Le manager, une espèce en voie de disparition ?

À l’heure où les nouvelles technologies automatisent de manière galopante et avec une efficacité redoutable le traitement, la transmission et l’analyse des données business, quelle valeur ajoutée pour le manager contrôleur ?

En lisant l’enquête Hays 2018 sur les missions et défis des managers d’aujourd’hui, deux chiffres sont particulièrement intéressants, car ils traduisent l’urgence à sensibiliser les managers aux révolutions technologiques. Les managers de l’enquête indiquent que le contrôle de l’activité (suivi, reportings…) fait partie du top 3 de leurs missions. Seulement 16% des répondants estiment que l’acquisition de nouvelles compétences liées au numérique et à l’IA est un des enjeux principaux du manager de demain.

La fin du manager contrôleur et sachant

À l’heure où les nouvelles technologies automatisent de manière galopante et avec une efficacité redoutable le traitement, la transmission et l’analyse des données business, quelle valeur ajoutée pour le manager contrôleur ? Le responsable de staffing, le DRH ou encore le directeur commercial qui se gargarisent d’être à la pointe de la technologie dans leur entreprise tout en continuant de gérer leurs équipes et leur business à la feuille Excel ne vont pas faire long feu.

Les innovations B2B sortent à un rythme effréné, les solutions d’intelligence artificielle qui analysent en temps réel l’activité et automatisent le suivi et le reporting des équipes sont de plus en plus performantes. Dans le rapport WIPO Technology Trends (2019), on apprend que près de 340 000 inventions d’IA ont été déposées. Mais ce qui est vraiment troublant, c’est que plus de la moitié de ces inventions sont apparues en 2013. Le rythme du progrès n’est pas simplement rapide, il est exponentiel.

L’adoption des nouvelles technologies et l’évolution des compétences est une question de survie économique pour les entreprises et de survie de l’employabilité pour les managers. N’oublions pas que le coût de la bureaucratie est colossal. Il y a quelques années, Harvard Business Review relevait un chiffre à faire pâlir : “the cost of excess bureaucracy in the U.S. economy amounts to more than $3 trillion in lost economic output”. Plus les entreprises tardent à adopter et à former leurs managers aux nouvelles technologies, plus le fossé se creuse entre elles et les entreprises concurrentes qui ont déjà pris le bon virage.

Mais la responsabilité ne revient pas qu’aux entreprises. Si les managers eux-mêmes ne placent pas l’acquisition de nouvelles compétences liées au numérique au centre de leurs préoccupations, ils vont droit dans le mur. Le manager “sachant”, détenteur exclusif d’un savoir-faire, est une espèce en voie de disparition dans un monde ultra-connecté où le savoir se diffuse partout, à toute vitesse. Cultiver une curiosité constante sur les innovations actuelles et à venir, se former et former ses équipes sont les conditions sine qua non à la compréhension et à l’adaptation à ce monde ultra-connecté et en constante évolution technologique. “Une employabilité en continu à cultiver”, comme le souligne l’APEC dans son rapport annuel 2018-2019 

Quel avenir pour les managers ?

Si le manager contrôleur et le manager sachant n’ont plus d’avenir, que leur reste-t-il ? Si le mouvement, le changement constant et rapide sont les maîtres mots qui caractérisent le monde dans lequel nous vivons, il y a des qualités indispensables aux managers qui souhaitent embarquer leurs équipes. Dans son ouvrage “Lorsque mon boss sera un intelligence artificielle”, Jean-Philippe Couturier consacre toute une partie au management à l’ère de l’IA. Il propose un modèle qu’il a appelé “VRAIE” pour Vision, Relationnel, Adaptabilité, Inventivité et Équilibre.

La révolution technologique qui a lieu actuellement doit être vue comme une opportunité d’enrichissement du métier de manager. C’est non seulement une nécessité pour les entreprises qui souhaitent rester concurrentielles, mais c’est aussi une opportunité pour les managers de gagner un temps considérable sur les tâches fastidieuses et de se consacrer à des missions beaucoup plus gratifiantes et stimulantes. Cette automatisation va résoudre le premier problème d’un manager, quel que soit son niveau hiérarchique : le temps ! Ce temps, le manager va devoir le mettre à profit pour se former, pour innover, pour se réinventer, réinventer son entreprise ou l’organisation de son équipe, favoriser la collaboration entre les femmes et les hommes de l’entreprise.  En gagnant du temps sur des missions de contrôle et de reporting, les managers vont pouvoir s’atteler aux grands enjeux de notre époque : la formation en continue, la collaboration à grande échelle et l’innovation.