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30/11/2005
Dans l'intimité d'un coaching
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Ce mois-ci, André de Châteauvieux, coach professionnel, aide un consultant indépendant à désamorcer un conflit latent avec l'un de ses partenaires. |
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Lionel est consultant indépendant, spécialiste du management par la qualité. Il cherche à se relier à des partenaires pour développer des offres communes et de nouveaux marchés.
Nous travaillons depuis trois séances sur le thème de ses relations avec les membres de son réseau. Lionel ouvre cette nouvelle séance, sans préalable :
Lionel : C'est sur un conflit majeur que je veux travailler, aujourd'hui. Charles est dans notre premier cercle, expert de démarches complémentaires de mon offre. Il m'a annoncé un rendez-vous chez un équipementier automobile, un client commun. Nous avions pourtant décidé de nous partager les secteurs d'activité et d'aller ensemble aux rendez-vous pour des contacts communs. Mais Charles préfère toujours jouer en solo. C'est pour moi inacceptable. Ce soir, nous avons une réunion du réseau et je ne sais pas quelle attitude adopter.
Coach : Et qu'attendez-vous de moi ?
Lionel : Je ne sais pas vraiment
Après notre travail sur mon côté manipulateur, j'ai pensé qu'il s'agissait d'une nouvelle ombre personnelle, mais je ne suis pas aussi déloyal. Je me sens en colère, j'ai envie de lui dire que je suis furieux. Mais je ne sais pas comment. C'est comme si la colère m'aveuglait.
Lionel poursuit avec des noms d'oiseaux qu'il tente de réprimer, il serre ostensiblement ses poings.
Coach : Quand vous serrez les poings ainsi, que cherchez-vous à faire ?
Lionel : Je ne sais pas vraiment
Coach : C'est peut-être un lapsus du corps ou une censure
Certains ravalent leurs sentiments en serrant les dents, d'autres les poings
Lionel : Je n'avais vraiment pas réalisé
Coach : Imaginez un moment que je suis Charles
Vous pouvez me dire ce que vous pensez, ressentez... Ici, c'est comme un laboratoire : vous pouvez bouger, crier, serrez les poings un peu plus
je vous demande juste de ne pas en venir aux mains avec moi !
Lionel : Oui
Si vous étiez Charles
je vous dirais que...
Long silence
Lionel serre un peu plus ses doigts... Je me rapproche de Lionel qui lâche :
Lionel : Ce rendez-vous chez ce client commun, sans moi, est inacceptable, déloyal... Tu es injuste... Mais finalement ce plan magouille te va bien, comme ton costume noir d'hypocrite... Tout ce que je souhaite, c'est que tu te plantes...
Lionel s'agite davantage, les noms d'oiseaux fusent, le ton monte
Je me recule et dis :
Coach : Whaooo ! Et vous lui diriez tout ça, comme ça ?
Quand la peur se transforme
Lionel : Il faudrait savoir ce que vous voulez. Vous me demandez de passer à l'action !
Coach : Pour moi, la mise en action n'est pas le passage à l'acte ou à l'action. La frontière semble floue ici : pendant un instant, j'ai eu peur pour moi
Lionel : Oui mais, je me sens soulagé maintenant
Et aussi amusé par l'expérience, voire stimulé ! Mais je ne peux pas rejouer ça ce soir avec Charles ?
Coach : C'est quoi "ça" ?
Lionel : C'est comme si Charles prenait un malin plaisir à jouer hors jeu, faire de la contrebande.
Coach : Et vous-même alors ?
Lionel : Je joue le justicier. Et pourtant, je crois aussi que j'aimerais beaucoup faire comme lui, parfois : rencontrer un client en toute liberté.
Coach : Je me dis que vous faites déjà, peut-être, un peu de contrebande.
Lionel : Que voulez-vous dire ?
Coach : Je dis que vous faites déjà de la contrebande et peut-être même souvent !
Lionel : Oui
Ça m'est arrivé il y a un mois : c'était un contact avec un prospect dans l'assurance, le secteur privilégié de Charles. Je me suis senti un instant déloyal vis-à-vis de notre groupe et de nos règles du jeu. Et pourtant, c'était efficace : ce prospect m'a demandé une proposition à laquelle j'ai associé un consultant du réseau, en complémentarité. Et j'ai partagé cette information dans le réseau. Je réalise maintenant que Charles n'a pas réagit !
Coach : Entre liberté et justice, contrebande et loyauté, je suis perdu
Lionel : Pas moi, j'ai envie de reprendre la mise en action. C'était stimulant
Coach : Et que voulez-vous changer ?
Lionel : J'aimerais prendre le rôle de Charles ! Ou plutôt plonger dans cette énergie de liberté. Les règles du jeu posées dans notre réseau étaient bien adaptées à un groupe de solos, avec chacun son territoire. Elles sont peut-être aujourd'hui périmées, elles nous inhibent. Chacun pourrait démarcher ses clients en transparence. D'ailleurs, c'est plutôt le client qui nous reconnaît à travers nos offres et qui nous contacte ! Il se fiche de nos logiques de territoire
Coach : Qui dit cela ?
Lionel : C'est moi, tout simplement ! Et je sais comment aborder notre réunion réseau, ce soir : je mettrai sur la table le besoin de revoir nos règles du jeu.
Coach : Et que ressentez-vous, maintenant ?
Lionel : Toujours cette énergie créatrice.
Coach : Et Charles ?
Lionel : Ce n'est plus une question !
Nous avons conclu cette séance par un regard sur l'agressivité positive : ad-gressere signifie "aller au-devant de l'autre". L'agressivité ne se confond pas avec la violence destructrice. Elle peut être mise en action, délibérément, pendant un coaching
La mise en action s'oppose alors au "passage à l'acte" dénoncé par la psychanalyse. Cette séance nous montre qu'il est plus facile d'apprivoiser ses émotions plutôt que les maîtriser. Les apprivoiser, c'est apprendre à les nommer, les connaître et progresser avec, plutôt que lutter contre.
Les précédentes séances de coaching
Pascal est confronté à un problème d'alcoolisme dans son entreprise
Manon surmonte sa phobie des réunions
Béatrice, consultante, surmonte
sa peur du groupe
Nadine se débat avec Marc, le directeur financier
Le
coach
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André de Châteauvieux est coach d'entreprise,
certifié par l'école de formation Médiat-Coaching. |
JDN Management | Envoyer | Imprimer | Haut de page |
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