Agilité : réussir le passage à l’échelle, un défi pour les entreprises

Faire changer la façon dont travaille une équipe n’est pas une chose facile, faire changer la façon dont travaille une entreprise entière l’est encore moins.

Passer à l’échelle en matière d’agilité : un défi notamment pour les grands groupes

En 2001, lorsque Ron Jeffries et ses pairs ont publié le Manifeste Agile, il s’agissait avant tout de rendre la vie plus facile aux développeurs. La taille de l’entreprise n’entrait pas en ligne de compte.

De fait, beaucoup d’organisations parviennent aujourd’hui à faire passer des équipes de développement de projets d’une méthode "cycle en V" à une méthode Agile (SCRUM, Kanban ou encore XP par exemple), mais souvent sur le périmètre d’une équipe – 5 à 10 personnes – et non pour un projet de taille.

Pourtant, que cela soit au sein d’une équipe de 5 ou 150 personnes, l’une des clefs de la réussite d’un projet est la bonne synchronisation. Celle-ci repose sur :

  • Une communication adaptée : des rites clés, pas trop nombreux et intégrant les bonnes parties prenantes
  • Un système de priorisation permettant de choisir de façon pertinente les meilleures prochaines actions
  • Des indicateurs clairement définis, mis à jour régulièrement et correspondant à l’attendu sur un projet donné
  • Un accompagnement des équipes dans leur montée en compétences autour de la gestion de projet grâce aux méthodes agiles
Un enjeu de culture d’entreprise avant tout

Outre cette synchronisation, le bon fonctionnement des méthodes agiles repose notamment sur le principe d’autonomie des équipes. Dans les grandes entreprises où cette capacité à déléguer le pouvoir de décision au sein des équipes projets n’est bien souvent pas encore acquise, l’’agilité à l’échelle passe donc par un profond changement de culture.

On parle souvent de l’"HIPPO problem", HIPPO signifiant Highest Paid Person Opinion, quand c’est la personne la plus haut placée dans la hiérarchie qui impose sa vision sans concertation. Or, les méthodes agiles supposent ce ne sont pas les avis qui doivent primer pour décider de la direction du projet mais les retours d’expériences, les résultants des tests ou encore les observations terrain. Dans ce contexte, ce sont les convictions portées par des opérationnels qui peuvent être plus pertinentes. Mais comment rassembler et synthétiser plusieurs dizaines ou centaines de retours d’expérience rapidement et efficacement ?

Prenons l’exemple d’un projet mené suivant une méthode Agile à l’échelle sur lequel travaillent 100 ou 150 collaborateurs. La structure suivante pourrait être observée :

  • Les personnes embarquées sur le projet travaillent en petites équipes de 5 à 10 personnes
  • Ces équipes peuvent être en verticales ou en transverses (pour des sujets comme l’architecture ou les API)
  • Chaque équipe participe à deux niveaux de synchronisation :au sein d'elle même et avec les autres équipes

Pour assurer le bon déroulement du projet, un certain nombre de rituels et d’outils sont en place afin d’assurer une visibilité globale sur le projet (le PI planning SAFe[1] par exemple).

Les rituels sont des événements qui jalonnent le déroulement d’un projet : les différentes méthodes agiles proposent pour chaque type de rituel un objectif précis, un format adapté ainsi qu’une liste de participants. Si au début, cela sert aux équipes à mettre en place des automatismes, sur le long terme, chaque équipe doit s’approprier ces rituels et éventuellement les faire évoluer afin d’en maximiser la valeur.

On trouve également dans les méthodes dites d’agilité à l’échelle des rôles chargés de garantir le bon fonctionnement de la méthode et la synchronisation entre les équipes. C’est par exemple ce dont s’occupent les RTE et STE (Release Train Engineer et Solution Train Engineer) dans la méthode SAFe[2].

Des méthodologies souples qui s’adaptent aux enjeux

Les méthodes agiles proposent un modèle sans que chaque entreprise doive le construire à partir de zéro. Cependant, il faut avoir une vraie réflexion et ne pas nécessairement copier-coller une méthode au risque de perdre les bénéfices attendus.

Bien choisir le modèle qui convient nécessite d’évaluer sa compatibilité avec :

  • La nature des projets envisagés pour être embarqués dans ce mode de développement
  • La culture de l’entreprise
  • Le niveau d’acculturation des ressources humaines

C’est là que réside une grande partie de l’intérêt des méthodes agiles : elles offrent un cadre qui permet de capitaliser sur l’expérience de ceux qui ont en premier éprouvé ce système de fonctionnement tout en permettant à chacun de se l’approprier et de le faire évoluer à son rythme.

Ces méthodes de développement de projet reposent sur la valorisation de la user centricity où la valeur métier est définie par des échanges et des tests avec des utilisateurs réels. Une approche où la curiosité et l’ouverture d’esprit priment.

Au niveau d’une entreprise, quelle que soit sa taille mais en particulier pour les grands groupes, pour que l’agilité à l’échelle fonctionne, il faut que l’ensemble de la chaîne de décision y croie, des opérationnels jusqu’au top management

[1]  PI planning : cérémonie qui permet d’aligner l’ensemble des équipes de l’Agile Release Train (Art) sur la vision et les objectifs pour une durée de 8 semaines à 12 semaines – plus d’informations sur www.scaledagileframework.com

[2] Plus d’informations sur www.scaledagileframework.com