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ENTREPRISE
 
21/09/2005

Jean-Luc Schuppiser (Essilor)
Sans la R&D, nous étions condamnés à disparaître

Quelle alchimie a fait d'Essilor le leader international en matière de recherche opthalmique ? Réponse du directeur de la R&D.
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Analyse : la R&D en France


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Fondé en 1972 par des chercheurs, Essel et Silor, le groupe Essilor est historiquement marqué par son origine scientifique. Jean-Luc Schuppiser, directeur mondial R&D du groupe, revient sur les évolutions qui ont marqué la recherche en verres ophtalmiques et sur les perspectives mondialisées des nouveaux projets.

Quelle place occupe la recherche et développement chez Essilor ?
Jean-Luc Schuppiser. La R&D fait partie intégrante des unités opérationnelles, et doit donc suivre des règles aussi essentielles que le respect des délais, le fameux "time-to-market". Chez Essilor, la R&D est la première activité à pouvoir influencer l'ensemble des paramètres de production. Elle est devenue d'autant plus importante dans le temps que la concurrence internationale est devenue de plus en plus agressive avec le temps. Bref, soit nous nous adaptions, soit nous étions condamnés à disparaître.
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En quoi la recherche a justement été une condition sine qua non de la survie du groupe ?
La fusion entre Essel et Silor en 1971 a eu lieu non seulement pour des raisons économiques mais aussi technologiques. Essilor avait créé le verre progressif, Varilux, alors que Silor était largement orienté sur le verre plastique. La rencontre des deux entités de recherche a véritablement permis de passer la vitesse supérieure, et de supporter les exigences du marché mondial.

 Comment une initiative devient un projet chez Essilor ?
Cela dépend beaucoup des produits. Pour certains, le chemin entre l'amont et la production est extrêmement cours, pour d'autres nous devons recourir à des études plus lourdes qui représentent des ruptures technologiques. Les phases de développement peuvent être très longues aussi. Mais en général, nous nous fixons un délai de trois ans maximum.


Nous faisons en sorte qu'il y ait des échanges entre les équipes de R&D à travers le monde."

Comment favorisez-vous l'émulation nécessaire à la recherche en interne ?
Nous mettons en place des échanges internationaux enrichissants et motivants en permanence, grâce à l'intranet, aux vidéos-conférences et aux séminaires audio qui permettent le partage des connaissances. Toutes nos communautés R&D travaillent en permanence en contact étroit.

Vous qualifiez la R&D chez Essilor de "fonction transversale". Qu'entendez-vous par là ?
Ne serait-ce qu'au niveau géographique, notre réseau de recherche impose la transversalité. Mais c'est surtout par rapport à la structure de gestion de projet qu'on peut parler de transversalité. La recherche ne peut aller jusqu'au bout qu'avec l'aide de tous ceux qui vont permettre de commercialiser nos produits: production, marketing, logistique, engineering... Bref, la gestion de projet impose la transversalité.

En 2004, vous avez implanté un nouveau centre de recherche à Singapour. Quels sont les avantages d'une localisation de la recherche en Asie ?
Si j'ai dit précédemment que la recherche était mondiale, c'est aussi parce que les besoins produits ne sont pas les mêmes partout. A ces besoins spécifiques, il nous faut répondre avec des équipes où pourront se confronter des cultures et compétences de recherche adaptées aux différentes zones commerciales. Singapour à une position centrale en Asie, nous nous sommes donc naturellement orientés vers cette place forte.

Vous développez également des partenariats avec le CNRS, comme à Toulouse. La France propose-t-elle des conditions favorables au développement de la recherche de votre groupe ?
La France, ou ailleurs, peu importe ! Que la recherche soit publique, privée, occidentale ou asiatique, nous sommes d'abord intéressés par les compétences. C'est pourquoi notre laboratoire toulousain spciélisé en microélectronique travaille en partenariat avec le CNRS et est en contact avec notre pôle de Grenoble, placé sur le même segment de recherche. Nous profitons notamment de leurs recherches en microélectroniques, car nous avons toujours été dépendants du développement des microélectroniques, que nous avons adapté à nos besoins propres.


Partager avec d'autres responsables R&D est très important."

Avez-vous des contacts avec d'autres responsables R&D ?
Bien entendu, nous sommes en contact permanent avec nos homologues étrangers. De plus, en France, nous nous réunissons également au sein d'un cercle des directeurs R&D, dont Essilor a notamment été l'un des membres fondateurs. Cela nous permet de faire du benchmarking dans un horizon beaucoup plus large que notre métier à proprement parler.

La fonction de responsable recherche et développement, que vous occupez depuis 1996, est-elle le résultat d'un plan de carrière ?
A priori, c'est vrai que ma formation et mon parcours professionnel est assez proche du parcours type, si l'on peut dire, d'un responsable R&D : une formation d'ingénieur (en chimie), une expérience professionnelle dans un grand groupe (Rhône-Poulenc), mais aussi une expérience à l'internationale (Princeton, New Jersey). Un plan de carrière ? Non, j'ai avant tout saisi les opportunités qui se sont présentées et qui étaient en lien avec ma passion, la recherche. J'ai naturellement suivi un parcours sur lequel j'ai pu exploiter cette passion du mieux possible.

En quoi cette expérience aux Etats-Unis fut-elle fructueuse ?
Cela fut aux Etats-Unis comme cela aurait put être ailleurs. Si j'avais dû partir aujourd'hui, ça aurait plutôt été l'Asie. L'important, c'est de pouvoir mesurer la dimension internationale de la recherche et partager des savoirs et des expériences sur la base de cultures de travail différentes. Aujourd'hui, la R&D est totalement mondiale, d'ailleurs aucun grand groupe ne limite exclusivement sa recherche sur le sol français.

Parcours
Jean-Luc Schuppiser a rejoint Essilor en septembre 1996 en tant que directeur mondial R&D et membre du Comité exécutif. Diplômé en génie de l'École nationale Supérieure de Chimie, à Mulhouse, il a œuvré de 1977 à 1996 au sein de Rhône Poulenc. Il y a été chercheur; puis directeur de recherche, polymères de spécialité, à Aubervilliers. En 1990 il devient directeur du centre de recherche et développement à Cranbury, Princeton (New Jersey) aux Etats-Unis. En 1992, directeur recherche et développement de produits de grande performance.


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