Connexions interculturelles : le regard d’un cadre dirigeant américain travaillant dans une entreprise française

Au 18ème siècle déjà, alors que la France jouait un rôle capital dans la quête d’indépendance des États-Unis, la relation entre les deux puissances était qualifiée de fructueuse mais complexe. Aujourd’hui, malgré quelques tensions persistantes, les deux pays nouent des liens en bonne intelligence et mutuellement bénéfiques.

Tout comme les gouvernements français et américains ont su et savent toujours collaborer au-delà des différences culturelles, nous oublions facilement que nos deux sphères économiques procèdent de même pour parvenir à des succès communs et à grande échelle. Dans ce monde toujours plus interconnecté, les entreprises s’attachent à construire une culture basée sur des écosystèmes collaboratifs qui encouragent les synergies à l’échelle internationale. Pourtant, ces structures collaboratives se heurtent aux défis transculturels, parfois de l’ordre du détail, parfois issus de différences fondamentales. Il faut savoir identifier ces différences, les reconnaître et surtout ne pas les nier, pour que les équipes internationales travaillent en confiance et avec efficacité. 

Pour naviguer entre ces inévitables nuances de méthodes de travail et de sensibilités culturelles en entreprise internationale, j’ai appris les enseignements suivants :

Construisez des relations professionnelles avant tout

Il est courant pour les collègues américains de partager des informations personnelles dès le début d’une collaboration, ce qui contraste fortement avec la culture française en entreprise. Les Américains sont fiers de tisser des liens personnels. Mais commencer de manière plus formelle et professionnelle est un gage de respect côté français et aidera à instaurer la confiance. Une fois cette base de professionnalisme établie, des conversations plus amicales suivront.

Présentez le processus et la méthodologie avec soin

Chez les Américains, un cadre commence un échange par un résumé des indicateurs de performance, sans donner d’informations précises sur le processus pour les atteindre. A l’inverse, la recherche et l’analyse approfondies prennent une place prépondérante côté Français. Les Américains ont une approche plus souple, d’emblée plus synthétique, alors que les cadres français attendront un niveau de détail plus poussé. En partageant de nouvelles idées, stratégies ou concepts avec les Français, il est primordial que les Américains s’attachent à fournir des données précises pour étayer leurs conclusions. Mes collègues français adoptent un style d’entreprise méthodique, méticuleux et axé sur les données. Pour ceux d’entre nous qui sommes plus habitués à un style direct, il faut savoir rester confiant en ses idées tout en s’appuyant sur des éléments factuels. De même, un Français pourra valoriser le cheminement tout en insistant sur l’idée forte.

Respectez l’équilibre travail/ vie personnelle 

L'un des changements les plus difficiles auxquels j'ai été confronté est l'adaptation aux différences dans l'équilibre travail-vie personnelle. Rester accessible et disponible semble inscrit dans l’ADN américain. Cela ne se vérifie pas toujours dans la culture française. Pour tout dire, mes confrères français font partie des travailleurs les plus appliqués que je connaisse tout en étant particulièrement fiers de garder un équilibre sain entre le travail et la vie personnelle. Ainsi, les heures de repos relèvent de la sphère privée et les vacances sont précieuses. Pour la plupart des Français, la valeur suprême est leur mode de vie et non leur travail – ce que beaucoup d’Américains et moi-même avons de la peine à gérer. 

Communiquez régulièrement

La communication est importante dans tout partenariat professionnel. Elle l'est tout particulièrement pour ceux qui travaillent dans des entreprises transculturelles. Il est crucial de s’astreindre à une communication régulière pour instaurer la confiance et aider à mieux comprendre ce que chacun apporte dans le groupe. Certes les voyages d’affaires sont consommateurs de temps, mais rien ne remplace la valeur des rencontres physiques pour entériner la confiance, favoriser l’engagement et démontrer la capacité à s’adapter à la culture du travail de part et d’autre. 

Encourager les feedbacks et les discussions 

Si j’ai appris dans ma carrière à éviter les conflits en réunion, la culture française d’entreprise encourage le débat ouvert qui non seulement accepte la confrontation mais l’accueille avec bienveillance. Cela peut être désagréable pour certains, mais l’essence de cette démarche est d’accepter toutes les opinions (ou tous les avis) quel que soit la fonction ou le niveau hiérarchique. Que les Français se rassurent, une structure hiérarchique existe bel et bien dans leurs entreprises mais tous les avis y sont ouvertement partagés et les débats peuvent devenir passionnants. Que vous soyez Français ou Américains, soyez ouvert à la remise en question de vos propres façons de communiquer et observez ce qu’une approche plus directe peut apporter de bénéfique. 

Même si j’ai partagé quelques subtilités dans la recherche de cohésion au sein d’équipes multiculturelles, je pense que la meilleure leçon est de toujours apprendre les uns des autres, tant au niveau professionnel que personnel. Tout commence par la communication et la volonté d'apprendre, pour identifier les éléments qui feront la différence dans la construction d'une entreprise internationale forte, composée de collaborateurs engagés !