Wanda
Charbit (Cubiks)
"Apprendre à travailler
dans la transversalité"
Consultante pour l'agence de conseil en ressources humaines
Cubiks, Wanda Charbit commente les enseignements majeurs du baromètre
de la vie professionnelle. (novembre
2003)
La vie professionnelle n'est plus un long fleuve tranquille :
les techniques de management se multiplient, la transversalité
s'impose, les nouvelles technologies modifient les process, les
carrières ont perdu de leur esprit linéaire... Autant
d'éléments déstabilisants pour les managers,
mais aussi pour les entreprises qui doivent gérer ce changement
perpétuel afin de réussir à fidéliser
leurs salariés à fort potentiel. Wanda Charbit est
consultante senior pour l'agence de conseil en ressources humaines
Cubiks. Elle accompagne les entreprises dans leur gestion des compétences
et dans leur stratégie de recrutement, de mobilité
et de formation. Un point d'observation idéal pour comprendre
comment le manager du début du 21ème siècle
aborde son rôle. Elle revient sur les grandes tendances du
baromètre du Journal du Management.
Près
de 60 % des managers indiquent que, si l'occasion se présentait,
ils referaient leur vie professionnelle autrement. Le regret serait-il
devenu un élément courant dans l'univers du travail ?
Wanda Charbit. On peut regretter beaucoup de choses sur le
plan professionnel : les études, les entreprises par
lesquelles on est passé, les poste occupés, le secteur
dans lequel on exerce... Ce qui est clair, c'est que face à
un marché du travail mouvant, les cadres deviennent eux-mêmes
mouvants dans leurs attentes : c'est le revers de la culture
de l'opportunisme et de l'entrepreneuriat. Et c'est un véritable
défi pour les entreprises qui vont devoir, dans les années
qui viennent, faire face au départ massif à la retraite
des baby-boomers. Les entreprises vont devoir réapprendre
à affronter la pénurie en matière de recrutement
et à fidéliser leurs cadres, donc à s'occuper
d'eux. Ce qui est encore loin d'être le cas aujourd'hui.
Parmi les grands regrets
évoqués par les managers, figure justement le fait
de ne pas avoir complétement réorienté sa carrière.
Comment les entreprises peuvent-elles prendre en compte un tel facteur
?
C'est un autre grand défi, mais qui va, lui aussi, dans le
sens de l'histoire. Depuis une vingtaine d'années dans le
monde de l'entreprise, la notion de rôle prend le dessus sur
la notion de métier. L'important pour un manager c'est de
savoir manager, et peu importe si ce rôle s'exerce dans l'industrie
ou dans les services. Autrefois, on faisait carrière dans
un secteur d'activité. Demain, on fera carrière sur
une fonction. Les entreprises vont devoir répondre à
cette transformation en favorisant la mobilité interne, en
permettant aux cadres de circuler dans la structure. C'est une mécanique
déjà connue par les entreprises qui pratiquent la
notion de vivier avec des cadres à fort potentiel. Ces cadres
bénéficient parfois d'une forte mobilité interne
afin de connaître l'ensemble de l'entreprise avant de prendre
des responsabilités plus importantes.
La gestion de projets arrive en tête
des techniques de management assimilées au cours de la carrière.
L'approche projet représente-t-elle à ce point un
élément central du management ?
Au-delà de l'approche projet, c'est toute l'organisation
qui soutient cette approche qui est devenue un élément
central du management. Nous vivons aujourd'hui dans la transversalité,
ce qui implique pour les managers d'autres modes de fonctionnement.
La remise en cause la plus profonde se situe au niveau de la hiérarchie.
En mode projet, les interlocuteurs se démultiplient, donc
les contraintes. Un manager qui fonctionne en mode projet doit apprendre
à concilier, à gérer les décalages entre
les différentes contraintes. En cela, l'approche projet est
devenu un élément central du management.
Plus basiquement, près de la
moitié des managers regrettent de ne pas mieux parler anglais.
Cela vous étonne-t-il ?
Pas vraiment, et c'est un véritable problème en France :
le niveau d'anglais acquis au travers des études est problématique
et les entreprises s'arrachent les cheveux à essayer de corriger
le tir. En matière de formation, l'anglais représente
l'une des plus importantes demandes. Et pourtant, les résultats
se suivent pas vraiment : les formateurs sont parfois désespérés
et les entreprises enchaînent formation sur formation. C'est
un problème qui a une dimension nationale.
60 % des cadres estiment qu'ils ne
concilient que "partiellement" vie professionelle et vie
personnelle. Ce constat est plutôt sombre...
Plutôt sombre mais pas étonnant, d'autant plus que ces
dernières années la situation ne s'est guère
améliorée. Les 35 heures ont provoqué pour l'encadrement
une densification du rythme de travail. Et puis, face à la
situation économique, les managers se sont retrouvés
avec plus de travail tout en ayant moins de ressources. Difficile
donc dans cet environnement de trouver le bon équilibre entre
vie pro et vie perso.
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