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DOSSIER 
 
20/10/2004

Gérer l'urgence
Les professionnels de l'urgence

Leur métier les amène à gérer des urgences parfois extrêmes. Leurs conseils pour aborder l'urgence.
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Philippe Olivier, 56 ans, médecin urgentiste

"Maîtriser la technique de base"

Diplômé de la faculté de médecine de Montpellier, spécialisé en anesthésie et réanimation, Philippe Olivier est aujourd'hui chef de service du Samu (Services d'aide médicale urgente) et du Smur (Services mobiles d'urgence et de réanimation) au Centre hospitalier d'Avignon. D'une voix calme et assurée, il va à l'essentiel. Sa priorité : détecter l'urgence, la vraie.


Dossier
Savoir travailler dans l'urgence

Pour vous, qu'est-ce que l'urgence ?
Philippe Olivier. Il n'y a rien d'urgent, il n'y a que des gens pressés. Dans les services d'urgence médicale, seuls 8 % des cas s'avèrent de vraies urgences. Une vraie urgence implique un risque vital. Les autres situations restent à traiter, mais pas forcément dans l'immédiat.

Comment êtes-vous formé à affronter les situations d'urgence ?
J'ai suivi une formation en anesthésie et réanimation. La spécialité d'urgentiste n'existait pas, elle vient tout juste d'être créée. L'urgence vitale et la réanimation étaient enseignées dans des cours magistraux et grâce à des stages pratiques. J'ai aussi acquis des connaissances complémentaires telles que la petite chirurgie, l'ophtalmologie d'urgence, la cardiologie d'urgence…

Quelles méthodes mettez-vous en œuvre pour gérer l'urgence ?
Je m'appuie sur une équipe que j'ai sélectionnée. Tout repose en premier lieu sur la connaissance médicale. Ensuite, nous respectons des protocoles précis. Au Samu, une équipe de régulation médicale traite les appels et envoie des réponses adaptées aux demandes : un médecin urgentiste, un psychiatre, un généraliste… Aux urgences, une infirmière accueille les patients, les trie et alerte les médecins selon leur pathologie. Un médecin référant l'aide à évaluer l'urgence. Les patients sont classés par ordre d'importance, et non par ordre d'arrivée. Moins les patients sont malades, plus ils sont exigeants. Nous sommes en permanence harcelés. Il faut expliquer aux patients pourquoi nous ne les soignons pas en priorité. Cela demande beaucoup de temps, du calme et de la diplomatie.


Il faut de fortes capacités de concentration"

La technologie vous apporte-t-elle des solutions ?
Oui, mais la technologie impose aussi de travailler toujours plus vite. Même les services administratifs exigent des délais impossibles. Par ailleurs, les sollicitations ont augmenté de manière injustifiée. Nous nous sommes donc organisés pour mieux y répondre. Mais plus notre organisation se montre efficace, plus nous sommes demandés. C'est un véritable tonneau des Danaïdes. Face à cela, je cherche à développer une politique de réorientation des patients. Les médecins entretiennent une culpabilité judéo-chrétienne : ils croient que leur devoir consiste à tout soigner. Mais cela risque de se faire au détriment des autres. Il faut absolument faire le tri pour se concentrer sur son activité.


Pourriez-vous donner un exemple de situation urgente ? Comment avez-vous réagi ?

Récemment, un toxicomane a agressé un médecin. J'ai dû me jeter sur le malade et le maîtriser. Les médecins se sentent très affectés par ce type d'agression. Après un tel événement, nous organisons en général un débriefing. Un psychologue du service voit les médecins concernés pour désamorcer les angoisses et inquiétudes.

Quelles sont les qualités principales pour bien réagir dans des situations d'urgence ?

Lors de l'évaluation de la gravité, notre
responsabilité est lourde, surtout lorsqu'il s'agit de déclarer qu'un cas n'est pas grave. Par ailleurs, nous ne traitons pas les malades les uns après les autres, mais plusieurs patients en même temps. Ce n'est pas donné à tout le monde. Il faut maîtriser beaucoup de connaissances médicales et faire preuve de sang froid et de fortes capacités de concentration. Un médecin urgentiste doit savoir rester calme et serein, tout en gérant les conflits.

Quels conseils donneriez-vous à un manager pour bien réagir face à une urgence ?
Je ne lui donnerais pas de conseil mais je lui ferais part de mon expérience. Quel que soit le domaine d'activité, il faut une connaissance technique de base. C'est la condition sine qua non. Il faut savoir faire un geste dans l'urgence pour assurer la survie d'un patient. Mais le problème n'est pas réglé pour autant. Dans un deuxième temps, il faudra trouver les causes, faire un diagnostic et comprendre pourquoi on en est arrivé là.


  

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