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(juillet 2004)
Dominique
Steiler (Grenoble EM)
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Le professeur chercheur, également coach, fait le point sur la démarche du coaching et son développement. |
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Chercheur, spécialiste du coaching, et lui-même coach, Dominique Steiler travaille à Grenoble Ecole de management et à l'université de Newscastle (Grande-Bretagne). Il revient sur l'évolution du coaching et sur sa diffusion dans les entreprises. Pour lui, le coaching n'est pas une pratique récente. En revanche, sa formalisation et sa relative acceptation sont des phénomènes nouveaux.
Qu'est-ce que le coaching ?
Dominique Steiler. Il s'agit de la possibilité de travailler
en accompagnement et en parallèle avec une personne ayant une demande
spécifique par rapport à un projet. Ce n'est pas une relation d'aide,
ni une thérapie. Le coach et le coaché apportent chacun des éléments
de réponse à une problématique donnée.
Cette
démarche n'est pas nouvelle
Ce qui est nouveau, c'est l'acceptation de ce type de démarche.
Elle existait, mais n'était pas officielle, ni reconnue. L'expert
comptable est par exemple amené à jouer un rôle de coach dans certaines
situations. Il apporte des connaissances théoriques et techniques,
mais aussi un soutien émotionnel, par exemple dans le cas d'un redressement
judiciaire. Le coaching n'est pas encore accepté partout, mais les
managers osent désormais en faire la demande. Depuis cinq
ans, sa pratique est plus courante. Il existe un effet de mode et
l'ampleur du phénomène est parfois exagérée par les médias. Mais
on ne raisonne plus aujourd'hui en disant que faire appel à un coach
révèle un manque de compétence. Un bon manager est un homme ou une
femme ayant une sensibilité et des faiblesses. Il y a plusieurs
dizaines d'années, on considérait qu'un système efficace devait
être stable. Mais lorsque l'on regarde la nature, il n'existe que
des systèmes instables qui se rééquilibrent en permanence. C'est
ce rééquilibrage qui génère de la performance. Ce qui est également
nouveau, c'est le fait de capitaliser sur les éléments humains.
Le coaching n'a rien inventé. Il s'appuie sur des principes philosophiques
abordés depuis longtemps.
Comment choisit-on un coach ?
Il faut rencontrer deux ou trois coaches différents, leur poser
des questions sur leur démarche, savoir comment ils comptent travailler.
Ont-ils l'intention de faire un diagnostic, une mesure initiale
du problème ? Avant de commencer à travailler, il faut mettre
en place une méthodologie, une mesure intermédiaire et une mesure
finale.
![]() Une prise de sens et de conscience" |
Quel rôle l'entreprise joue-t-elle
dans cette démarche ?
Le manager choisit son coach, parfois avec l'avis du DRH ou du chef
de service. Ensuite, la définition de la méthode, du planning, des
outils se font sans l'entreprise. Un point est très important :
l'employeur ne doit pas connaître le contenu des résultats. Il saura
uniquement si le coaché a abouti au résultat escompté ou non. Par
exemple, dans le cas d'un audit de personnalité, l'employeur n'aura
pas à en connaître le contenu.
L'entreprise ne peut-elle pas imposer
certaines contraintes ?
Toutes les dérives sont possibles. L'entreprise peut, par exemple,
demander de ne pas aborder tel ou tel thème. C'est au coach d'évaluer
si cette contrainte est acceptable ou pas, selon son éthique. J'ai
par exemple mené une mission de coaching d'équipe. Le contrat précisait
que les retours concerneraient le fonctionnement de l'équipe, mais
pas les individus. Le PDG m'a un jour demandé ce que je pensais
de l'un des managers. Je lui ai répondu que cela sortait du cadre
du contrat.
Quelles sont les réticences des entreprises
face au coaching ?
L'entreprise peut craindre que le coaché ne construise un nouveau
projet professionnel en dehors de l'entreprise. Par ailleurs, une
mission importante mène à une prise de sens et de conscience de
ce qui se passe. Même s'il ne se passe rien de négatif, cette sensibilité
plus forte aboutira probablement à une demande d'un nouveau positionnement
dans l'entreprise.
Qui sont les coachés ? Les meilleurs
managers ou les moins bons ?
Les coachés ne sont ni les meilleurs, ni les moins bons. Toute personne
demandeuse et volontaire peut être coachée. Aujourd'hui, les coachés
font généralement partie du management haut et intermédiaire. Le
coaching étant individuel, il coûte cher. Il est donc souvent réservé
aux niveaux hiérarchiques élevés. En outre, plus le manager grimpe
dans la hiérarchie, moins il a de pairs auxquels se confier et avec
lesquels échanger.
Combien coûte une action de coaching
?
Le prix d'une mission est très variable, selon le lieu, la taille
de l'entreprise et la durée. Les coûts sont en général similaires
à ceux d'une mission de conseil, à savoir entre 1.200 et 2.500 euros
la journée. J'ai mené une action aux Etats-Unis : dans ce cas,
le coût était bien sûr plus élevé.
![]() Le travail du coach peut être effectué par le support social" |
Quels sont les risques de manipulation
?
Le coach peut bien sûr manipuler le coaché. Mais ce n'est pas le
seul cas de figure. La personne coachée peut très bien avoir un
but masqué, qu'elle ne révèle ni au coach, ni à l'entreprise. Elle
peut par exemple faire passer un message à sa hiérarchie
par l'intermédiaire du coach et à son insu. Enfin, l'entreprise
peut avoir ses objectifs propres, également cachés.
Le coaching est-il une démarche individualiste
?
Je ne pense pas. Il ne faut pas confondre individualisme et individu.
Dans la démarche du coaching, on prend en compte l'individu en tant
que personne, et pas seulement selon son rôle social ou professionnel.
On peut par exemple aborder des problématiques familiales. Mais
cet individu travaille pour une organisation, dans un contexte donné.
Ne peut-on pas faire un travail de
coaching sans coach ?
On peut se passer d'un coach jusqu'à un certain point. Tout dépend
de la demande. Le travail du coach peut être effectué par le support
social, c'est-à-dire un vaste réseau autour de soi qui permet d'être
soutenu dans les différentes facettes de sa vie.
Faire appel à un coach, n'est-ce pas
nier sa propre responsabilité ?
Au contraire, le travail du coach vise à responsabiliser le coaché,
à lui permettre de résoudre seul son problème. Pendant le travail
de coaching, il doit construire lui-même des solutions. A terme,
le coaché doit sentir qu'il n'a plus besoin du coach.
Parcours
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Dominique Steiler est enseignant-chercheur, directeur du Centre Développement Personnel et Managérial à Grenoble Ecole de Management. Spécialiste du coaching, il termine un DBA (Doctorate of business administration) à l'université de Newscastle (Grande-Bretagne). Diplômé de l'IDCE (Institut pour le développement du conseil d'entreprise) à Angers, d'un DEA sciences humaines de l'université de Nancy-Strasbourg, il a été pilote de chasse dans la Marine Nationale. Parallèlement à ses activités de chercheur et de professeur, Dominique Steiler est coach. |
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