"Jean-Claude Trichet a
tort de ne pas baisser les taux d'intérêt"
"Les hauts taux tuent
les totaux" écrivait Arthur Laffer, économiste américain. Ce type de rengaine
se fait généralement entendre dès lors que l'on aborde la politique
monétaire de la Banque centrale européenne. Jean-Claude Trichet fixerait des taux
d'intérêt directeurs trop élevés qui pénaliseraient notre économie.
Un frein à l'activité économique
Les
taux d'intérêt directeurs sont les prix auxquels les banques européennes peuvent
se financer auprès de la BCE. Ils influent sur le taux auquel les banques se prêtent
de l'argent entre elles, l'Euribor, et donc sur le taux auquel ces banques prêtent
aux entreprises et aux particuliers. D'aucuns pensent que ces taux directeurs,
actuellement à 4 %, pénalisent l'économie nationale et européenne car ils
rendent plus cher le coût de l'emprunt destiné à l'investissement. De plus, ils
génèrent un surplus d'épargne car l'argent placé bénéficie d'une rémunération
intéressante. Conséquence : une consommation moindre des ménages. A l'échelle
macroéconomique, ce frein à l'investissement et à la consommation tend à réduire
le potentiel de croissance.
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Evolution des taux directeurs de la BCE depuis 2000 (taux
de référence) Source: Banque de France |
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La menace
inflationniste
Plusieurs éléments expliquent la position de
la BCE. Parmi les missions qui lui sont confiées, deux objectifs principaux
doivent être atteints. La stabilité des prix et le soutien à l'activité
économique. Pourtant, ces deux logiques s'opposent. En effet, une forte
activité économique a tendance à générer de
l'inflation alors qu'un ralentissement freine la croissance des prix. Le problème
vient du fait que la BCE peut soutenir l'activité économique mais
"sans préjudice de la stabilité des prix", comme ses statuts
l'indiquent. Sachant que l'inflation est supérieure à la limite fixée à
2 % depuis plusieurs mois (3,6 % en mars 2008), la BCE décide de maintenir
ses taux.
Monnaie forte ou faible?
Au
niveau monétaire, la BCE doit également faire face à des forces contraires. Une
baisse des taux directeurs provoquerait la fuite de capitaux détenus en euros
vers des placements dans une devise plus rentable. Cette fuite de capitaux se
traduirait donc par une moindre demande pour l'achat d'euros, entraînant
une dépréciation de celui-ci par rapport aux autres devises. Or, un euro faible
renchérirait le coût des importations. L'exemple du niveau actuel des prix du
pétrole confirme l'intérêt d'une monnaie forte pour atténuer le coût de la dépendance
énergétique. En revanche, un euro fort réduit la compétitivité
des exportations et constitue un frein supplémentaire à la croissance.
Conclusion
En réalité, la
polémique vient surtout d'une opposition théorique entre la priorité
donnée à la lutte contre l'inflation ou bien au soutien de l'activité
économique. La comparaison avec la Réserve fédérale américaine s'avère,
à ce titre, intéressante, car elle montre l'existence de ces différents crédos.
En effet, la Fed a tendance à réagir automatiquement à l'activité économique américaine
et à ajuster ses taux en conséquence. A titre d'exemple, elle vient à
nouveau d'abaisser ses taux directeurs à 2 % alors que l'inflation
américaine s'élève 4 % au mois d'avril 2008. Mais elle
connaît également des détracteurs.