DOSSIER 
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Bernard Legrand (Magellis)
"Il ne suffit pas de mouliner des données clients"
Consultant en relation client, Bernard Legrand tire la sonnette d'alarme sur la dimension trop technologique du CRM.
(janvier 2004)

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L'ours des Pyrénées n'a de secret pour personne : on connaît ses lieux de repos, ses itinéraires, sa nourriture, son emploi du temps, mais on ne le voit jamais... Pour cette raison, Bernard Legrand, du cabinet Magellis Consultants, compare volontiers l'ours des Pyrénées au client. Grâce à des logiciels et à des bases de données de plus en plus performants, les entreprises savent tout de leurs clients. Mais elles ne les voient pas, ne les entendent pas. Co-auteur de CRM, les attentes des clients (voir notre sélection d'ouvrages), Bernard Legrand invite les entreprises à redéfinir cette relation en se mettant réellement à la place du client.

Quelle est aujourd'hui la tendance en matière de CRM ?
Bernard Legrand. La tendance lourde est à l'équipement en outils technologiques, bien que l'on observe en ce moment un léger ralentissement pour des raisons économiques. Les centres d'appels, les serveurs vocaux interactifs et les logiciels d'assistance et de suivi des clients se multiplient un peu partout dans les entreprises. Le problème, c'est que l'on a laissé la bride sur le cou des faiseurs de technologie et que les entreprises oublient, du coup, de se mettre dans la peau du client. Elles savent très bien faire des offres promotionnelles pour attirer les consommateurs, mais elles sont souvent incapables de répondre à une question plus pointue. Or la notion de relation suppose une communication dans les deux sens.

Que reprochez-vous au juste aux technologies ?
Les fichiers clients, le suivi, les hotlines… c'est très bien. Mais il ne faut pas oublier les bonnes vieilles règles de communication : le sourire, l'écoute, le respect. Les vendeurs ont souvent de nombreuses données sur le client : sa CSP, ses achats précédents, sa date d'anniversaire… Ils pensent qu'en faisant mouliner tout ça dans leur ordinateur, ils connaîtront leur client. C'est une approche marketing de la relation client : on sait tout sur lui, mais on ne le voit jamais !

Mais les solutions technologiques permettent de réduire les coûts du CRM…
C'est peut-être moins cher à court terme, mais cela va finir par coûter bien plus à moyen terme. Il n'y a pas encore d'exemple d'échec fracassant, mais je pense qu'une entreprise uniquement axée sur l'approche technologique peut facilement perdre 10 à 15 % de ses clients, ce qui ne laisse pas indifférent. Il est bien plus cher de conquérir de nouveaux clients que de les fidéliser. Par ailleurs, la perception des clients n'est pas symétrique. Ils oublient vite les cadeaux, et se souviennent longtemps des problèmes.

Cette dérive technologique englobe-t-elle les centres d'appels ?
Les centres d'appels peuvent représenter une bonne solution, tant qu'ils respectent le client et remplissent leur promesse. Mais ce n'est pas la seule réponse possible. Les Assedics de l'Est francilien ont par exemple décidé de supprimer la centralisation des appels téléphoniques. Lorsqu'une personne se présente dans leurs bureaux, elle est prise en charge par un conseiller et repart avec son numéro de téléphone direct. Les employés étaient au départ très inquiets. Mais finalement, ils ne reçoivent que sept à huit coups de fil par jour et peuvent fournir des réponses personnalisées. Ce service me semble tout à fait adapté. En revanche, lorsqu'une personne cherche les horaires d'un film, un répondeur téléphonique fait parfaitement l'affaire.

Peut-on parler de relation client quand un centre d'appels utilise un numéro téléphonique surtaxé ?
Dans certains cas, les appels surtaxés sont ouvertement destinés à faire des profits. Je n'y vois pas d'inconvénient si le service proposé est à valeur ajoutée. En revanche, c'est plus difficilement acceptable de faire payer le client pour résoudre un problème, surtout s'il résulte d'une erreur de l'entreprise.

Existe-t-il des entreprises qui pratiquent une relation client catastrophique ?
Tout à fait. Pour notre ouvrage, nous avons par exemple testé le service client d'un constructeur de photocopieurs en 2001. Il était totalement injoignable. Nous lui avons même envoyé un courrier en recommandé, et personne ne nous a jamais répondu.

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Votre discours trouve-t-il un écho dans les entreprises ?
Je ne suis pas le seul à le tenir. Nous sommes écoutés, mais sans que nous observions une véritable évolution. Les solutions technologiques sont vendues par des entreprises ayant une force financière considérable. Les premiers échecs fracassants permettront sûrement aux entreprises de prendre réellement conscience du problème.

PARCOURS
Ingénieur de l'École Centrale de Paris, Bertrand Legrand est consultant au sein du cabinet Magellis Consultants. Il intervient comme expert et formateur auprès d'entreprises sur des actions liées aux thèmes de la relation client et du partage de la connaissance. Il est le co-auteur avec Line Lasserrre de CRM, les attentes des clients.

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Rédaction, Le Journal du Management


   
 
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