L'action en concurrence déloyale entre commerçants relève du Tribunal de commerce

Certains errements judiciaires récents ont pu faire douter les plus grands spécialistes en la matière. Pourtant, l'action en concurrence déloyale relève bel et bien du tribunal de commerce.

Lorsqu'une action en concurrence déloyale ou en parasitisme est sur le point d'être engagée, faut-il porter le litige devant le tribunal de commerce ou le tribunal de grande instance ? Par principe, les litiges entre commerçants relèvent de la compétence du tribunal de commerce. Mais le contentieux de la propriété intellectuelle relève, depuis 2009, exclusivement de la compétence du tribunal de grande instance. 

Or, parfois, les actes de concurrence déloyale peuvent porter sur l'imitation de signes distinctifs, comme un nom commercial ou une dénomination sociale. Et le demandeur peut éventuellement faire référence, dans l'exposé des faits, à des droits sur une marque dont il est titulaire, même s'il n'invoque pas expressément les dispositions du Code de la propriété intellectuelle relatives à la contrefaçon. Les frontières avec la propriété intellectuelle peuvent donc se révéler relativement floues.

C'est dans ce contexte que certains tribunaux de commerce ont pu, dans certaines hypothèses, préférer se déclarer incompétents au profit du tribunal de grande instance. Et nous avons vu dans ces mêmes colonnes que certaines décisions semblaient infondées, notamment un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 28 mai 2013 (n° 12-19.748).

Il est donc rassurant de lire, sous la plume de la Cour d'appel de Lyon dans le cadre d'un arrêt du 23 juin 2016, que le principe de base n'est pas remis en cause, finalement. 

Dans une affaire opposant deux sociétés pour des motifs de concurrence déloyale devant le Tribunal de commerce de Lyon, le défendeur avait soulevé une exception d'incompétence en soutenant que le litige devait être porté devant le tribunal de grande instance. Il s'inspirait probablement de cette jurisprudence éminemment contestable, faisant fi des règles de base en la matière. Il avait toutefois échoué à ce que le Tribunal de commerce se dessaisisse du dossier et avait donc formé contredit devant la Cour (le contredit est la voie de recours à l'encontre des décisions d'un tribunal ne se prononçant que sur la compétence, sans aborder le fond du dossier).

Heureusement, devant la Cour, le rejet de l'exception d'incompétence a été rejeté en ces termes : "[le demandeur] ne fonde pas ses prétentions en concurrence déloyale sur la revendication d'un titre de propriété intellectuelle ou l'existence d'un quelconque acte de contrefaçon de marque ou de modèle dont il serait titulaire, mais sur l'existence d'actes de concurrence déloyale relevant de l'application des articles 1382 et 1383 du Code civil, qui ne nécessitent pas l'examen d'un titre quelconque en matière de propriété intellectuelle, qui ressortit à la compétence exclusive du tribunal de grande instance."

Voici donc une solution claire et nette, qui doit être approuvée dans la simplicité du principe qui la sous-tend. Il ne sera pas inutile de s'en prévaloir face à une exception d'incompétence soulevée de manière non justifiée.