Les lois du pouvoir Loi n°4 : Dites-en toujours moins que nécessaire

Principe

"Plus vous vous laissez aller à parler, plus vous avez l'air banal et peu maître de vous-même. Même anodines, vos paroles sembleront originales si elles restent vagues et énigmatiques. Les personnages puissants impressionnent et intimides parce qu'ils sont peu loquaces. Plus vous en dites et plus vous risquez de dire des bêtises."

La loi

"Le pouvoir est en bien des manières un jeu d'apparences, et moins vous en dites, plus vous paraissez puissant. Votre silence met votre entourage mal à l'aise. Les êtres humains sont des machines à interpréter et à expliquer ; ils ont besoin de connaître vos pensées. Si vous révélez celles-ci au comptegouttes, ils ne pourront pas percer à jour vos intentions.

c'est en restant extrêmement énigmatique dans ses propos que warhol a bâti son
C'est en restant extrêmement énigmatique dans ses propos que Warhol a bâti son mythe et inspire encore, 12 ans après sa mort, des créations comme celle-ci, "à la manière de Warhol". © Mirko Jirsa

Vos réponses laconiques ou inexistantes les troubleront. Ils se hâteront alors de combler ce silence en bavardant à tort et à travers, trahissant ainsi toutes sortes d'informations précieuses sur eux-mêmes et leurs faiblesses. Leurs rencontres avec vous leur laissera le sentiment d'avoir été dépouillés et ils rentreront chez eux méditer chacun de vos brefs commentaires, ce qui ne fera qu'augmenter leur portée.

Cette stratégie n'est pas réservée aux rois et aux hommes d'État. Dans la plupart des circonstances de la vie quotidienne, moins vous en dites, plus vous paraissez profond et énigmatique. L'artiste Andy Warhol avait appris dès sa jeunesse qu'on peut rarement obtenir ce que l'on veut des gens simplement en le leur demandant. Ils se retournent contre vous, prennent vos paroles à contresens, n'en font qu'à leur tête avec une véritable perversité. "J'ai appris qu'on a plus de pouvoir quand on se tait", confia-t-il un jour à un ami.

Warhol employa ultérieurement ce procédé avec beaucoup de succès. Ses interviews étaient de véritables exercices d'interprétation d'oracle : il prononçait quelques vagues propos fumeux, et le journaliste se creusait la tête pour essayer de comprendre ce que cela voulait dire, imaginant une profondeur derrière des phrases souvent dénuées de sens. Warhol parlait rarement de son travail ; il laissait aux autres le soin de le faire. Il avait appris cette technique d'un autre maître de l'énigme, Marcel Duchamp, qui lui aussi avait compris très tôt que moins il en disait sur son travail d'artiste, plus les gens en parlaient. Et plus ils en parlaient, plus ses oeuvres prenaient de la valeur.

En appliquant cette tactique, vous chargerez vos rares paroles de sens et de pouvoir. En outre, moins vous en direz, moins vous courrez le risque de laisser échapper des propos stupides, voire dangereux."

Extrait de "Power, les 48 lois du pouvoir" de Robert Greene, Leduc.s Editions, avril 2009, p.14 et 15.