qu'il n'est plus possible de se différencier durablement
par les éléments tangibles de l'offre.
2. Créer une expérience
client hors du commun peut alors constituer une solution
Une
multitude de petits détails
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La perception de l'expérience
résulte de l'impact combiné de multiples indices :
Des
indices matériels : détails physiques du produit, différents
aspects de l'environnement ou du processus
Des
indices sensoriels : couleurs, musique, bruits, formes,
matières, goût, odeurs
Des indices humains :
attitude des salariés au contact des clients, mais aussi
de ceux que le client voit sans interagir avec eux
Si l'expérience est mauvaise sur un seul des critères,
la perception globale en sera pénalisée.
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Dans ce contexte, certaines entreprises parviennent à tirer
leur épingle du jeu en faisant vivre à leurs clients une "expérience"
distinctive. Il ne s'agit pas de transformer en aventure spectaculaire
toute interaction avec un client. Mais de prendre conscience
que le vécu du client englobe de nombreux aspects, apparemment
de détail, mais dont le cumul peut créer la différence : atmosphère
lors de l'achat, petits "plus" lors de l'utilisation, service
après-vente, etc. Cette expérience doit être gérée de façon
volontariste : si ses diverses composantes ne sont pas cohérentes,
le client risque de n'en retenir qu'une image confuse. Il
faut donc avant tout définir les émotions que l'on
souhaite susciter (par exemple, l'enchantement pour Disney,
la fierté pour Harley Davidson, le fait d'être rassuré pour
Federal Express) et s'assurer que tous les détails
de ce que vit le client contribuent à créer cette émotion.
3. Se différencier
par l'expérience client implique une transformation profonde
Imaginer quelle expérience on veut créer est loin d'être suffisant.
On sous-estime souvent la profondeur de la transformation
nécessaire :
Etudier le marché différemment.
Les études de marché traditionnelles reposent essentiellement
sur des données déclaratives. Or il est souvent délicat d'exprimer
des émotions qui peuvent paraître déraisonnables ou non légitimes.
De plus, il est très difficile de décomposer sa perception
globale d'une expérience, composée d'un ensemble de détails
chacun apparemment anodins. Pour ces deux raisons, les clients
savent très mal exprimer l'expérience dont ils rêveraient.
Plutôt que les interroger, mieux vaut donc privilégier l'observation
des clients pendant qu'ils font l'expérience de l'offre, en
réel ou sur la base de prototypes.
Réorganiser ses processus. La
fluidité entre les différentes étapes du processus de consommation
contribue fortement à la qualité de l'expérience vécue. Il
est donc conseillé de se plonger dans les détails opérationnels
en suivant de bout en bout une commande, de la demande d'information
initiale jusqu'à l'après-vente. Cela permet de détecter les
risques de déception ou de frustration. Ainsi, un restaurant
a identifié que ses clients étaient "laissés à l'abandon"
dans l'intervalle entre la réservation et la date du dîner.
Il a amélioré l'expérience en envoyant quelques jours avant
cette date une confirmation de réservation comprenant une
copie du menu et la proposition de réserver une place de parking.
Ces détails ont constitué une bonne surprise, fortement valorisée
par les clients.
Veiller à la composante humaine. L'attitude
des salariés a un impact considérable sur l'expérience vécue.
C'est pourquoi il est souvent justifié d'investir en formation
pour développer la capacité d'écoute et d'empathie des salariés,
voire de réorganiser ses équipes pour placer au contact des
clients ceux qui font preuve de ces qualités - comme n'a pas
hésité à le faire la chaîne de restauration Taco Bell.
Gérer les attentes. Le sentiment de vivre une expérience
exceptionnelle provient le plus souvent de la surprise de voir
ses attentes dépassées. A l'inverse, une prestation de qualité,
mais en retrait des attentes, laisse un sentiment de malaise.
Il ne faut donc pas seulement créer une expérience distinctive,
mais aussi gérer activement les attentes des clients. Cela peut
se faire lors de la communication préalable à l'expérience,
mais aussi en adoptant une politique de dépassement permanent
de ces attentes.
Depuis 1992, Manageris
publie chaque mois la Lettre de synthèse des meilleures
publications en management, qui aide plusieurs milliers
de cadres à rester à la pointe des idées qui comptent
en management. Par ailleurs, Manageris conçoit et anime
des sites intranet pour plusieurs dizaines de grands
groupes.
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