Les nouvelles formes de mécénat : enjeu stratégique pour l'entreprise

L'utilité d'une stratégie de mécénat impliquant personnellement les salariés ne fait plus débat dans l'entreprise. Encore faut-il réussir sa mise en œuvre...

Près d'un quart des plus de 15 ans sont bénévoles dans le milieu associatif et c'est chez les moins de 35 ans que ce chiffre progresse le plus. Ces nouvelles générations aspirent à une plus grande continuité entre leurs vies personnelle et professionnelle. Elles portent aussi sur les entreprises un regard plus critique. Comment ignorer leur sensibilité et de leurs aspirations, quand il faut les attirer, les motiver et les retenir ?

Au-delà de leurs collaborateurs, c'est aussi par leurs clients, leurs partenaires et la société toute entière, via les agences de notation, les médias et les réseaux sociaux, que les entreprises sont en permanence jugées. Impossible de se soustraire à leur responsabilité sociétale sans subir de lourdes conséquences. Or, le mécénat est aujourd'hui l'un indispensable d'une politique RSE digne de ce nom.

Un troisième enjeu justifie la mise en place d'une stratégie ambitieuse : l'innovation. Le mécénat permet en effet d'approcher, sans risque financier, des modèles économiques différents, portés par d'autres acteurs et d'autres logiques. Or, certains peuvent être des modèles d'avenir, transposables par l'entreprise sur ses marchés ou susceptibles de lui en ouvrir de nouveaux. Par ailleurs, une nouvelle génération d’entreprises solidaires est en train de faire souffler un vent d'air frais sur l'action sociale et solidaire. Très professionnelles, elles savent mobiliser les outils les plus modernes et performants pour collecter fonds et compétences. Non seulement elles offrent aux entreprises mécènes une large gamme de services les déchargeant pratiquement de toutes les tâches d'organisation mais, à leur contact, celles-ci approfondissent leur culture de l'économie du partage.

Le ministère de l'Économie estime à près de 9 000 dans le monde le nombre de start-up investies dans la consommation collaborative. Côté utilisateurs, les français sont les champions d'Europe, 36% d'entre eux ayant utilisé les services d'une plate-forme collaborative en 2016. Loin de l'image vieillotte de l'association caritative vivotant au gré des bonnes volontés, nous sommes bien ici au cœur d'une nouvelle économie, professionnalisée et prometteuse.

S'il reste un débat aujourd'hui, c'est sur la manière d'assurer la réussite de cette stratégie. Bien sûr, les formes de mécénat classiques où la direction choisit et finance une cause liée à l'image de marque de l'entreprise gardent toute leur pertinence. Mais c'est bien du développement, à leurs côtés, de nouvelles formes de mécénat répondant plus directement à ces trois enjeux dont il est ici question.

Comment choisir entre la multitude des causes et des formules disponibles ? Puisque l'un de ces enjeux est de répondre au besoin d'implication des collaborateurs, il faut évidemment les interroger. À quelles causes sont-ils sensibles ? Que sont-ils prêts à donner : de l'argent, du temps ou des compétences ? Dans quel cadre et à quelles conditions ? Chez Carglass, nous nous sommes ainsi aperçus que plus de 60% de nos salariés étaient prêts à donner de leur temps personnel pourvu que l'entreprise en fasse autant en libérant une partie de leur temps de travail. Une telle consultation doit bien sûr être soigneusement préparée, sous peine de partir "dans tous les sens" et de ne pas donner de résultats exploitables. C'est la tâche du comité de pilotage, qui doit réunir une diversité suffisante de profils, issus de tous les services, le plus souvent sous l'égide du porteur du projet mécénat. S'il dispose des fonds nécessaires, ce comité gagnera à se faire accompagner par un consultant professionnel car, dans cette affaire, il ne suffit pas de bien se connaître en tant qu'entreprise : il faut aussi connaître les besoins et les contraintes des associations. Amener ses collaborateurs à s'engager dans une action inefficace serait évidemment contre-productif.

La plus grande sincérité est ici de mise. La direction de l'entreprise candidate aux nouvelles formes de mécénat doit accepter d'être "challengée" par les envies de ses salariés. Dans le même esprit, je déconseille fortement de communiquer à l'extérieur avant d'avoir fait la preuve de la solidité de son engagement. Carglass soutient l'association Petits Prince depuis 8 ans mais commence seulement à en parler... L'important est que les collaborateurs de l'entreprise puissent agir personnellement, régulièrement et concrètement dans leur environnement quotidien et qu'ils soient régulièrement informés de l'utilisation de leurs dons. Si la démarche est juste, elle se suffit à elle-même pour susciter, dans l'entreprise, une plus grande fierté d'appartenance et un climat de travail plus motivant.