24/05/2006
Dirigeants d'entreprise : les pistes pour se préserver
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Statut de l'entreprise, régime matrimonial, rémunération, couverture sociale... Les paramètres sur lesquels agir pour protéger ses biens personnels et ses finances lorsqu'on est à la tête d'une société. |
Etre dirigeant d'entreprise, c'est parfois s'engager personnellement à répondre des dettes de l'entreprise. Rajoutez à cela un régime matrimonial défavorable et vous courez peut-être à la ruine en cas de faillite de votre société. Sans parler du régime social ou encore de la rémunération qui, au quotidien, jouent ou pas en votre faveur. Voici donc quelques pistes pour faire les bons choix.
Le statut de l'entreprise |
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Suivant le statut juridique de son entreprise, le dirigeant
a plus ou moins de responsabilité, et donc d'engagement
sur ses biens personnels. Par exemple, le statut d'entreprise
individuelle engage l'ensemble du patrimoine du dirigeant
qui doit répondre des dettes de la société.
"C'est un risque insensé", prévient
Maître Patrice Bonduelle, notaire chez Michelez &
Associés. "Et la situation est d'autant plus risquée
si le dirigeant a opté pour un régime matrimonial
de la communauté de biens.
En dehors du régime matrimonial (voir
plus loin), il est possible pour le chef d'entreprise
de se préserver, notamment en cas de faillite. La loi
du 2 août 2003, dite Dutreil, propose ainsi une déclaration
d'insaisissabilité de la résidence principale
opposable - c'est-à-dire efficace - à partir
de sa publication et ce, pour une durée illimitée.
Cette déclaration se fait devant notaire et nécessite
environ quinze jours avant d'être publiée au
bureau des hypothèques. Mais attention : elle n'est
pas valable si le dirigeant a créé une SCI pour
isoler ses biens immobiliers, ou a opté
pour une SARL.
"Si vous changez de lieu de résidence, explique
le notaire, il faut faire lever cette mesure et faire une
nouvelle déclaration pour le nouveau logement. Si l'entreprise
est située dans la résidence principale, il
faut alors dissocier les deux parties, cela protège
en quelque sorte l'entreprise en cas de faillite."
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Les cautions et hypothèques |
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L'interposition de l'entreprise entre le dirigeant et les créanciers ne suffit pas toujours à protéger les biens personnels, notamment en cas de dépôt de bilan ou de liquidation judiciaire.
Dans le cadre de l'interposition d'une société
de type commercial ou bien d'une société de
capitaux (SAS, SA, SARL), le risque est en principe limité
aux actifs de l'entreprise. Le banquier est cependant susceptible
de vous demander des garanties en cas de prêt. Pour
les entreprises en phase de démarrage ou pour les dirigeants
qui ne disposent pas d'un apport personnel suffisant, la banque
ne prêtera que sur caution personnelle ou hypothèque,
voire sur nantissement
sur contrat d'assurance vie ou PEA. Ici, la protection qu'octroyait
la société s'effondre.
Il existe d'autres cas où la protection tombe et les créanciers ont alors le droit de piocher dans les biens personnels au-delà de la responsabilité limitée. Cela s'applique quand :
Le dirigeant ou le président est coupable d'un abus de bien social.
Le dirigeant est reconnu coupable d'une faute de gestion qui porte préjudice aux créanciers lors d'une liquidation judiciaire. D'après la loi de sauvegarde, il n'y a pas de problème tant qu'il n'y a pas de preuve de mauvaise gestion.
La TVA n'est pas déclarée, ce qui correspond à une soustraction frauduleuse aux impôts. Aux yeux du fisc, le dirigeant est alors solidaire de l'entreprise.
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Il existe quatre régimes différents : celui de la communauté, de la société d'acquêt, de participation aux acquêts ou encore celui de la séparation de biens.
La communauté de biens est le moins adapté au chef d'entreprise"
Maître P. Bonduelle |
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"Le régime
de la communauté est le moins adapté au
chef d'entreprise puisque la totalité des biens personnels
du couple est accessible aux créanciers professionnels,
note Maître Bonduelle. C'est la ruine personnelle en
cas de faillite. Ce n'est en tout cas pas le bon choix pour
les professions à risques." Il en va de même
avec les biens inclus dans une société d'acquêts.
Ils appartiennent pour moitié à chacun des époux
et sont saisissables par les créanciers professionnels.
Bref, mieux vaut opter pour le régime de la séparation de biens. A noter : le régime de participation aux acquêts fonctionne comme une séparation de biens mais uniquement pendant la période de vie commune. En cas de décès ou divorce, lorsque le contrat prend fin, les biens sont partagés comme dans la communauté de biens.
Enfin, sachez que pour un changement de régime matrimonial ou de statut de l'entreprise, il faut compter entre quatre et douze mois.
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Hormis le salaire, il existe différents dispositifs permettant au dirigeant d'entreprise, de bénéficier, sous certaines conditions, d'une rémunération complémentaire.
L'épargne salariale
L'épargne salariale est ouverte aux chefs d'entreprise de moins de 100
salariés, comme aux salariés. Elle permet, au
travers par exemple d'un Plan
d'épargne entreprise (PEE)
ou d'un Plan d'épargne retraite collectif (PERCO), de
se constituer un capital en valeurs mobilières disponible
au bout de cinq ans ou au départ en retraite, sauf cas
particuliers. Le dirigeant effectue des versements volontaires
et l'entreprise peut abonder de manière proportionnelle,
le tout dans la limite de 300 % du versement et 2.300 euros
pour le bénéficiaire d'un PEE, 4.600 pour le PERCO.
Ce complément de rémunération est
exonéré de charges sociales et d'impôt sur le revenu, hormis
CSG, RDS et prélèvements sociaux.
L'intéressement
L'intéressement est également possible pour les dirigeants d'entreprise de 1 (si ce n'est pas le dirigeant en question) à 100 salariés selon la loi pour la confiance et la modernisation de l'économie datant du 26 juillet 2005. L'accord ou un avenant doit préciser expressément que le dirigeant est inclus dans le champ d'application. Les primes d'intéressement sont plafonnées à 20 % du total des salaires bruts, voire de la rémunération annuelle ou du revenu professionnel imposé à l'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente, dans la limite du montant du salaire le plus élevé de l'entreprise. Ces sommes sont soumises à l'impôt sur le revenu mais suivent le régime social de la participation. "Lorsqu'elles sont versées sur un PEE, remarque Maître Gaspard Brulé, avocat au cabinet BMS, elles sont exonérées d'impôt sur le revenu à hauteur de la moitié du plafond de la sécurité sociale, c'est-à-dire 15.534 euros pour 2006."
Les dividendes
Le versement de dividendes est possible pour les dirigeants actionnaires d'une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés. Quel que soit le régime social du dirigeant, les dividendes ne sont pas soumis à cotisations sociales, sauf CSG, CRDS, prélèvement social de 2 % et contribution additionnelle au prélèvement social de 0,3 %. Contrairement à la rémunération, le versement des dividendes reste aléatoire.
D'autres systèmes sont exempts de charges sociales : les actions gratuites, stocks options et bons de souscription de créateur d'entreprise. "Les actions gratuites (Loi du 30 décembre 2004, modifiée par le code de commerce) sont distribuables dans la limite de 10 % du capital de l'entreprise", explique Maître Brulé. Elles ne nécessitent pas de dépense pour l'acquisition et sont soumises à des délais d'attribution et d'indisponibilité de quatre ans durant lesquels elles ne sont pas vendables. "Quant aux bons de souscription de créateurs d'entreprise, poursuit l'avocat, ils ne s'adressent qu'aux dirigeants de sociétés ayant moins de quinze ans, détenues à 25 % par des personnes physiques, non cotées ou cotées au marché réglementé et dont la capitalisation boursière est inférieure à 150.000 euros." |
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Du statut de l'entreprise découle également le régime social du dirigeant. Le régime des travailleurs non salariés, dont dépendent les gérants majoritaires de SARL et les entrepreneurs individuels, est aujourd'hui aussi favorable que le régime général des salariés, dont dépendent les gérants minoritaires de SARL ainsi que les présidents de SA. En terme de couverture - allocations familiales,
retraite de base, assurance-maladie et
taux de remboursements des soins et médicaments - les deux statuts se valent.
Le régime des travailleurs non salariés
Toutefois, le régime des travailleurs non salariés ne prend pas en charge les accidents du travail et ne prévoit pas dassurance chômage obligatoire. En ce qui concerne la SARL, le statut de gérant minoritaire était préférable auparavant, mais ce n'est plus le cas aujourd'hui, surtout pour transmettre ou revendre l'entreprise. "En effet, renchérit Maître Bonduelle, personne n'achète 49,9 % d'une entreprise aujourd'hui. Et puis, imaginez que la personne qui n'a pas mis un sou dans l'entreprise et vous sert de prête-nom ou faux associé, décède. Vous aurez du mal à récupérer ses parts gratuitement auprès de ses héritiers."
Le régime général des salariés
Il s'adresse entre autres aux gérants égalitaires ou minoritaires et présidents de SA qui ont la possibilité de se verser un salaire. Les dirigeants relevant du régime des travailleurs salariés, s'ils ont un contrat de travail technique - et effectif - reconnu par les Assedic et distinct du mandat social, peuvent prétendre à l'assurance chômage de l'Unedic sur la partie de la rémunération correspondant au contrat de travail.
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